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Bayreuth 2023 : clap final et perspectives

BAYREUTH – Cette édition 2023 du festival dédié à Wagner a décidément fait couler beaucoup d’encre, avant même son début : mises en scènes controversées ou intrigantes, taux de remplissage en berne et possibilité de réserver les spectacles du Ring à l’unité (du jamais vu jusqu’alors) avaient alimenté la polémique d’une éventuelle crise sur la Colline Verte. Retour sur ce millésime et regard vers les perspectives.

Polémiques précoces

Entre les annulations et le taux de remplissage en berne -même si bien des salles rêveraient de n’être pleine « qu’à » 95% les soirs creux, cette édition 2023 du festival de Bayreuth s’annonçait mouvementée. De toutes les annulations, celle de Stephen Gould fit ainsi grand bruit – il a depuis annoncé mettre fin à sa carrière et l’on ne remerciera jamais assez la Providence de nous avoir envoyé Andreas Schager -. On assistait toutefois cette année à deux événements, pour le moins inédits, de mémoire de festivalier.

D’abord, certaines places demeuraient invendues à l’ouverture du festival. Deux productions étant initialement concernées : Der fliegende Hollander et le Ring. In fine, seule la Tétralogie ne fit pas le plein (avec toujours un nombre de places vides fort modeste, le Götterdämmerung faisant même salle comble dès sa deuxième représentation). Un taux de remplissage in fine quasi total donc ; auquel contribuèrent peut être deux initiatives mises en places cette année : la possibilité d’obtenir pour les plus jeunes spectateurs -jusqu’à 25 ans- des places pour deux journées du Ring à 90 euros chacune, et la possibilité pour les équipes du festival d’assister à une journée pour 25 euros. Ensuite, la possibilité d’acheter ses places pour le Ring, soirée par soirée (ndlr : il fallait jusqu’ici d’office prendre le cycle dans son intégralité, ce qui impliquait en général de passer toute une semaine sur place. Inimaginable jusqu’alors, cette nouveauté semble durable, du moins jusqu’à 2026, au minimum).

Le Parsifal de Jay Schieb, cette année à Bayreuth © Enrico Nawrath

Alors que les critiques furent promptement émises à l’encontre de la direction, il convient cependant d’observer que, si Bayreuth jouit toujours d’un public d’une ferveur et d’une concentration inégalées, celui-ci subit également les affres de l’époque inhérents au lyrique. Après tout, il est désormais précisé dans la salle que le téléphone doit être éteint et que les photos sont interdites (impensable il y a encore quelques années) et un spectateur aura même commis l’affront de commencer à applaudir pendant le dernier leitmotiv du Ring lors du final du Götterdammerung. Les maisons d’opéra traversent une crise et Bayreuth ne fait pas exception à la règle, ce qui impacte certainement son taux de remplissage.

Parsifal toujours © Enrico Nawrath
2023 : excellent niveau vocal, deuxième coup dans l’eau visuel

Unique nouvelle production de cette édition, Parsifal a enchanté les mélomanes grâce à son plateau de haute volée et à la direction de Pablo Heras-Casado, dont c’était pourtant la première année à Bayreuth. On attendait toutefois beaucoup mieux de Jay Schieb, pourtant démiurge d’une géniale et outrancière production de Bat Out of Hell il n’y a pas si longtemps à Londres. Il a échoué à apporter une relecture profonde au livret et à faire bon usage de la réalité augmentée.  Également impétrante dans la fosse, Nathalie Stutzmann n’a laissé aucune place au mécontentement, avec une production de Tannhäuser par Kratzer réinterprétant le clivage de l’œuvre à l’aune des cultures artistiques et du festival en lui-même.

Le Ring de Valentin Schwarz n’emporte quant à lui toujours pas l’adhésion de la majorité du public. Cette année, il a toutefois pu se consoler grâce à sa distribution  vocale remarquée, mais aussi par la direction de Pietari Inkinen, très analytique, jamais tonitruante, et permettant de suivre efficacement l’intrigue, à défaut de cohérence dramaturgie globale. Der fliegende Holländer est un candidat sérieux au titre de meilleure production de la saison, grâce à une Oksana Lyniv déchainée, un casting hollywoodien et une mise en scène de Tcherniakov efficace en diable, plaçant l’oeuvre non sous le prisme de la rédemption mais bien sous celui de la vengeance. Roue de secours du festival, Tristan und Isolde n’aura guère fait d’étincelles cette année.

Triste Tristan ©Enrico Nawrath
Quel avenir pour le Festival ?

Deux événements centraux jalonneront l’édition 2024 : une nouvelle production de Tristan und Isolde tout d’abord, confiée à Thorleifur Örn Arnarsson, habitué des répertoires shakespeariens et antiques, mais également déjà familier du répertoire wagnérien (il a récemment mis en scène le Parsifal de Hanovre et Siegfried à Karlsruhe). La direction sera confiée à Semyon Bychkov (dont le public parisien garde encore un souvenir émerveillé dans Tristan und Isolde et Elektra) et les rôles-titres à Andreas Schager et Camilla Nylund. 

Sera également redonné le Ring de Schwarz, avec Klaus Florian Vogt dans le rôle de Siegfried et Philippe Jordan à la baguette. Auteur d’un petit séisme à Salzbourg cet été dans Macbeth, métamorphosé aux dires de l’équipe de mise en scène et capable d’insuffler une tension dramatique rare, nul doute que sa présence contribuera fortement à combler la salle dans tous les sens du terme. Avant même la première représentation, il était déjà acté que Nathalie Stutzmann reviendrait diriger Tannhäuser.

Tanhaüser © Enrico Nawrath

L’édition 2025 verra quant à elle une nouvelle version de Die Meistersinger von Nürnberg qui aura la lourde tâche de succéder au petit bijou d’intelligence et de drôlerie de Barrie Kosky -une perle comme seul Bayreuth sait en produire-. Celle nouvelle production sera confiée à Matthias Davids, habitué des transpositions de comédies musicales, il s’agit certainement de l’œuvre du répertoire wagnérien qui lui conviendra le mieux. Les plus curieux guetteront certainement la première de sa Flûte enchantée, le 28 octobre à l’opéra de Leipzig. Il pourra compter pour ses Maîtres chanteurs sur deux superstars lyriques : Michael Spyres et Georg Zeppenfeld ainsi que sur la direction de Daniele Gatti. Cette édition devrait également voir la prise du rôle d’Isolde d’Elīna Garanča, qu’elle commencerait d’ores et déjà à travailler.

2026, une année pour les gouverner tous

Finalement, c’est certainement l’année 2026 qui sera la plus importante puisqu’elle marquera les 150 ans du Ring, qui aura donc logiquement droit à une nouvelle production. Inédit, Rienzi fera également son entrée au répertoire du Festspielhaus, nonobstant les volontés de Wagner lui même lorsqu’il édicta la liste des 10 opéras Bayreuth-compatibles -on parle en l’espèce des opéra dits « de maturité » en opposition à ceux « de jeunesse ». C’est également en 2026 que s’achèvera le mandat de Katharina Wagner ; mise sous une pression croissante par les pouvoirs publics, il y a fort à parier qu’elle jouera son va-tout sur cette édition. Entre intrigues, entrée au répertoire et nouvelles productions, cette édition fera très certainement parler d’elle dans la totalité du monde wagnérien

Siegfried, cette année à Bayreuth ©Enrico Nawrath
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