DANSE – Pour lutter contre la morosité de l’automne, la Royal Opera House a eu le bon goût d’emmener en Espagne le public de ses cinémas partenaires, avec la rediffusion du ballet Don Quichotte de Carlos Acosta (d’après Marius Petipa), donné à Londres du 30 septembre au 17 novembre 2023. Et attention, car le roi Charles III et la reine Camilla étaient présents lors de la première : pas question de faire un faux pas !
En selle, donc ?
Eh bien, c’est que, voyez-vous, pas tout à fait… S’il y a bien une chose qui étonne dans ce ballet du XIXe, c’est le caractère accessoire de la présence de Don Quichotte (Gary Avis) – ou de son écuyer Sancho Pança (Liam Boswell) – qui est loin de détenir le rôle phare. Non, les deux stars, ce sont Kitri (Mayara Magri) et Basilio (Matthew Ball), flamboyants, infatigables, passionnés. Sur le papier, il ne fallait pas s’attendre à une adaptation consistante des aventures imaginées par Cervantès : ici, tout au plus quelques fragments, quelques rixes, des moulins ça et là – mais enfin, rien de bien chevaleresque. Ce Don Quichotte est une historiette vaudevillesque qui se déploie à l’aide d’une pantomime exacerbée. Le bilan musical (la partition est de Ludwig Minkus) n’est guère plus héroïque (indicateur cruel mais efficace : personne ne ressort de la salle en sifflotant l’un des thèmes de la pièce), et contrastait avec l’obsédante partition de La Belle au bois dormant, dernier ballet de la ROH que nous ayons suivi.
L’intérêt de la pièce était ailleurs : car l’exécution était, quant à elle, impeccable. Une fois de plus, la ROH offre du grand spectacle soigné, qu’il s’agisse de la danse en elle-même, frénétique et virtuose, ou de tout ce qui fait le plaisir de la scène. Costumes comme décors sont intelligents et somptueux (tous deux sont signés Tim Hatley), les accessoires très bien incorporés. Le deuxième acte – qui est d’ailleurs celui qui met le plus en avant Don Quichotte – est sans doute celui qui nous a le plus séduit, avec ses tableaux contrastés et ses accents slaves. Quant au duo phare de la soirée, nous ne pouvons que confirmer ce que nous disions déjà pour La Belle au bois dormant : Matthew Ball est fantastique de nonchalance et d’allégresse, tandis que Mayara Magri affirme une présence fière et assurée qui ne décline jamais.
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Londres depuis son siège
Une fois de plus, le choix d’une rediffusion de la programmation de la ROH par les salles de cinéma prend tout son sens : la mise en scène fourmillait de détails qu’une caméra et un zoom permettent sans aucun doute de mieux apprécier. Les tableaux sont vivants, haletants même, et il y a un vertige à alterner entre toutes ces prises de vue à chaque fois idéales et bien pensées. Peut-être ne serez-vous pas convaincus par l’introduction et les entractes, qui font à chaque fois surgir des interviews ou des micro-présentations : il faut pourtant reconnaître que celles-ci offrent de bonnes clés de lecture et ne peuvent pas nuire au visionnage.
Le Don Quichotte de Carlos Acosta est quant à lui un ballet grandiloquent – sans doute pas renversant – qui aura su charmer son public en lui faisant entrevoir les atours d’une Espagne délicieuse et folklorique, portée sur scène par des danseurs et danseuses extrêmement talentueux.
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