RÉCITAL – À Angers Pianopolis, le jeune pianiste Jean-Paul Gasparian, impressionnant impressionniste aux greniers Saint-Jean d’Angers, met en miroir deux grands compositeurs romantiques : Debussy et Tchaïkovski. Fin et magistral à la fois.
Pour sa seconde édition, le festival Angers Pianopolis met toujours à l’honneur les pianistes les plus talentueux, particulièrement les plus jeunes. À l’affiche cette année : Jean-Paul Gasparian, nommé dans la catégorie Révélation soliste instrumental aux Victoires de la musique classique 2021. Ayant enregistré l’intégral des Préludes de Debussy, il propose d’en interpréter le premier livre, en miroir d’une œuvre aussi magistrale que peu jouée, la Grande Sonate op.37 de Tchaïkovski.
Debussy : impressioniste
Les douze préludes de Debussy, interprétées entièrement de mémoire, sont indéniablement impressionnistes sous les doigts du pianiste. Avec légèreté, il propose des touches de couleurs aux teintes subtiles et éthérées. Choisissant un tempo relativement lent mais toujours très régulier – idéalement attentionné dans Des pas sur la neige –, il peint des paysages, parfois très aquatiques avec un ruissèlement agile de notes – tel Ce qu’a vu le vent d’ouest. Le public, réunit dans les impressionnants Greniers Saint-Jean de l’ancien Hôtel-Dieu d’Angers, se montre incroyablement silencieux et attentif pour profiter de toute la sensibilité poétique de l’instrumentiste.
Tchaïkovski : impressionnant
La Grande Sonate de Tchaïkovski est également jouée par cœur, bien qu’elle soit une œuvre assez monumentale. Réputée dramatique et pessimiste, c’est effectivement une œuvre qui doit être domptée avec autant de précision que de passion, ce que manifeste avec brio Jean-Paul Gasparian. Dès le premier mouvement, il démontre une intensité émotionnelle dans son jeu par un touché appuyé mais sans lourdeur. L’écriture se déploie dans tout ce qu’elle a d’orchestrale, dense et délicate à la fois avec des mélodies aux couleurs tout à fait lyriques et magistrales. Le pianiste offre une gestuelle investie, mais très peu exubérante. Dans le deuxième mouvement lent, le touché délicat offre un discours clair malgré le tempo modéré et sa teinte mineure, avant que l’on ne cède à la vivacité vertigineuse du dernier mouvement. Le lyrisme éloquent du pianiste, avec des passages contrastés entre vie débordante et angoisse sous-jacente, finit par convaincre totalement le public admiratif et…impressionné.
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C’est avec une belle sensibilité que Jean-Paul Gasparian offre en bis l’Adagio de Spartacus et Phrygie, extrait du ballet Spartacus de Khatchatourian, recueillant ainsi une nouvelle fois de vives bravi.