PLAYLIST – Elle nous a tiré une larme dans son dernier disque, A Voce di a Terra. Alors on a voulu la connaître un peu plus, et lui proposer de nous faire sa playlist idéale. Entre grand Opéra et beau folklore, voilà le petit monde intérieur d’Éléonore Pancrazi, mezzo ET corse !
Les débuts : l’Opéra, émoi
J. Offenbach – La Périchole, Finale de l’Acte I par Natalie Dessay (mise en scène Jérôme Savary)
J’ai découvert l’Opera par la musique de Jacques Offenbach en retransmission à la télé, dans les mises en scènes magiques de Jérôme Savary. Un bonheur visuel et auditif pour l’enfant que j’étais. J’ai eu la chance de voir La Perichole au Théâtre de Bastia. J’avais 10 ans seulement, et cette soirée avait été une révélation. J’avais même écrit une lettre à Jérôme Savary, qui m’avait répondu très gentiment dans une carte, que j’ai toujours d’ailleurs !
G. Verdi – La Forza del Destino, « Pace, o mio Dio »
À la maison on écoutait beaucoup d’Offenbach, mais comme dans beaucoup de familles méditerranéennes qui aiment l’opéra, on écoutait énormément Verdi aussi. Quel compositeur sait aussi bien marier l’art de la pyrotechnie vocale et celui de la dramaturgie ? À 15 ans j’écoutais en boucle Don Carlo, Ballo in Maschera, Aïda, Rigoletto, Macbetto, Trovatore, pour revivre infiniment ce moment glaçant de «maledizione». Ce moment tord boyaux si horrible et pourtant si jouissif que l’on retrouve dans presque toutes ses œuvres. D’ailleurs, je m’appelle Éléonore pour l’une de ses héroïnes, Leonora dans La Forza del Destino. Mes parents m’ont toujours dit que tout ce qui pouvait arriver dans nos vies ne découlait que de la force du destin. J’ai choisi cet extrait car cet opéra marque mes débuts dans ce répertoire, mon premier rôle verdien ayant été celui de Preziosilla cette année à Toulon et Montpellier. Comment ne pas s’incliner devant Caballé, Carreras et Ghiaurov …
Les mezzos qui m’inspirent : Cecilia Bartoli, Janet Baker
En apprenant le chant et découvrant ma tessiture de mezzo-soprano, j’ai découvert le répertoire interprété par les plus grandes : Cecilia Bartoli, généreuse et incontournable et Janet Baker, sensible et inspirante.
Pauline Viardot – Havanaise par Cecilia Bartoli
Quand je faisais mes études à l’Ecole Normale de Musique de Paris, mon professeur me disait que l’on ne pouvait pas être une très grande chanteuse sans être une très grand artiste. Cette vidéo, comme toutes les prestations de la Bartoli illustre ce propos : même quand elle chante une mélodie qui n’a l’air de rien, elle en fait un chef d’œuvre de personnalité, par son humour et sa générosité. La façon dont la musique la traverse est juste sublime.
G. Mahler – Rückert lieder, Ich bin der Welt abhanden gekommen par Janet Baker
Autre voix donc de mezzo que j’adore que j’ai énormément écouté et que j’écoute encore beaucoup. Une personnalité loin de l’exubérance des divas de son époque, une sobriété magnifique et une sensibilité à fleur de peau transcendante. Les larmes coulent toutes seules…
Mes racines : la Corse et ses traditions
L’Arpeggiata (dir. Chrsitina Pluhar) – Tarantella Napoletana
Les gens qui s’intéresseront à « A Voce di a Terra » comprendront vite que la musique traditionnelle a une place très particulière dans mon cœur de musicienne. La découverte de l’Arpegiatta il y a une douzaine d’années avait été un choc. Tout ce que j’adore : mariage entre folklore et musique baroque ici. Le feu dans l’âme.
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Dans la logique des choses et de son travail de reconstitution autour de la musique folklorique du bassin méditerranéen, L’Arpegiatta a enregistré un album de chant Religieux .Corses avec un des groupes insulaires les plus merveilleux : Barbara Furtuna. J’invite tous les curieux de musique Corse à les écouter. La beauté de la langue, la beauté de l’homogénéité des voix et l’humilité de ces musiciens ne peuvent que vous toucher.
Barbara Fortuna & l’Arpeggiata – Via Crucis
Mon genre de Pop : Tori Amos et Yael Naïm
Tori Amos – Crucify
En musique plus récente, j’ai été touchée pendant l’adolescence par la musique d’une compositrice autrice, interprète, chanteuse et pianiste américaine du nom de Tori Amos. De formation classique initialement, elle laissera les partitions de Mozart pour composer ses chansons, toujours jouer par cœur et d’oreille. Ce que j’aime c’est que c’est à la fois une musique d’une grande sensibilité et d’une grande technicité. J’aime énormément le parcours de cet artiste qui vient d’une éducation musicale « classique », mais qui a choisi de composer de la musique pop, rock progressive, extrêmement moderne pour l’époque où ses chansons sont sorties.
Yael Naïm – Coward
Une dernière pour la route ! Comme chez Tori Amos, ce que j’adore dans cette chanson, c’est l’influence de la musique classique, qui est magnifiquement audible. Ça sonne beau et simple, alors que c’est en fait une musique bien étudiée .
En musique, finalement j’adore cette connexion entre le présent et le passé, sans quoi je suis certaine qu’il n’y a pas de future. J’aime l’union des styles qui traverse les époques pour se marier et rendre certains morceaux complètement intemporel. J’aime avoir la sensation que certaines pièces pourtant datées nous donne la sensation d’avoir été composées hier comme la sensation que Yael Naïm aurait pu écrire cette chanson il y a 500 ans. J’aime la musique pour sa transmission.
Merci, c’est un beau rayon de lumière d’amour universel qui vous a été donné.
Merci de nous avoir permis de nous y nourrir.
Belle continuation à vous
Merci pour ce joli commentaire ! On le transmet à Éléonore : elle sera heureuse de le lire 🙂 Et n’hésitez pas à vous abonner à notre Newsletter hebdomadaire : on ne manque pas de lumière chez Classykêo…