CONCERT – L’organiste Vincent Warnier offre son concert de Noël à l’Auditorium de Radio France en compagnie du jeune altiste Paul Zientara. Un concert qui rappelle que l’orgue peut être à la fois orchestre et partenaire de musique de chambre.
Dans le cadre de la troisième saison musicale européenne, coproduite par Radio France et la Bibliothèque Nationale de France, qui met à l’honneur des œuvres de compositrices, le cycle de concerts d’orgue invite l’organiste titulaire de Saint-Etienne-du-Mont, Vincent Warnier. À l’approche de Noël, vous devinerez facilement la couleur du programme : œuvres du XXe et XXIe siècles encadrées par deux grandes figures des siècles passés, Bach et Wagner. Toute la famille de l’orgue est réunie.
Ça discute à table
Pour l’occasion, Vincent Warnier invite un cousin : le jeune altiste Paul Zientara à le rejoindre pour deux œuvres contemporaines, l’une étant de sa propre composition, Légende pour alto et orgue, et l’autre étant une commande de Radio France à la compositrice Graciane Finzi, Couleurs de vie pour alto et orgue, dont c’est ce soir, à l’Auditorium de Radio France, la création mondiale. Toutes deux ont un titre à propos, proposant un dialogue entre les deux instruments, véritables partenaires de musique de chambre. Le timbre de l’alto se détache tendrement, par la chaleur douce de ses cordes graves et le jeu clair de Paul Zientara. Ses mélodies sont des touches de vie et de lyrisme, agréables caresses dans l’atmosphère sombre et non moins délicate de l’orgue. L’attaque de l’archet sur les cordes produit un léger grain de son : une expressivité touchante, presque une voix humaine.
On se fait une toile ?
Vincent Warnier, en expert de la musique française du XXe siècle, est un peintre dans Le monde dans l’attente du Sauveur de Marcel Dupré et le Prélude et fugue n°2 d’Elsa Barraine. Dans la première, l’organiste y propose une interprétation raffinée où les différentes voix se font échos dans une sorte de danse des couleurs des jeux de l’instrument du facteur Gerhard Grenzing. Si les propositions de jeux démontrent une attention toute particulière de Warnier pour le son et sa connaissance de l’instrument, on aurait néanmoins pu souhaiter plus de direction et de souffle dans son discours. L’œuvre d’Elsa Barraine aurait sans doute, par davantage de fluidité, été encore plus intéressante y gagnant en âme, les œuvres de Bach et de Wagner en souffrent.
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Ils viendront tous… de Bach
Le Prélude et fugue BWV 547 a amplement inspiré l’Ouverture des Maîtres Chanteurs de Nuremberg de Wagner, d’où cette résonnance évidente qui cadre le programme de ce soir. Il est dommage de manquer de cette fluidité, parfois presque hésitante dans le prélude de Bach. L’interprétation manquant d’une certaine audace dans la proposition, l’auditeur n’a pas ces tensions qui rendent l’écoute si intéressante, et surtout si vivante. Si les entrées des sujets de la fugue sont bien distinctes, on ne comprend pas toujours très bien la direction des phrasés, l’accompagnement faisait également défaut de régularité, tout comme dans la transcription pour orgue du Cortège de Lili Boulanger.
Cela n’empêche aucunement le public à se montre reconnaissant, surtout de cette subtilité de l’utilisation des jeux de l’orgue, indéniablement majestueux et virtuose. Vincent Warnier offre alors en bis le choral Allein Gott in der Höh sei Ehr BWV 663, (À Dieu seul dans le ciel soit la Gloire), idéal pour le tout proche temps de Noël.