CONCERT – Le festival des Rencontres musicales d’Évian fait place à la jeunesse lors des concerts matinaux de cette édition 2023 : les formations chambristes de l’Orchestre des jeunes Gustav Mahler interprètent une Sérénade pour vents de Mozart et l’Octuor à cordes de Mendelssohn.
La Source vive
Il ne s’agit pas du roman d’Ayn Rand, l’écrivaine américaine (d’origine russe) et « la prophétesse du capitalisme », la fondatrice de l’objectivisme. Il s’agit de la découverte d’une nouvelle source à Évian, celle qui surplombe la fameuse source et buvette Cachat où s’abreuvent les nombreux habitants, curistes et festivaliers. Elle jaillit non pas du lac Léman tel le geyser genevois, mais de la terre du domaine luxueux d’Évian-les-Bains où s’élève la Grange au Lac. Cette dernière, déjà trentenaire et amoureuse des grands orchestres, accueillera en 2025 une (salle) nouvelle-née, sa petite sœur nommée “La Source vive” dont l’existence sera vouée à la musique de chambre. Cette noble mission témoigne donc de l’importance que le festival “Rencontres musicales” accorde à ce genre intimiste, déjà mis à l’honneur dans les concerts matinaux. L’orchestre des jeunes Gustav Mahler, qui réunit les jeunes musiciens issus de quasi-totalité des pays européens et compte plus de 130 musiciens, se présente en petit concert matinal et en deux formations chambristes: un nonette (9 instruments) et un octuor.
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La jeunesse dans le vent
Wolfgang Amadeus Mozart est l’invité privilégié des programmes de concerts à Evian, aussi bien chambristes que symphoniques ou lyriques. L’ensemble des neuf musiciens de l’Orchestre des jeunes Gustav Mahler interprète sa Sérénade pour vents n° 12 (KV 388), avec une sonorité boisée à l’image de la salle même et de son environnement naturel : les hautbois, clarinettes, bassons, cors et une contrebasse. La touche charnue des cors et bassons contrebalance les tessitures plus chaleureuses, solaires et aigus des hautbois et clarinettes. Ce paysage polychrome déploie son potentiel dans le troisième mouvement avec une coordination impeccable et un jeu leste et enjoué, mais bien mesuré, à la Mozart. Les deux premiers mouvements font jaillir la musicalité des clarinettes, leur phrasé mélodieux et un legato de velours. Le finale s’avère une occasion pour faire galoper le basson, qui impressionne le public par la dextérité des doigts rapides qui lancent un tourbillon des doubles-croches. Les cors sont bien cadencés et stables en intonation, la basse se promène en toute élégance pour un agencement sonore idéal et harmonieux.
Le concerto pour premier violon
Le changement d’équipage effectué, le volume et l’énergie montent ostensiblement, et les contrastes deviennent plus vifs. L’effectif plus compact et homogène (les cordes) s’attaque à l’Octuor à cordes (double quatuor) de Mendelssohn op. 20, parfois surnommé “le concerto pour premier violon”. Et le premier des violons de cette formation amenuisée et aménagée, ainsi que de l’Orchestre entier, est le jeune Kurt Mitterfellner, l’élève de Renaud Capuçon (présent dans la salle) de l’autre côté du lac, à la Haute École de Musique de Lausanne. Sa virtuosité est remarquable, son jeu foisonnant de drame et d’émotions. Au long de l’oeuvre la vigueur perd progressivement en intensité, mais les qualités techniques ne sont pas mises en cause. Exercice difficile pour le reste de la troupe : chaque musicien est presque soliste, ce qui contribue à la netteté d’expression, finement nuancée, qui relève d’un jeu artistiquement mature. Le troisième mouvement met en valeur notamment l’ensemble entier, avant de terminer la soirée en crescendo triomphal.
Les jeunes musiciens sont bruyamment acclamés, de la part de leurs collègues dans l’auditoire et par d’autres admirateurs qui se réjouissent notamment du futur brillant réservé à la musique classique. Une vraie cure de jouvence !
