FESTIVAL – Le Festival International de Musique de Chambre de Salon de Provence s’achève avec ce vingt-troisième concert, teinté d’une légère nostalgie… C’est le dernier d’une longue série.
Néanmoins, petit clin d’œil espiègle, “gran final” en espagnol signifie “super final” pour les français ! Les fidèles du festival sont réunis pour cette grand-messe : les spectateurs récurrents déjà présents samedi et dimanche derniers, deux amies venues des Alpes-Maritimes, des touristes, des enfants des musiciens… et bien sûr les salonais. Les gradins sont remplis, c’est le silence, pas d’applaudissements entre les différents mouvements d’une œuvre : des connaisseurs.
Les femmes à l’honneur
Natalia Lomeiko (violon), Lilli Maijala (alto), Marie Viard (violoncelle), interprètent le quintette en sol mineur de Granados, avec Yuri Zhislin au violon deux et Franck Braley au piano. Différentes émotions parcourent le public.
Le Mistral cale enfin. La nuit tombe. Les spots lumineux éclairent les solistes placés devant les colonnes, dans l’angle de la cour Renaissance du château de l’Empéri. Le charme opère : énergie du premier mouvement avec des coups d’archet incisifs, suivi des échanges mélancoliques d’une mélodie populaire entre les différents pupitres, le presto virtuose, en particulier pour le piano, achève ce quintette.
Vous avez dit nonettes ?
Les premières sont de délicieux gâteaux en pain d’épices, fourrés à l’orange, mais les deuxièmes sont un régal musical, formé d’un ensemble de neuf musiciens (ou chanteurs), bref, un parent proche de l’octuor. Le nonette créé au 19e siècle offre des parfums variés ou plutôt des couleurs musicales variées, en fonction des instruments choisis.
Louis Spohr, un des premiers “fabricants” de nonette utilise les quatre instruments à cordes frottées placés à gauche, avec ici la présence remarquable de Lisa Batiashvili au violon, des bois de différentes tessitures : flûte, hautbois, clarinette, cor et basson. Ce cocktail permet toutes les combinaisons possibles : dialogues entre les bois et les cordes, échanges mutins de thème entre hautbois et clarinette et plus si affinités.
Le nonette de Louise Farrenc, une compositrice enfin sortie de l’ombre, met en relief un dialogue entre violon et cor. Les neuf interprètes jouent chacun des partitions différentes, avec une précision rigoureuse sur le plan technique. Les échanges des motifs sont parfaitement synchronisés. Nuances et et phrasés charment l’auditeur.
Cependant au dix-neuvième siècle, le violon reste le maître incontesté. Lisa Batiashvili, élégante et gracieuse, règne sur huit sujets, telle la soliste d’un concerto pour violon, accompagnée par un octuor. Gammes rapides, sautillé, sauts d’octave, rien ne lui résiste.
Virtuosité rime avec féminité
Après l’entracte, les spectateurs découvrent une nouvelle héroïne. La grande harpe à pédales, régénérée par un dernier accordage, trône, majestueuse, au milieu de la scène entourée par son vassal, le quatuor à cordes.
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Anaëlle Tourret interprète la Danse Profane et la Danse Sacrée de Claude Debussy. La harpiste surfe avec délicatesse et virtuosité sur les vagues ondulantes des cordes frottées, alternant avec habileté, des passages graves denses et des motifs aigus charmeurs, devant un public subjugué, une fascination visuelle et auditive. Féminin encore : Selon une étude de 2018, 94% des harpistes sont des femmes !
Pour clore le Gran Final, les artistes, souriants, heureux, (dont Emmanuel Pahud et Paul Meyer, créateurs du festival), montent plusieurs fois saluer le public chaleureux, exalté, qui applaudit de toute ses forces, frappe des pieds avec enthousiasme, retenant ces derniers instants…
