CONCERT – Dylan Corlay propose un spectacle mêlant clownerie et musique symphonique tout autour de la France. Il se produit aujourd’hui à la Halle aux Grains avec l’Orchestre National du Capitole qu’il dirige en plus de ses performances.
Un as du guidon à la baguette
Vous l’avez sans doute déjà compris : à quelques semaines des Jeux Olympiques et du Tour de France, le sport est mis à l’honneur. C’est à vélo (avec lequel il effectue l’ensemble de ses trajets pour cette tournée) que Dylan Corplay arrive sur scène. Mis dans l’ambiance décalée de la soirée, le public était déjà accueilli à l’extérieur par une banda, dans un programme digne d’un stade de rugby. Au-delà du concert symphonique, c’est bien un spectacle de cirque qui est présenté, dont Dylan Corlay assume pleinement le côté clownesque dans son interview préalable. Il mélange les arts (et les sports) en intégrant notamment de la magie, du jonglage ou encore de la danse avec l’intervention de deux Breakdancers (Naomi Delgado Drago et Tom Carmé) dont la discipline figurera pour la première fois de l’histoire au programme des jeux Olympiques cette année. On assiste donc à un enchainement effréné de pitreries souvent grossièrement exagérées et prévisibles, comme dans tout bon spectacle de clown !
À lire également : Tour d’Orchestre à bicyclette : l’ONDIF grimpe l’Alpe Dièze !
Orchestre – Tour de France, même combat : 100% populaire
Pour vous donner une idée du show Corlay, voici une petite sélection des gags que vous avez ratés :
- Un tour de l’orchestre en mini-vélo (environ de la taille d’un tricycle pour enfant) avant de s’écrouler sur scène au guidon de celui-ci faisant mine ensuite de faire le mort jusqu’à se réveiller sur le Morgenstimmung de Grieg,
- La baguette de chef qu’il casse dans un énervement simulé, l’harmonica amplifié sur la musique d’Il était une fois dans l’ouest,
- Le duo chorégraphique burlesque sur la Danse des heures appuyé sur un vélo avec le comédien Jean-Didier Tiberghien (qui lui apporte par ailleurs régulièrement ses accessoires)
- Les gilets imprimés des drapeaux du pays d’origine des compositeurs remplacés en une fraction de seconde : Pump and circumstance, Va pensiero (Nabucco) et les couplets du toréador (Carmen)
- L’interprétation quasi accroupi d’un concerto pour mini-piano de sa composition en prenant les airs affligés de certains grands pianistes.
L’orchestre prend aussi sa part dans les gags et intervient à grands coups de sonnettes de vélos, placés sur les sièges des musiciens, de pancartes « show must go on » tirées pour appeler à la poursuite du spectacle, de cymbales tombant volontairement, d’une même mesure de la Polka de Johann Strauss II (Die Fledermaus) répétée ad nauseam comme un disque rayé, de partitions qui s’envolent en plein morceau ou encore de fleurs émergeant de leur rang pendant la Danse des heures (La Giocconda). La Maîtrise du Capitole, en T-shirts blancs floqués d’un panneau « attention au vélo » est placée dans le public (dont la quasi moitié des places a par ailleurs été condamnée) et intervient pour les chœurs. Elle s’intègre efficacement dans les courts temps impartis mais est souvent partiellement couverte par l’orchestre.
Orchestre Tik Tok : pas plus de deux minutes d’attention !
Le programme durant à peine une heure quinze, tout ça s’enchaine très rapidement. Comme les jeux olympiques et le Tour de France, le concert se veut donc populaire, en se concentrant sur des extraits parmi les plus célèbres du répertoire et agrémenté de références à la pop (We Will Rock You) et au cinéma (Harry Potter, Star Wars) mais aucun n’est jamais développé. Comme un flow tik tok, on swipe ainsi de morceau en morceau, de danse burlesque en facétie sans que l’attention du public ne soit jamais retenue plus de quelques secondes. Quelques minutes tout au plus. Les œuvres se retrouvent systématiquement dans des medleys frénétiques interrompus par de multiples gags ou déformés par des sifflets, klaxons, sonnettes de vélos ou autre… Difficile dans ces conditions de profiter véritablement de la musique et de l’apprécier pour ce qu’elle est malgré la qualité de l’orchestre qui offre des interprétations particulièrement dynamiques et percutantes de ces tubes et fait preuve d’une belle unité malgré les difficultés imposées.
Pagliacci : un rire au goût tragique ?
Comme dans Pagliacci, le clown le plus célèbre de l’opéra, le public s’exalte de ces pasquinades et ne cesse d’en redemander en les applaudissant toujours plus fort. Mais comme notre clown tragique s’avilit en cherchant à faire rire, l’orchestre symphonique (et son répertoire) façon jukebox de cirque qui accompagne la pantalonnade n’est-il pas un peu faiblement exploité, même pour la bonne cause de nous faire rire ? Ce qui est sûr, c’est qu’avec ce tour d’orchestre à bicyclette, il en a gardé sous la pédale…
Demandez le programme !
- B. Smetana – Danse des comédiens (La Fiancée vendue)
- L.V. Beethoven – Hymne à la joie
(Symphonie n°9) - J. Strauss – Le Beau Danube bleu
- F. Chopin – Marche Funèbre (Sonate pour piano n°2)
- E. Grieg – Peer Gynt
- L. Prima – Minnie the Moocher
- J. Strauss – Unter Donner und Blitz
- J. Strauss – Pizzicato Polka
- E. Elgar – Pomp and circumstance
- J.S Bach (arr. Gounod) – Ave Maria
- G. Verdi – Va Pensiero (Nabucco)
- G. Bizet – Air du Toréador (Carmen)
- A. Ponchielli – Danse des heures (La Gioconda)
- Z. de Abreu – Tico Tico
- L. Prima – Sing Sing Sing
- D. Corlay – Concerto pour Petit piano
