DISQUE – L’Orchestre de Chambre Nouvelle-Aquitaine et Jean-François Heisser dégainent les premiers, pour entamer l’année Ravel, avec un enregistrement Mirare. Le Concerto en Sol, Ma Mère l’Oye, la Pavane pour une infante défunte et le Tombeau de Couperin sont au programme, d’un disque au nom qui tombe sous le sens : Ravel l’Alchimiste.
Maurice Ravel – Vlado Perlemuter. Vlado Perlemuter – Jean-François Heisser. Voilà la filiation qui explique que le pianiste français, directeur musical de l’Orchestre de Chambre Nouvelle-Aquitaine, ait voulu être le premier à dégainer son enregistrement, dans les premiers jours d’une année Ravel qui fête les 150 ans de la naissance du compositeur français le plus joué dans le monde.
Tubes à l’essai
On évacue tout de suite la question : non, dans ce disque paru chez Mirare le 9 janvier 2025, il n’ya pas de Boléro. Première raison : la musique de Ravel n’a pas besoin de sa tête de gondole pour plaire. Écoutez la Pavane pour une infante défunte, et vous aurez votre nouveau Ravel préféré… Deuxième raison : l’Orchestre de Chambre Nouvelle-Aquitaine est un orchestre de chambre. Il a donc beaucoup mieux à sa disposition pour jouer Ravel, un musicien pour qui le mariage des timbres et l’écoute mutuelle sont tellement importants.
Les œuvres enregistrées dans ce disque sont des unions intimes entre les dimensions de la musique. Du noir et blanc du piano jusqu’à la palette chromatique de l’orchestre. De l’inspiration d’un Ravel à l’étude jusqu’à son alchimie collective. Ma Mère l’Oye et le Tombeau de Couperin sont deux œuvres qui ont connu le même destin : orchestrées par l’auteur même qui les avait d’abord imaginées au piano avant de les mettre en corps, en distribuant à chaque pupitre ses contrechants et ses plans sonores. Et, si on doit bien trouver une qualité essentielle à cet enregistrement, c’est que le creuset intime d’un « petit » orchestre comme l’OCNA situe les versions de ces partitions à un exact point de rencontre, à la frontière entre le salon et le concert. Entre l’esprit et le corps.
Heisser à l’école des sorciers
L’autre qualité est pour l’Histoire. Parce que Jean-François Heisser est un héritier en ligne directe avec Ravel, comme on l’écrivait plus haut, sa version du Concerto en Sol a forcément quelques chromosomes directement ravéliens dans son ADN. Directeur pendant près de 30 ans de l’Académie puis du Festival qui portent la mémoire vivante du compositeur, dans son pays basque natal, Heisser se saisit du Concerto en Sol avec tendresse. Dans le deuxième mouvement, l’entrelacs du piano et des solos trouve dans le chef pianiste un accompagnateur et une motrice, tour à tour. En second plan attentif quand cor anglais, flûte et clarinette prennent la lumière, Heisser sait prendre les rennes quand c’est nécessaire, notamment dans une intro où le tempo passe le premier. On sent dans cette version la volonté de faire entendre la valse, le battement ternaire sans chichis. 1, 2, 3, et basta, pas un gramme de rubato : du Ravel d’école !
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Ravel, l’Alchimiste est le nom de cet album. Voilà qui résume parfaitement la musique de Ravel, ses recettes et sa méthode. Un art de la frontière, entre le labo et l’atelier. Entre la science et la magie.
C’est pour qui ?
- Pour les amateurs du Ravel coloriste : du piano en noir et blanc au mille couleurs de l’orchestre
- Pour quiconque s’intéresse à l’héritage de Ravel
- Pour les inconditionnels du Festival Ravel, dont Jean-François Heisser a été le directeur historique
Pourquoi on aime ?
- Pour la délicatesse, rare, de Jean-François Heisser dans le 2ème mouvement du Concerto en Sol
- Pour l’interprétation sans chichis ni rubato artificiel
- Pour le titre : Ravel l’alchimiste, on n’y aurait pas pensé nous-mêmes ! Bien joué…
