CONCERT-ANNIVERSAIRE – Insula orchestra fête ses 10 ans à l’occasion de ce concert réunissant le Concerto pour piano d’Emilie Mayer et la Symphonie N° 9 “La Grande” de Franz Schubert. Un moment si chaleureux que même l’Auditorium de La Seine Musicale devient comme un salon cosy pour une soirée festive :
Carton d’invitation
Nous sommes conviés à cette soirée d’anniversaire qui se déroule ainsi comme dans le salon d’Emilie Mayer (elle qui faisait effectivement « société » en son temps, dans sa maison à Berlin) et puis dans un salon viennois avec Schubert (avec ces soirées emblématiques de la période romantique ayant même pris le nom de « Schubertiade »). Le tout, miracle de la musique, sans bouger du confortable Auditorium Patrick Devedjian ! Certes, ce bel écrin contient plus de mille places, mais l’ambiance et le jeu sont si intimes et chaleureux qu’on se croirait au coin du feu, où David Fray se serait installé au piano. Les instruments sont d’époque, comme toujours pour Insula orchestra qui a même initié David Fray à la pratique. Il joue ce soir un piano Pleyel 1892. Confortablement installé dans le fond de son siège, comme dans un bon fauteuil et en bonne compagnie, il pianote avec agilité, délicatesse, d’un très beau son feutré.
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Certes, les instruments anciens ne sont pas aussi responsifs et fiables que les mécaniques modernes. Des départs manquent de synchronisation, des phrasés perdent en justesse, des canards s’ébattent (rarement) mais c’est aussi le lot d’une soirée dans un salon : les conversations ne partent pas toujours en même temps et dans le même sens, certaines anecdotes prometteuses perdent de leur sel en fin de soirée, certains rires ou éclats gênants d’un petit groupe surgissent soudain et font sursauter toute l’assistance. Ce n’est en tout cas pas la faute de ces partitions, et si le Concerto de Mayer a la qualité virtuose d’un Concerto de salon et un métier des plus noblement classiques, il en a aussi les grands déploiements romantiques. Les archets et les doigts des musiciens ne s’y trompent pas : tour à tour délicats, vifs et bondissants, ils gardent un plein ancrage pour mieux s’élancer, suivant en cela pleinement la direction de Laurence Equilbey, sacrée hôtesse.
Le lien avec David Fray ne cesse de se confirmer, le pianiste se tournant même vers l’orchestre comme il tourne les pages de sa partition, investi jusqu’à l’accolade finale avec la cheffe : les convives s’entendent bien, c’est le moins qu’on puisse dire !
Du côté de chez Franz
Les cors affrontent bravement l’ouverture exposée de “La Grande” Symphonie, qui sonne ici comme un clairon annonçant la suite d’un festin. Et pour cause, il sera musical. Les lumières de salle se tamisent même, comme pour passer au fumoir. Et Schubert dans ses teintes nostalgiques nous raconte ses peines amoureuses, empruntant aux thèmes mélodiques de ses Lieder, puis s’élançant dans une épique partie de chasse narrée…
Les œuvres racontent leurs histoires, celle de leur compositrice et compositeur, comme Insula continue de raconter la sienne, et les belles soirées d’anniversaire c’est comme ça, et comme ce soir, ça passe trop vite. Ça se finit même parfois par la séance de diapos rétrospective. Elle est ici offerte par Insula sur un grand écran vidéo avec les moments marquants de leurs 10 ans de projets, et tout en jouant l’Ouverture en Ut de Mayer.
On se dit rendez-vous dans 10 ans, même lieu, même jour, mêmes Pom Pom Pom Pom ? (en tout cas les saisons prochaines lanceront un grand projet Beethoven… vous l’avez ?).
