DISQUE – La violoncelliste Pauline Buet et le pianiste David Violi qui forment le duo I Giardini, signent un très beau disque, Bleu. La note bleue de Chopin s’y marie avec le bleu électrique de Poulenc.
« Plus bleu que le bleu de tes yeux, Je ne vois rien de mieux, Même le bleu des cieux », chantait Edith Piaf. « Le monde est bleu comme une orange », écrivait le poète Paul Éluard.
« C’est froid parce que c’est bleu. As-tu regardé les naufragés dont l’océan bleu couvre parfois les récifs, après la tempête ? Leur peau est pâle et hérissée, ils semblent avoir enduré le froid. Pareillement, c’est dans le ciel bleu que s’attroupent les nues pour faire la grêle », fait dire l’écrivain Olivier Bleys à l’un de ses personnages de Pastel (Gallimard).
La violoncelliste Pauline Buet et le pianiste David Violi apportent leur pierre, musicale, aux méditations poétiques sur la couleur bleue. Les deux interprètes fondateurs du collectif I Giardini (le jardin), signent un disque intitulé Bleu, paru en février chez Alpha, dans lequel ils ont cherché la mystérieuse « note bleue » de Frédéric Chopin.
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Spleen et vague à l’âme
Cette note bleue, comme plus tard dans le blues, évoque la nostalgie, les vagues à l’âme, le spleen… Ces émotions irradient dans la Sonate pour violoncelle et piano op.65 de Chopin dont le duo donne une version lumineuse et pleine d’espoir. Pour les deux musiciens cette note bleue n’est « pas tout à fait de la souffrance, ni tout à fait de la tristesse, mais plutôt une certaine mélancolie douce, une nostalgie heureuse. »
On comprend pourquoi ils associent dans ce disque la Sonate de Francis Poulenc, l’excentrique toujours sur la brèche de l’émotion. Composé par Poulenc pendant la seconde guerre mondiale, cette sonate pour violoncelle et piano a eu du mal à voir le jour. Poulenc était refroidi par l’accueil fait à sa Sonate pour violon et piano et ne se sent pas à l’aise avec l’écriture pour violoncelle. La postérité – dont le critique du Monde Renaud Machart – a décrété que seul le deuxième mouvement, la cavatine, valait l’écoute. I Giardini nous invite à changer notre regard sur l’œuvre. Son ambivalence, ses doutes, ce mélange entre romantisme et ironie ne sont-ils pas tout à fait parlant à nos oreilles et nos cœurs de cette troublante année 2022 ? Là aussi, l’interprétation musicale est splendide.
Pourquoi on aime
- Pour une très belle version de la Sonate pour violoncelle et piano de Chopin
- La (re)découverte de la Sonate de Poulenc
- Et le « bis » de ce disque : leur version de Septembre de Barbara où la violoncelliste chante d’une voix profonde et tendre.
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