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Weber à vif, nos nerfs aussi

FESTIVAL – L’acteur Jacques Weber récite des textes de littérature et de théâtre avec un accompagnement musical, au Festival Off d’Avignon, dans ce qui est déjà devenu son vaisseau amiral : La Scala Provence, inaugurée l’année dernière (après La Scala Paris en 2018). Un spectacle intitulé “Weber à vif” et qui nous a effectivement mis (les nerfs) à vif.

À plein nez

« C’est un roc ! … c’est un pic ! … c’est un cap ! Que dis-je, c’est un cap ? … C’est une péninsule ! » et c’est davantage encore. Ce qu’a choisi Jacques Weber pour ce spectacle, c’est une galaxie de textes, vertigineuse : Rosencrantz et Guildenstern sont morts (de Tom Stoppard), L’œil de veau (Georges Courteline), Ruy Blas (Victor Hugo), Le dédoublement de la personnalité (Raymond Devos), Le coupeur d’eau extrait de La vie matérielle (Marguerite Duras), sans oublier Claudel, Artaud, Maïakovski, Flaubert…. N’en jetez plus ! Mais si encore un dernier, bien nez-videmment tiré, avec ses vers, du Cyrano de Bergerac, dont Weber est une inoubliable incarnation : la tirade des « non merci ». Sauf que c’est malheureusement ce que nous avons envie de lui répondre, devant tant et tant et trop de texte, quand il en ajoute un autre et encore un autre… Non merci, c’est assez.

Évidemment, Jacques Weber a du métier et nous ne l’avons pas du tout dans le nez, mais il n’empêche, elle nous y monte, la moutarde, avant de nous ressortir par les trous de nez (pendant qu’il se pique le nez, sévère). 

Alors bien sûr, Weber les vit, il les respire ces textes, à plein nez, il les connaît, ça se voit comme le nez au milieu de la figure : il ne fait pas que les citer, il les mâtine de pensées personnelles sur le monde d’aujourd’hui, ses expériences dans le monde artistique et ailleurs, de réflexions et de petites touches d’humour ou autre anecdotes (plus ou moins bien senties) qui font rire certaines personnes dans le public. Il n’empêche qu’on se casse le nez à courir ainsi d’un texte à l’autre, d’un siècle à l’autre (en un peu plus d’une heure), et qu’on se recasse le nez à chercher les liens avec la musique qui nous avait ici attirés, menés par le bout du nez (le spectacle est annoncé dans la catégorie MUSIQUE THÉÂTRE et la musique a énormément droit de citer, même au Festival d’Avignon, preuve en est, notre site-frère lyrique regorge de comptes-rendus de ce Off).

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Mal nez

Sa voix parlée a certes sa musicalité, elle est bien projetée et sa présence sur scène est très détendue. Il amuse et s’amuse. Cependant, même sa diction laisse à désirer, rendant les textes difficiles à saisir.

Le contenu du spectacle est ainsi difficile à suivre et apparaît vraiment comme raccommodé (même avec du joli fil doré). Jacques Weber étant un grand homme du théâtre, il s’en sort avec des pirouettes-cacahuètes, mais le spectacle semble vraiment se casser le bout du nez, dans le contenu, mais aussi sur la forme. Ce spectacle “Weber à vif” est en effet présenté comme une “saga musicale et poétique de trois grands de la scène”, mais le lien entre l’acteur et les deux musiciens semble, sur scène, aussi aléatoire que leur rencontre.

Jacques Weber la relate ainsi : “Récemment je rencontrai un accordéoniste de renommée internationale, Pascal Contet ; celui-ci fut enthousiaste à l’idée de partager la scène avec moi. Quelques temps auparavant j’avais eu l’occasion d’assister à un concert de Johnny Hallyday ; je fus saisi et enthousiasmé par le spectacle, mais aussi par le solo de son harmoniciste : Greg Zlap. Lui aussi fut d’accord pour me suivre dans ma randonnée littéraire”.

Jacques Weber et ses deux compagnons : Pascal Contet et Greg Zlap © Thomas O’Brien
Deux phares, trop à l’ouest

Les instrumentistes sont là pour accompagner le personnage principal du spectacle, avec quelques petits passages musicaux, rendant d’autant plus frustrant de ne pouvoir davantage profiter de leur toucher léger alternant avec d’intéressants effets sonores (l’espoir de voir tout cela relié aux textes ayant coulé depuis longtemps, ou étant parti en courant : selon que vous préférez l’expression française ou anglaise, le nez qui coule ou le runny nose). Et pourtant, ils auraient pu résonner ensemble, avec le bruit du vent reproduit par l’accordéon ou celui d’un train à vapeur par l’harmonica. Les deux musiciens esquissent même une forme de théâtralité, s’affrontant en duel comme des cowboys du Far-West.

D’autant plus dommage, d’autant plus frustrant, Weber nous mettant d’autant plus à vif. Mais bon, devant un tel monstre sacré, facile de mettre un faux nez (c’est de circonstance), et pas même besoin de nous le pincer pour rejoindre les longs applaudissements, sincères, d’un public nombreux et heureux (à vue de nez). 

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