AccueilA la UneBrahms à Prades : retour vers le futur

Brahms à Prades : retour vers le futur

COMPTE-RENDU : Pierre Bleuse, directeur artistique du festival Pablo Casals de Prades dirige l’orchestre du Festival Pablo Casals pour son concert d’ouverture consacré au compositeur Johannes Brahms. Ils sont rejoints par la violoncelliste Julia Hagen et le violoniste star Renaud Capuçon. 

Brahms et Casals : une histoire qui dure

Le programme du concert, dédié à Brahms (compositeur cher à Pablo Casals) se compose de ses deux dernières compositions pour orchestre : le double concerto pour violon et violoncelle et la quatrième symphonie. Le choix du double concerto raisonne particulièrement car Pablo Casals est le violoncelle soliste de sa première gravure discographique en 1929, avec Jacques Thibaud et Alfred Cortot dirigeant l’orchestre Pablo Casals de Barcelone. Réunissant le violoncelle, instrument de Pablo Casals fondateur du festival et le violon, instrument de prédilection de Pierre Bleuse directeur actuel du festival, ce choix de programmation souligne aussi la continuation du festival tout en faisant un clin d’œil à son héritage. Bien qu’intitulé concert d’ouverture, des prémices avaient toutefois déjà commencé la veille : une conférence suivie d’un récital de violoncelle en hommage au fondateur éponyme du festival dont on commémore les 50 ans de la disparition. 

Pierre Bleuse : un violoncelliste pour diriger le festival Pablo Casals © Hugues Argence
L’abbaye Saint Michel de Cuxa : de la messe au festival !

Le concert du jour a pour écrin l’Abbaye Saint Michel de Cuxa, joyau de l’architecture romane, qui accueille encore aujourd’hui une communauté de moines bénédictins et change chaque été de vocation pour quelques soirées le temps desquelles elle accueille des concerts du festival de Prades. La lumière naturelle entrant par les fenêtres et les vitraux se mêle à celle des projecteurs pour plonger le lieu dans une ambiance tamisée et subtilement colorée. Le concert peut commencer. 

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La jeunesse au service du vieux Brahms

L’impulsion est donnée dès la première mesure. L’orchestre crée l’élan qui entraine le public et le renouvelle à chaque début de mouvement, du concerto comme de la symphonie. Pierre Bleuse amène la totalité des musiciens sous sa baguette qui jouent ainsi d’une même énergie. Sa lecture de Brahms est assez solennelle et s’inscrit tout à fait dans la tradition interprétative de la musique de ce compositeur. L’orchestre propose une puissance homogène dans le concerto et plus de nuances dans les volumes pour la symphonie. Les tempi sont adaptés, créant à la fois de la dynamique dans les passages rapides et de la majesté et de la stabilité dans les moments plus lents. Le travail sur les motifs musicaux (très présents dans les deux œuvres) est réalisé avec finesse. Leur déclinaison est à la fois précise et rassurante tout en s’inscrivant dans la poésie de la musique de Brahms.

Pas de concert rasoir avec Pierre Bleuse ©Hugues Argence
Deux solistes pour le prix d’un !

Ce travail associe également efficacement les deux solistes lors du concerto. Ils s’intègrent en symbiose avec l’orchestre dans les rythmes comme dans les volumes. Renaud Capuçon propose un jeu délicat, trouvant l’équilibre entre des envolées libérées et des moments plus méthodiques ancrant son jeu. Ses aigus élégants trouvent la juste limite : un son vif mais jamais strident ou agressif. Les dialogues avec le violoncelle de Julia Hagen ne se construisent ni sur l’opposition ni sur la fusion, laissant à chacun un espace d’expression de sa partie. Le jeu de Julia Hagen révèle des sonorités souvent profondes et romantiques mais se retrouve parfois éclipsé par celui de Renaud Capuçon. L’orchestre sublime sa fibre artistique dans la quatrième symphonie de Brahms. Il en saisit les aspects dramatiques (du quatrième mouvement notamment). Les musiciens sont impliqués amenant une bonne unité dans l’intention comme dans l’énergie. Si la coordination est assurée dans les thèmes lents, majestueux ou mélancoliques, elle se perd quelque peu dans les accélérations et les rythmes rapides (ce qui s’entend d’autant plus avec l’acoustique réverbérée de l’église). 

Face à face, corde à corde ©Hugues Argence
Voyage réussi : le public en redemande

En bonus, le public venu nombreux et même de l’étranger (on entend ci et là parler anglais et allemand) a le plaisir d’entendre un court extrait de cor alpin en sortie d’entracte avant la symphonie. L’émouvant chant des oiseaux, adapté par Pablo Casals à partir du chant traditionnel catalan du même nom, est interprété pour rappel après la symphonie, arrangé ici par un musicien de l’orchestre dans une nouvelle version pour orchestre. Nouveau clin d’œil à l’héritage du festival, alliant la nouveauté de ce nouvel arrangement à la tradition institué par Pablo Cazals qui tenait en effet à jouer ce chant des oiseaux à chacun de ses concerts. Le public ne boude pas son plaisir et applaudit longuement les musiciens (y compris entre les mouvements du concerto). Prades et son agglomération réussissent une fois de plus, tout comme à l’époque de Pablo Casals, le pari d’attirer des musiciens parmi les plus prestigieux et de les associer à de jeunes talents prometteurs. Pour ce concert d’ouverture, le résultat est brillant, proposant une interprétation chargée de poésie et de mélancolie des deux chefs-d’œuvre tardifs de Brahms.

 

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