CONCERT – Astrig Siranossian, violoncelliste, interprète un programme original, symbiose entre des mélodies arméniennes et le répertoire classique, dans le cadre du onzième concert du Festival International de Musique de Chambre de Salon de Provence. Cette carte blanche d’une heure permet d’explorer en profondeur les possibilités techniques et expressives du violoncelle…et de la voix humaine, dans un spectacle solo.
Un lieu – une atmosphère
Les cigales chantent, c’est le sud. Le parvis de l’ancienne église devenue temple est baigné de soleil. Les arrivants sont nombreux. À l’intérieur les reflets des vitraux illuminent les murs.
Astrig entre, majestueuse dans sa tenue rouge, portant respectueusement l’instrument à quatre cordes, qui réunit une assemblée imposante, tous les bancs sont occupés, pour une communion musicale magique. Une inspiration délicate et l’archet posé avec fermeté, commence sa course du talon à la pointe, pendant que la main gauche choisit son parcours sur la touche en ébène.
Violoncelle et voix humaine pour une seule interprète.
Astrig transmet les mélodies arméniennes “pan secret de son enfance”. Elle s’accompagne au violoncelle, tout en chantant avec facilité d’une voix claire de soprano, des onomatopées,des vocalises ou des paroles en arménien. Les nombreux chromatismes évoquent l’orient, l’ambitus est souvent restreint.
Les yeux mi-clos, elle est dans un état second, devant un public silencieux et hypnotisé. Sous ses doigts enchanteurs, le violoncelle joué en pizzicato devient une guitare dans “sareri hovin mernem, un sautillé virtuose assure un tempo rapide dans “shoger”.
Un sandwich musical
La première partie du concert, jouée sur un violoncelle avec des cordes en boyau, respectant l’esprit baroque, alterne régulièrement une mélodie arménienne (souvent chantée) et un mouvement de la suite numéro un de Jean-Sébastien Bach, étudiée par tout violoncelliste digne de ce nom ! un sandwich à douze étages, aux ingrédients variés.
Une imperceptible respiration d’Astrig avec l’archet délicatement suspendu, permet la succession naturelle des différents mouvements dans un silence…de cathédrale. Le public est pratiquement en apnée.
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Une magicienne virtuose
Notre magicienne troque son violoncelle baroque contre un violoncelle moderne, pour dompter la suite diabolique de Gaspar Cassado composée en 1926. Treize minutes d’interprétation et de technique : le parcours du combattant est rude, mélodies très graves au vibrato expressif, bariolages, doubles cordes, escapades au bout de la touche pour des notes très aiguës…en fermant les yeux, l’impression hallucinante d’écouter deux violoncelles. L’enchantement est permanent.
Le public explose après la note finale, les applaudissements et les ovations retenus depuis si longtemps fusent de tout côté. Astrig salue avec élégance, le violoncelle contre son cœur et offre une dernière mélodie arménienne aux spectateurs ensorcelés.