CONCERT – Pianiste hors-norme dans son choix d’œuvres et de projets, Vikingur Ólafsson s’est lancé sur les traces des ses glorieux ancêtres pianistes : un enregistrement et une tournée de concert dédiés aux Variations Goldberg de Bach, qui passait par Bruxelles cette semaine. Un point de vue original sur l’œuvre, qui nous a inspiré des liens pour le moins inattendus…
Avis aux insomniaques et chercheureuses de berceuses :
Deux thérapies analogues pour cet automne : les Variations Goldberg par Víkingur Olafsson et la mini-série d’animation Over The Garden Wall (Aventure dans la Forêt des Secrets, en français).
La première, grande œuvre musicale de J.S. Bach à l’origine composée pour clavecin :
La seconde, les péripéties animées de Greg et Wirt, demi-frères perdus dans une forêt enchantée (“Forêt de l’Inconnu”).
Dans cette dernière, immanquablement inspirée de la musique de Bach, on trouve 10 épisode. Dans la première, ce sont 30 variations. Autant de paysages à explorer…
Forêt de l’Inconnu et pièce connue
Greg (protagoniste de OTGW) et Vikingur Olafsson : deux hommes qui bravent la complexité de leur milieu (l’un égaré dans une forêt malfaisante, l’autre chargé d’une partition rude et sophistiquée) avec beaucoup d’enthousiasme. Une apparence simple (sans fioritures, un jeu d’une grande rigueur et précision), presque innocente, qui fait paradoxe avec une force et un talent à toute épreuve.
Forêt de notes
L’épreuve en question ce soir : à défaut d’une malédiction à conjurer ou d’une bête maléfique à vaincre dans des sous-bois obscurs, c’est aux célèbres Variations Goldberg que s’attaque le virtuose islandais. Avec calme et douceur, il distord le temps et plonge rapidement le public dans un confortable univers onirique.
Si la légende raconte que les Variations Goldberg ont été écrites par Bach pour guérir les insomnies du comte Hermann von Keyserlingk, c’est en tous cas ici un pari réussi pour le pianiste qui parvient à bercer toute une salle pourtant effervescente à l’idée de l’écouter. Trilles légères, airs de sarabandes, croisement de mains agiles, transitions planantes, boucle qui se boucle avec la reprise de l’aria initiale, c’est une véritable aventure que nous conte Olafsson avec passion à travers une partition qui peut sonner très littérale. Poignet solide et doigté ancré, la rigueur du jeu n’enlève rien à sa grande sensibilité et la sobriété du pianiste nous permet même d’oublier l’espace d’un instant la notoriété de l’oeuvre, pour ainsi se concentrer sur son essence, sa richesse, et tout ce qu’elle anime.
L’histoire avant d’aller au lit, celle qui file toujours trop vite, soldée par la standing ovation d’une salle remplie et comblée.