CONCERT COMMENTÉ – Jean-François Zygel et l’Orchestre National du Capitole de Toulouse dirigé par Samy Rachid proposent un concert complet et éclectique consacré à Beethoven. Ils mêlent symphonie, piano, improvisation, anecdotes et explications.
La science du Pr Zygel
Jean-François Zygel est une vraie encyclopédie vivante sur Beethoven. Sa passion communicative est renforcée par son élocution et son aisance à l’oral. Avant de commencer le concert, il tient à plonger l’auditoire dans l’ambiance du plus célèbre concert de Beethoven. Celui du 22 décembre 1808 à Vienne, où il créa ses cinquième et sixième symphonies et joua en public pour la dernière fois. Le concert s’adresse probablement avant tout aux novices, mais même les connaisseurs sont amenés à (re)découvrir des passages moins connus de la vie ou de l’œuvre du compositeur. Son intérêt précurseur pour les musiques populaires est notamment exposé. Il fut éveillé par les commandes de George Thomson qui lui demandait des arrangements pour piano de mélodies traditionnelles écossaises qu’il souhaitait immortaliser. Les plus célèbres mouvements de ses plus fameuses symphonies sont interprétés : le troisième de la symphonie héroïque qui marque l’innovation du Scherzo remplaçant le traditionnel menuet, l’andante de la septième symphonie récupéré près de deux siècles plus tard par Johnny Halliday, le quatrième mouvement de la symphonie pastorale dont on décompose préalablement l’orage, ou encore l’Hymne à la joie dont le public est invité à assurer les chœurs.
Des timbales au piano : bon point pour le chouchou !
Ces blockbusters sont ponctués par les improvisations au piano de Jean-François Zygel qui suivent immédiatement le mouvement donné et reprennent le plus souvent son thème principal. Des morceaux plus confidentiels sont également interprétés : la Marche en ut majeur, détournée de la musique militaire et jouée au piano à quatre mains avec Jean-Sébastien Borsarello que le public toulousain connait beaucoup mieux comme timbalier de l’orchestre.
L’orchestre en mode scolaire
Les improvisations de Zygel mettent dans une nouvelle perspective la musique de Beethoven. L’intention de son jeu reste dans l’esprit du mouvement symphonique qui précède. La fermeté et l’assurance de l’improvisation sur le premier mouvement souligne ainsi l’aspect fatal de la symphonie du destin et s’oppose à l’appui modéré et doucement prolongé des notes du deuxième mouvement. Le jeu sur les silences parvient à reproduire seulement avec le piano les dialogues de la huitième symphonie et la virtuosité s’affirme dans les modulations du mouvement lent du quatrième concerto. L’orchestre dirigé par Samy Rachid tente de s’en inspirer mais souvent avec moins de pertinence. Dans ce genre ed concert, on se repose un peu sur ses bases. C’est du Beethoven assez scolaire, et pour cause… !
Les volumes sont souvent un peu faibles, en particulier ceux des cordes, ce qui limite leurs effets. Les différentes sections peinent aussi par moment à s’individualiser. L’orchestre parait souvent bridé par le chef, peut-être trop directeur dans ce genre d’exercice. L’orage de la sixième symphonie manque notamment grandement d’explosivité comparé aux interprétations de références. À leur décharge et comme le souligne Jean-François Zygel, il faut souligner la difficulté pour les musiciens de s’immerger pleinement dans les partitions en jouant les mouvements de façon discontinue. D’autres passages sont cependant plus réussis en particulier l’Hymne à la joie ou le lumineux allegro con brio de la septième symphonie marqué par un tempo rapide et qui clôt le concert avec énergie. Le public applaudi chaudement avant que Jean-François Zygel ne revienne donner en rappel une improvisation espiègle sur la lettre à Elise, qu’il ponctue avec humour de quelques citations.
