FESTIVAL DE SALON – Depuis vingt-neuf ans, la musique de chambre résonne dans les plus beaux lieux de Salon-de-Provence (13). Cette année, le premier week-end du festival de Salon a largement consacré le roi du bandonéon, Astor Piazzolla, dont on fête le centenaire.
Quel est le secret d’une relation qui dure ? « L’envie », affirme Eric Le Sage. En 1993, le pianiste originaire de Lambesc (13) a crée avec ses amis, le clarinettiste Paul Meyer et le flûtiste Emmanuel Pahud, un festival de musique de chambre au château de l’Emperi, à Salon-de-Provence.
Vingt-neuf éditions plus tard, malgré la consécration de leurs carrières respectives et leurs emplois du temps chargés, la musique continue chaque été de régner sur la plaine de la Crau et les lieux sacrés de la cité (l’église Saint-Michel, l’abbaye de Sainte-Croix et le temple protestant), qui offrent une acoustique claire et lumineuse.
Arriver à Salon-de-Provence avec son sac de voyage et ses notes, c’est un peu débarquer en vacances. Ambiance détente, public enthousiaste, looks décontractés… Mais surtout, ne pas se fier à la vue de quelques concerts de piano donnés en short avant de filer déjeuner, les solistes à l’esprit exigeant viennent des quatre coins du monde.
Quelques 25 concerts sont programmés jusqu’au 7 août. Parmi les têtes d’affiches de cette année : les pianistes Gustavo Beytelmann et Frank Braley, le quatuor Ellipsos, le trio Karénine et le quatuor Mona, mais encore les violonistes Gordan Nikolic, Daishin Kashimoto et Oscar Bohorquez,
Soirée quatre saisons
« Salon, c’est l’auberge espagnole », plaisante Eric Le Sage. Etalé sur huit jours, le festival peut en effet se targuer d’une programmation délicieuse et unique dans le genre de la musique de chambre. Se côtoient joyeusement durant la fête Mozart, Johann Sebastian Bach, Debussy et Nino Rota.
Samedi 31 juillet et dimanche 1er août, le château de l’Empéri a vibré au rythme des compositions d’Astor Piazzolla, figure tutélaire de ce premier week-end.
Avant cela, la soirée s’est ouverte avec le sensationnel Quintette pour piano, deux violons, alto et violoncelle en fa mineur FWV 7 de César Franck. Composé en 1879 et dédié à Camille Saint-Saëns, dont on célèbre cette année le centenaire de la disparition, il est le premier grand quintette du répertoire français.
Le violoniste franco-serve Gordan Nikolić (premier violon solo du London Symphony Orchestra pendant près de vingt ans), et le quatuor Ellipsos ont joué Las Cuatro Estaciones Portenas, quatre compositions de tango de Piazzolla, pièce maitresse du bandonéoniste qui raconte les quatre saisons d’un habitant de Buenos Aires, et plonge dans ses racines.
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Bravant la pluie et la tramontane, Le Patagonia Express Trio (Gustavo Beytelmann, Oscar Bohorquez, Claudio Bohorquez), qui lui a consacré un album sorti en janvier chez Berlin Classics, a clôturé la soirée avec ses chansons les plus connues, comme Milonga en Ré, Revolucionario et, évidemment, l’incontournable Libertango.
Contre-exemple
Le festival de Salon est un bon contre-exemple de tous ceux qui ont une image connotée de la musique de chambre, et l’imagine jouée en perruques dans des boudoirs versaillais. « Quand j’étudiais au conservatoire d’Aix-en-Provence, je ne savais pas ce qu’était la musique de chambre, abonde Eric Le Sage. Alors qu’en musique, cela veut tout simplement dire ce qui n’est pas symphonique ou de l’opéra. »
Avis aux curieux, friands de surprises et aux moyens budgets – le festival de Salon est moins onéreux que beaucoup d’autres événements de musique classique – à qui il ne reste que quelques jours pour profiter de cette 29e édition.
Forcément, on pense déjà aux trente ans du festival de Salon qu’on imagine exceptionnels. Qu’en dit Eric Le Sage ? Alors, trente ans ou pas trente ans ? « Chaque année, on se dit que c’est la dernière, rigole-t-il. Donc cette année, c’est la dernière. » Vivre de surprises, c’est sans doute ça le secret d’une histoire qui dure.