CONCERT – Le Festival d’Ambronay propose à son public de découvrir les jeunes ensembles d’Europe, à travers le projet eemerging+ et son propre pôle d’insertion professionnelle en partenariat avec le CNSMD de Lyon. L’occasion d’entendre aujourd’hui deux ensembles de jeunes musiciens : The Wig Society et Apotropaïk.
Un programme qui défrise !
Le concert du dimanche matin de ce deuxième week-end du Festival d’Ambronay met à l’honneur deux trios de jeunes talents. Le premier, The Wig Society*, propose ce matin son petit concert de sortie de résidence au Centre culturel de rencontre d’Ambronay avec un programme axé autour de trois compositeurs viennois héritiers du style de Haydn : Federigo Fiorillo, Carl Philipp Stamitz et Franz Christoph Neubaur. Beaucoup des œuvres de ce répertoire sont écrites pour créer une ambiance et inviter à habiller un moment de sociabilisation. L’écoute quasi sacrée d’un auditoire bien sage est absolument anachronique et ne rend ainsi pas tout à fait justice à ces pièces. Le traversiste Matteo Gemolo parvient à proposer une interprétation agile et assez fluide, bien qu’il semble encore très attaché à sa partition. On regrette que les deux instruments à cordes ne lui laissent pas toujours suffisamment d’espace sonore.
*La Société des Perruques
C’est passé à un cheveu…
Au-delà de ce déséquilibre, la justesse et la souplesse du violoniste Conor Gricmanis font cruellement défaut, ne permettant pas de réellement apprécier l’ensemble du programme. Ses propositions ne répondent que très rarement à celles du flûtiste, notamment dans l’Allegro fugato de la Sonate n°6 de Stamitz, qui est pourtant une œuvre d’un certain intérêt justement par son écriture équilibrée des trois parties et le charme de ses mélodies. Sans contrastes de nuances, ni de souffle commun et encore moins de complicité dans les équilibres, l’ensemble ne rend pas justice à cette œuvre méconnue de celui que l’on considère comme l’un des plus actifs contributeurs du style galant. Le timbre de l’alto de Blanca Prieto possède cette sonorité chaude qui apporte un beau liant au son de l’ensemble, bien que l’on aurait pu souhaiter un tout petit peu moins de précipitation dans certains passages d’accompagnement.
Moyen-âge moderne
Le deuxième ensemble de la matinée est Apotropaïk dont le souhait est de détourner les a priori sur la musique médiévale. Le programme ainsi concocté raconte le mythe chevaleresque de Tristan et Iseut à travers des lais, de petits poèmes narratifs médiévaux, espacés de madrigaux comme respirations et commentaires instrumentaux. Par sa structure autour d’une histoire avec étapes, ce mini-concert se montre particulièrement équilibré et offre l’opportunité de découvrir, non seulement un répertoire médiéval effectivement mal connu, de véritables jeunes talents.
Clémence Nicolas, au chant et à la flûte à bec, émerveille, non seulement par son timbre tendre et nuancé, par l’expressivité sensible qu’elle soutient par un regard affirmé et communicatif. Elle se montre douce comme elle peut être féroce, comme dans le Lai 8 « du Voir disant », extrait du manuscrit de Vienne. Sa collègue Louise Bouedo à la vièle à archet se montre douce et charmante. Le timbre de son instrument, légèrement nasillard, se fait touchant par le grain caractéristique de ses cordes. Le luthiste Clément Stagnol est un accompagnateur attentif, présent et constant. Chaleureusement remercié par le public, le trio offre en bis le Rotta du manuscrit de Londres, danse entrainante que les musiciens, la jouant par cœur, partagent avec une complicité contagieuse.