DISQUE – Le label Warner Classics / Erato édite un coffret intégrale des enregistrements stéréo du chef d’orchestre britannique Sir Thomas Beecham (1879-1961), l’un des grands animateurs de la vie musicale du XXᵉ siècle, fondateur du Royal Philharmonic Orchestra et défenseur passionné de Delius, Haydn, Mozart ou Berlioz.
Regroupée aujourd’hui en 35 CDs, il aura fallu seulement quatre ans à Thomas Beecham pour enregistrer une discographie stéréo aussi impressionnante. Elle s’étend entre le développement de cette technologie en 1955 et les dernières sessions du chef en 1959, deux ans avant sa mort. Avant ça, Thomas Beecham était déjà un vieux routier de l’industrie musicale, et avait commencé à enregistrer quasiment dès l’apparition du disque. Il se plaignait à ces débuts que « les progrès en matière d’enregistrement sont si lents qu’il nous faudra attendre encore cinq mille ans avant d’avoir un résultat satisfaisant ». L’histoire lui a donné tort. Quelques décennies à peine ont finalement suffi.
Radio Nostalgie
Évacuant les voix qui grésillent et les orchestres saturés, l’éditeur a fait le choix de se concentrer sur la stéréo. Et il y a de quoi faire ! Les très nombreux titres montrent sur ces quatre années seulement, l’éclectisme du répertoire du chef britannique. Il s’intéressait à toutes les époques, du baroque à ses contemporains, et à toutes les origines. La musique française occupe d’ailleurs une place non négligeable dans le coffret (Bizet, Fauré, Delibes, Lalo, Franck et Berlioz). En plus du Royal Philharmonic Orchestra qu’il avait lui-même fondé, l’Orchestre National de la Radiodiffusion Française est aussi assez curieusement le seul orchestre avec lequel Thomas Beecham a enregistré sur cette période.
Si la technologie est moderne, l’inspiration est, elle, hors du temps. Elle apparait cependant paradoxalement lointaine. Le format compact disc actuel dans ce coffret n’y fait rien : écouter du Beecham donne toujours une bouffée de nostalgie, comme l’odeur attendrissante d’un vieux livre de la Pléiade réouvert après avoir pris la poussière sur l’étagère. Les enregistrements de Sir Thomas Beecham sont ainsi un peu à la musique « savante » ce que Radio Nostalgie est à la variété : du bon vieux son de l’époque qui, sous son air un peu démodé procure souvent plus d’enthousiasme que la dernière tendance en vogue…!
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Pourquoi on aime ?
- Pour le contraste saisissant entre la modernité de la prise de son et le coté vintage de l’interprétation (sur les œuvres baroques en particulier, mais pas seulement).
- Pour la richesse d’un chef arrivé à maturité, qui communique à l’orchestre son expérience des œuvres et de la vie. Il instille ainsi à l’interprétation une certaine placidité qui fait d’autant mieux ressortir sa cohérence et sa spontanéité.
- Pour les références discographiques incontournables : la mythique Carmen avec Victoria de los Ángeles, Nicolai Gedda, Jeanine Micheau et Ernest Blanc, les symphonies londoniennes de Haydn et la Symphonie fantastique de Berlioz avec le Royal Philharmonic Orchestra.
- Pour les raretés de Delius, dont Beecham encore aujourd’hui l’un des très rares défenseurs (en particulier les Songs of Sunset chantées par Maureen Forrester, John Cameron et la Beecham Choral Society).
C’est pour qui ?
- Pour les personnes qui cherchent à explorer un large répertoire en un seul coffret allant du Solomon de Haendel à la Schéhérazade de Rimski-Korsakov en passant par la 7ème de Beethoven ou l’Enlèvement au Sérail de Mozart.
- Pour les jeunes qui ne connaitraient pas cette période discographique cruciale et si fertile des années 1950.
- Pour les nostalgiques du baroque sur grand orchestre symphonique, si jamais il y en avait…
- Pour toute personne amatrice d’un chant lyrique qui privilégie la diction et le phrasé sur l’opulence des vocalises.
- Pour les personnes qui pensent au fond d’elles que « c’était mieux avant ! »
