CONCERT – L’Orchestre National du Capitole de Toulouse dirigé par Christophe Mangou présente à la Halle aux Grains le conte musical L’Île Indigo, créé en 2017 dans ce même lieu, composé par Julien Le Hérissier et écrit, conté et mis en espace par Julie Martigny.
On est dimanche matin. Allez hop ! On enfile ses yeux d’enfants et on se rend à la Halle aux grains pour voir l’Île Indigo. Le public, totalement méconnaissable, a visiblement un peu trop abusé du philtre de rétrécissement d’Alice au Pays des merveilles et est passé dans les mains d’un chirurgien esthétique tout aussi merveilleux car les ridules et la calvitie ont en grande partie laissé place aux bonnes joues rosées et aux têtes blondes.
Les enfants…au boulot !
La présentation du spectacle commence… Il va falloir participer ! On nous montre que, comme dans tout bon épisode de Dora l’exploratrice, il va falloir taper dans ses mains, chanter, imiter des moqueries, etc. à des moments précis de l’action pour faire avancer l’histoire. Ça prend un peu de temps, une bonne vingtaine de minutes tout de même. Mince je n’ai pas fait mes devoirs ! Il fallait aussi apporter un dessin monochromatique pour faire apparaitre les différents tons de l’île indigo à la fin de la pièce !
Les grands pris au jeu
Les musiciens arrivent, ainsi que la conteuse Julie, qui va nous raconter l’aventure. Elle commence au fond de la scène. Le père de la pauvre Lola est pris d’une étrange somnolence. L’enfant a de plus, perdu toutes ses consonnes sauf le T. Au début de la pièce, la musique et la conteuse se marchent un peu sur les pieds. Il est difficile de se concentrer sur les deux en même temps, mais ça va déjà beaucoup mieux à la fin de l’introduction. L’infatigable Julie, assistée seulement de quelques accessoires et artifices de mise en espace et dont l’énergie semble inépuisable, nous tient en alerte tout au long du conte ! Les enfants mais aussi les adultes jouent le jeu, et sûrement même avec encore plus de conviction que ce dont on pouvait attendre de ces derniers. De ses mains, de ses pieds et de sa voix, on fait apparaitre : le vent, la pluie, la chanson des marins… On est pris de tout un tas d’émotions successives : la joie, l’inquiétude, la détermination. On se surprend même à être tenu en haleine dans un réel suspense quand Lola et ses amis tentent de fuir le bateau pirate. L’émotion qui revient le plus est cependant indéniablement l’émerveillement, accentué à des moments clefs, par la musique de Julien Le Hérissier. Le magnifique arc en ciel lumineux de Tristan Mouget se colore en effet des gammes de harpe, des accords de bois, de cordes et de cuivres ainsi que des tintements du métallophone. Cette synergie entre les lumières et la musique est retrouvée à de nombreux moments : dans les ambiances bleu sombre de la nuit et de ses angoisses au début et à la fin de la deuxième partie par exemple.
L’Orchestre National du Capitole dirigé par Christophe Mangou, en effectif relativement modéré d’une quarantaine de musiciens est en excellente forme. Il se colle à l’histoire, marque les nombreux contrastes, les dissonances et les élans plus romantiques avec unité et incarnation. Le mouvement de concerto pour violon que comporte la partition, interprété avec virtuosité par Fuki Fujié (le père de Lola dans le récit) est également particulièrement remarqué.
Les enfants sont implacables, s’ils s’ennuient, ils s’agitent ! L’absence totale de dissipation durant tout le concert est ainsi, en plus des applaudissements nourris, la meilleure preuve de son succès. Il a ainsi le bénéfice de contribuer à leur éducation musicale. Toutes les bonnes choses ayant une fin, il est malheureusement temps de revenir à la réalité. Lola se réveille de la cale de bateau à quai où elle s’était endormie… Tout cela n’était donc qu’un rêve ? Pas sûr… Le charme est bien rompu et le papillon indigo du voyage se pose juste là !