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Chilly Gonzales, avec la langue… de Molière !

CONCERT- Le centre culturel Flagey invite les bruxellois à la découverte du dernier album de Chilly Gonzales, « French Kiss ». Présenté devant une salle comble, le musicien canadien aux allures de Big Lebowski débarque sur scène pour un voyage intime, pantoufle et peignoir à l’appuis. 

Le recordman a l’habitude de voir grand. S’il avait en 2009 tenu la performance de 27 heures 03 minutes et 44 secondes de piano non-stop, ici la performance de Flagey n’est plus une question de durée mais plutôt d’intensité pour le showman, qui mise sur la séduction. Série de collaboration avec des artistes français comme Bonnie Banane, Teki Latex, Arielle Domsbale ou Richard Clayderman (à qui il dédiera sa clôture de concert), la fusion des genres est au cœur du style. Décliné entre nostalgie romantique, spleen à la française et nécessaire autodérision, le compositeur (installé sur l’île St-Louis) déclare son amour à la capitale.

French Kiss (Pias,2023) / Illustration de Fabcaro

En couverture d’album, Chilly Gonzales se détend après l’amour, cigarette tenue en l’air, regardant tendrement sa compagne la baguette traduction à demi-nue sous les draps. En arrière plan, Notre-Dame brûle, mais Chili s’en moque. Il a l’amour.  

« Je vous french kiss, avec la langue française. Je vous french kiss, en chantant la Marseillaise »

   

Chilly Gonzales, French kiss
Ché-bran pas chelou

Ouvrant le concert sur ses morceaux classiques aux mélodies simples, Chilly Gonzales accroche son public avec les morceaux de piano Overnight, Dot, The Tourist, issus de l’album Solo Piano(2004) et Minor Fantasy du Solo Piano II (2012). Retour nostalgique dans le passé, les bruxellois retrouvent les morceaux intemporels de Gonzo, qui se produit régulièrement à la capitale belge. Désarmant de confiance, l’artiste n’hésite pas à se confier sur ses moments de solitude, les angoisses de l’avant et des Noël ponctués de musique supra commerciales. 

Chilly Gonzales – Il Pleut Sur Notre-Dame (feat. Bonnie Banane)

Proposant une relecture des chants traditionnels de Noël (originellement en majeur), Gonzales sert ici les touches en spleen d’un homme qui n’aime pas Noël, préférant une lecture d’un Holly Night en mineur. Jingle Bells en depression, Chilly Gonzales donne tout pour le dernier concert de l’année, après une sacrée tournée. 

Débutant la présentation de son album sur un « sample » du Clair de Lune de Debussy, la voix du chanteur se pose naturellement en slam/rap, rappelant le rythme nostalgique d’Oxmo Puccino, la fermeté prosodique de TTC et d’Oreslan. Maitrise du verlan et du jeu de mot typique français, Chilly Gonzo a la prose verbale dans le sang. S’il se considère maintenant Céfran (« français » en verlan), les paroles verrouillées sur le clavier, l’artiste rassemble. Humour pour tout âge, le pianiste s’adresse au musicologue en chacun, à l’amateur de classique, de rap, au jazzman, à celui qui danse en boite techno, au noctambule ou au casanier. 

Céfran de che-sou

« French Kiss est le premier morceau que j’ai écrit en français tout seul, et donc, dans ce morceau j’ai voulu m’exprimer avec «ma» langue française. C’est-à-dire : en donnant ma vision de la culture, de la littérature et de la musique hexagonale. C’est ma lettre d’amour à la France, sans clichés ni éloges gratuits ». 

Aidé d’un clip radical, Chilly Gonzales s’est aidé de la technologie du DeepFake afin d’apposer son visage bien reconnaissable sur les personnalités qui font le paysage français. Le président Macron, Éric Zemmour, Marine Le Pen, Benjamin Biolay, Bernard Henry-Lévy, le rappeur Makala ou Molière … le tout est de s’amuser avec un habile processus de « gonzification » ou « gonzalification ». 

Fait notoire, l’entrée de Chilly Gonzales s’est officiellement faite dans la culture française lors de La coupe du monde de Football, son morceau Smothered Mate  ayant été choisi comme  bande originale de la victoire de l’équipe de France. 

Solo, bien accompagné

Gonflé à bloc, l’entertainer reste fidèle à son langage excentrique dans la lignée de ses collaborations (alerte name dropping) : Boys Noize, Philippe Katerine, Jane Birkin et Daft Punk, Peaches, Drake…On regrettera évidemment de ne pas voir Bonnie Banane, Arielle Domsbale ni Richard Clayderman sur scène. Evidemment, s’entourer sur un album de superstars rend la tournée plus solitaire, mais sachant bien s’entourer, le pianiste s’accompagne sur scène de jeunes talents. Yannick Hiwat au violon & clavier Synthé brille par une maitrise des cordes et touches sans difficulté apparente. 

Stella Le Page tient le violoncelle pour Gonzales depuis longtemps maintenant. Symbiotique, Stella Le Page marque les rythmes de soutien en compagnie de Joe Flory à la  batterie. Voix légèrement voilée, Norma chante au naturel. Charmeuse, la jeunesse prime sur la voix savante. Jazzman total,  Taylor Savvy joue la contrebasse debout. Gonzales se présente en famille, complicité et décontraction à la clé. 

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Entre sketch, cours de musique et soirée entre amis, le concert de Chilly se termine en ovation. Le public danse en tête-à-tête avec Gonzo qui profite d’un bain de foule total. Tapant dans les mains du public comme un athlète (serviette sur les épaules, charentaise au pied, peignoir sur le dos) des plus jeunes au plus vieux, l’amorce du week-end s’annonce festive, à la mesure de la vie d’un artiste qui préfèrera toujours l’humour à l’ennui.

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