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Florian Sempey, la construction d’une voix

PORTRAIT – Très jeune et pourtant déjà promis à une belle carrière ! Nous avons rencontré le jeune baryton lors de ses premiers pas d’interprète de « Carmina Burana » à Bordeaux, en attendant l’opéra Bastille à Paris en janvier 2012.

Il ne se perd pas dans le dédale de couloirs du Grand-Théâtre de Bordeaux. Florian Sempey, jeune baryton de 23 ans, a non seulement assuré plusieurs rôles dans cette institution mais il y était ouvreur du temps de ses études. « J’avais dit à ma mère, je veux être dans le Grand-Théâtre, quitte à nettoyer les fauteuils ou faire le parquet. Aujourd’hui, quand je dis cela, ca fait bien rire les dirigeants de cette maison ! »
Des dirigeants qui ont très vite repéré le talent du jeune homme et lui ont fait confiance : « j’avais immédiatement identifié son timbre magnifique lors du Concours de fin d’année du Conservatoire de Bordeaux, explique Isabelle Masset directrice adjointe de l’Opéra, en charge du recrutement des voix. Florian a un instinct du chant, une manière innée d’aborder la musique. » Dire que cette orientation s’est jouée à un fil !
Pour ses études, Florian a en effet hésité entre musicologie et égyptologie. « L’Egypte est ma passion et je n’osais rêver d’une carrière de chanteur. Je ne me sentais pas légitime. Je pensais que d’autres méritaient cette place plus que moi. Et puis, mon professeur de chant au Conservatoire de Libourne, Françoise Detchnenique, m’a persuadé que je pourrais faire quelque chose de ma voix. J’ai renoncé à la fac d’histoire… » Direction Bordeaux où il intègre en 2007 le Conservatoire à rayonnement régional (CRR) et où quelques bonnes fées l’attendent.

« Nous avons agi en concertation, explique Isabelle Marret, avec Maryse Castets son professeur au Conservatoire et la direction du CRR. L’Opéra lui offrait de chanter Papageno dans La Flûte enchantée de Mozart pour trois représentations sur dix. Le CRR le préparait au rôle : c’était pour Florian une insertion privilégiée ». De l’intérieur, ce n’était pas si aisé : « Papageno, c’était le tout pour le tout, se souvient le baryton. Le baptême du feu ». Les critiques sont de son côté et saluent la maturité de sa voix et son aisance sur scène. « J’étais dans le trop. Je chantais comme pour dire « regardez, j’adore mon métier ! » Je sais à présent que chanter est servir avant tout une partition qui a été écrite bien avant moi et qui sera jouée bien après ! La musique vient en premier, et seulement après on peut montrer son cœur et son âme en chantant. »

Depuis il est revenu souvent dans le magnifique bâtiment du Grand-Théâtre : en récital pour un « Midi musical », pour le rôle de Morales dans « Carmen » de Bizet en 2010, et en septembre dernier en Yamadori dans la reprise de « Madame Butterfly » de Puccini. Un début de carrière prometteur complété par une formation d’excellence : depuis septembre 2010, Florian a intégré l’Atelier Lyrique de l’Opéra National de Paris, la plus prestigieuse école pour les chanteurs, dont la sélection drastique ne permet l’intégration que d’une poignée d’élus.

Cette institution lui a déjà permis de monter sur les planches de l’opéra de Paris pour un récital, un grand moment pour le jeune Créonnais : « les plus grands noms du chant sont venus ici. J’avais la même loge que Rénata Tébaldi ou Maria Callas, la voix qui m’a fait découvrir l’opéra quand j’étais petit. J’écoutais jour et nuit le disque de Carmen que ma mère m’avait fait découvrir. J’imitais La Callas avec ma voix de petit garçon… ». Si Florian Sempey a invoqué, ce jour de février 2011, cette grande figure, il a aussi pensé à une autre femme importante dans son parcours : sa grand-mère maternelle. « D’origine italienne, elle possédait un buste du compositeur italien Rossini dans sa maison et elle adorait son opéra « Le Barbier de Séville ».

Le rôle titre, Figaro, est devenu mon obsession d’étudiant-chanteur, je le connaissais par cœur. Je me disais qu’après l’avoir chanté, je pourrais prendre ma retraite ! Je l’ai interprété ce jour là à l’Opéra de Paris, quelques jours après avoir appris la mort de ma grand-mère… Dans ces moments-là, on prend sur soi et on oublie l’égo. On chante, tout simplement. » Une modestie qui se marie joliment avec sa belle prestance de chanteur, une écharpe bleu turquoise sur ses épaules devant le piano de Martine Marcuz, chef de chant de l’opéra de Bordeaux, qui lui fait répéter son rôle pour Carmina Burana. Il l’interprète en octobre avec l’orchestre et le ballet de l’Opéra de Bordeaux. Il travaille cette partition redoutable avec passion, détermination et assiduité. « Je me suis fixé un but : avoir une carrière qui dure longtemps. Pour cela, je dois faire attention à ne pas brûler les étapes ».

Article paru en octobre 2011.

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