AccueilSpectaclesComptes-rendus de spectacles - LyriqueAdrienne Lecouvreur : toiture nickel, manquent quelques tuiles

Adrienne Lecouvreur : toiture nickel, manquent quelques tuiles

OPÉRA – L’Opéra Bastille offre à l’Adrienne Lecouvreur d’Anna Netrebko une production certes classique mais soignée de l’ouvrage de Francesco Cilea, conçue à l’origine autour de la flamboyante Angela Gheorghiu. L’aura de la première impose sans peine un portrait complet de la célèbre tragédienne.

L’abyme abimé

La production de David McVicar créée 2010 au Covent Garden tape en plein dans le classique : la scène de la Comédie Française s’inscrit en abyme sur la vaste scène de l’Opéra Bastille. Le temps n’a pas épargné le décor abondant : il est un peu moins brillant qu’à l’époque, un peu terne même. Mais le soin apporté aux déplacements des interprètes, des seconds rôles ou des chœurs, produit encore son effet et apparaît toujours convaincant. Le troisième acte, lors de la réception dans le Palais du Prince de Bouillon, conserve toute sa puissance évocatrice avec l’affrontement spectaculaire d’Adrienne et de la Princesse de Bouillon, toutes deux éprises et amantes du séduisant Maurice de Saxe.

© Sébastien Mathé

 

Netrebko : c’est béton !

Anna Netrebko aborde le rôle d’Adrienne Lecouvreur avec toute l’opulence de ses moyens, la séduction du timbre et cet art affirmé de la demi-teinte. Au premier acte pour autant, la ligne vocale est un peu en dehors. On dirait qu’elle s’écoute un peu, avec un vibrato un rien excessif… Puis d’acte en acte, la voix se dégage pour mieux s’affermir et rayonner de façon plus naturelle, plus libre de toute contrainte. Le quatrième acte montre le personnage dans toute sa féminité, son humanité, ses faiblesses. Alors, Anna Netrebko bouleverse complètement, et l’air le plus beau de l’ouvrage (Poveri Fiori), parfaitement conduit et détaillé, envahi le cœur et l’esprit du spectateur. 

© Sébastien Mathé
Yusif Eyvazov : la tuile…

Son mari à la ville, le ténor Yusif Eyvazov, dresse un portait bien moins charismatique de Maurice de Saxe. Oui, la voix a toute la puissance requise pour le rôle avec un aigu facile donné à gorge déployée, mais le timbre manque véritablement de séduction et l’approche du style est assez scolaire. Pourtant, il sait nuancer son chant quand il le veut et lui donner un tout autre relief, notamment lors de son air du deuxième acte face à la Princesse, l’anima ho stanca

Le ciment des seconds rôles

Sans parvenir à faire oublier l’interprétation incandescente de la Princesse de Bouillon de Clémentine Margaine récemment au Théâtre des Champs-Elysées, Ekaterina Semenchuk donne un grand relief à ce personnage somme toute négatif. Si le registre aigu a perdu un rien en assurance, la largeur de la voix aux accents typiquement slaves n’a rien perdu. La présence scénique de la mezzo-soprano s’impose par son maintien et sa force. 

© Sébastien Mathé

Ambrogio Maestri force plus que le respect dans le rôle de Michonnet, auquel il confère sensibilité, amour et humanité. Sa voix de baryton se repose sur un legato affirmé et un sens inné du travail le plus abouti. 

Les autres interprètes de la production sont à saluer sans réserve, depuis la basse sonore de Sava Vemic, le ténor fourbe et presque obséquieux de Leonardo Cortellazzi et les Mademoiselles Jouvenot et Dangeville incarnées avec brio par Ilanah Lobel-Torres et Marine Chagnon. Présent la saison dernière pour La Force du Destin, le chef Jader Gignamini dirige l’Orchestre de l’Opéra avec ferveur, précision sans jamais forcer le trait et avec un parfaite attention accordée aux changements de rythme et d’atmosphères. La netteté des attaques est à souligner. 

À lire également : Madame E. à Madame Netrebko

Si Anna Netrebko a légitiment recueilli la plus grande masse des applaudissements, le public a fêté avec chaleur les prestations d’Ambrogio Maestri et Ekaterina Schemenchuk, celle de Yusif Eyvazov étant plus partagée.  

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