PATRIMOINES – Au début du mois d’août, nous nous rendions à l’un des « Dimanches à Royaumont ». Une journée exceptionnelle à bien des égards, occasion de (re)découvrir cette institution prestigieuse.
De l’abbaye royale au Centre culturel de rencontre
La découverte de l’abbaye est d’abord une expérience sensorielle, et ceux qui connaissent le domaine ne nous contrediront certainement pas : impossible de ne pas être frappé par la sérénité des lieux. Au-delà du calme, on peut encore évoquer l’impression sidérante produite par ce vestige d’une tourelle isolée, ainsi que par la majesté du bâtiment central. Toute âme sensible à l’esprit si romantique et particulier des ruines sera aisément émue. L’aménagement des salles de réception, de déjeuner ou de travail ne trahit en rien l’esprit de cet endroit incroyable, et l’intérieur de l’abbaye allie sans contradiction le sens de l’hospitalité et le respect de l’atmosphère des lieux.
Le site en lui-même est en réalité le fruit d’une histoire en plusieurs étapes. D’abord, il y a la fondation de l’abbaye en 1228 par Louis IX. Viennent ensuite d’autres fonctions, de monastère cistercien à résidence de campagne, en passant notamment par l’hôpital de guerre. En plus de l’activité actuelle d’hôtellerie et de restauration (nous confirmons la qualité de la seconde pour l’avoir testée et nos collègues d’Ôlyrix attestent de la quiétude de la première !), la Fondation Royaumont (créée elle en 1964) propose une offre culturelle riche, structurée autour de trois pôles : « Voix et répertoire », « Création musicale » et « Création chorégraphique ».
Retrouvez également sur Ôlyrix de nombreux comptes-rendus de Royaumont
Cet espace unique fut un précurseur du concept de Centre culturel de rencontre, aujourd’hui devenu label d’État. Son engagement ? Continuer à faire du lieu un carrefour des savoirs et des pratiques, propice à la transmission d’un patrimoine (rappelons que la bibliothèque de l’abbaye est particulièrement dotée et appréciée des chercheurs). S’y croisent donc aussi bien des musiciens internationaux en formation, des professionnels en séminaire, que des amis de la Fondation, œuvrant à la transmission de la mémoire du lieu ou des visiteurs curieux venus pour les « Dimanches à Royaumont ». Nous avons ainsi pu profiter d’une projection-performance sur l’histoire de l’Abbaye pendant la Première Guerre mondiale, et reviendrons certainement dans le cadre du Festival, qui commencera cette année le 9 septembre et s’achèvera le 8 octobre.
En immersion
La raison exacte de notre présence, c’était la clôture d’une masterclasse de la 6e édition de l’Académie Orsay-Royaumont. Nous avons eu l’occasion de voir les quatre duos de la promotion 2023/2024 s’échauffer pour le concert du soir – concerts que l’Abbaye a coutume d’appeler « Fenêtre sur cour[s] » – et qui permettait ici de présenter au public les fruits d’une semaine de résidence artistique entre les murs de l’Abbaye. Les bienfaits de ce programme mené en collaboration avec le Musée d’Orsay sont multiples. Les lauréats, après avoir été sélectionnés par le jury, bénéficient d’un enseignement d’excellence, qui conjugue musique et arts visuels, mais aussi d’un accompagnement professionnel, avec des auditions de recrutement ciblées à la clé, la production d’un disque au label B Records, et l’organisation d’une tournée de concerts. Derrière ce dispositif, le pôle « Voix et répertoire » de Royaumont, qui tient à valoriser depuis plusieurs années déjà le Lied allemand et la mélodie française.
Nous avons eu de bonnes impressions en entrant dans la bibliothèque de l’Abbaye pour y suivre une heure de cours. L’acoustique de la salle est excellente, l’atmosphère chaleureuse malgré la majesté des lieux. On devine aisément que maîtres et élèves trouvent plaisir à s’écouter mutuellement pendant leur résidence, et progressent au rythme de séances bienveillantes et efficaces. La dynamique des sessions de travail est intéressante : les deux maîtres font chacun des propositions d’amélioration, tantôt au pianiste, tantôt au chanteur. Les binômes sont en effet appréhendés comme une totalité, ce qui permet aux apprenants de progresser en synergie pour un résultat à apprécier dans la seconde partie de cet article, consacré à notre compte-rendu du concert de ces quatre duos.
Poursuivons avec la seconde partie de cet article – Une abbaye et des Lieder : Royaumont façon romantique