CONCERT – L’Orchestre National du Capitole de Toulouse dirigé par Joseph Swensen donne, à la Halle aux grains, Laniakea de Camille Pépin, la Symphonie n° 6 dite Pathétique de Tchaïkovski et le Double Concerto pour violon et violoncelle de Brahms. Le concert rassemble la famille de l’orchestre et celle du chef. Le violon soliste est en effet attribué à Kristi Gjezi, premier violon super-soliste résident de l’orchestre, et le violoncelle à Jonathan Swensen, fils du chef.
La collaboration entre Joseph Swensen et l’Orchestre National du Capitole de Toulouse est déjà ancienne et régulière. Cela fait un bon nombre d’années qu’il est invité à hauteur d’un concert par saison en moyenne (l’an dernier pour L’Odysée du Ring notamment). Il fait donc presque un peu déjà partie de la famille, même s’il a signé chez les éternels rivaux de la ville rose, à la tête de l’Orchestre National Bordeaux Aquitaine.
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Astronomie et musique : l’harmonie des sphères
Le programme aborde trois grandes fresques orchestrales, forme dans laquelle le chef semble se sentir particulièrement à l’aise : Laniakea, œuvre la moins connue du programme, est une pièce symphonique de la compositrice française Camille Pépin. Son nom est celui d’un supercontinent de galaxies, découvert en 2014 par la chercheuse Hélène Courtois et son équipe. Cette composition, tout à fait accessible, s’inscrit dans le renouveau de la musique contemporaine. Certains de ses mouvements tendent à revenir vers des formes étoffées et à recouvrer les notions historiques d’harmonie et de mélodie. Laniakea s’inscrit dans l’historique des musiques à thématiques spatiales avec des références allant de Gustav Holst (Les Planètes) à John Williams (Star Wars). L’ensemble est structuré en séquences sur une forme circulaire revenant au point initial, rappelant l’éternel renouveau de notre espace, où la destruction de systèmes laisse place à la création de nouveaux. Gageons que l’avenir continuera de sourire à cette jeune compositrice déjà reconnue, en concert… ou pourquoi pas au cinéma !
L’orchestre du Capitole, puissant et coordonné dès le départ, rend toute la complexité des sons et sublime la pertinence des harmonies. Il se montre habile dans le dessin des fonds musicaux plus ou moins fluctuants selon l’ambiance du moment, sur lequel viennent se greffer des étoiles de percussions ou des couleurs nébuleuses de vents.
Les Swensen et Toulouse : la vie en rose
Il prend également toute sa majesté dans le double concerto de Brahms où il se détache, parfois avec une certaine humilité, des solistes. Ces derniers ont un jeu fusionnel et maintiennent leur dynamique et leur équilibre interne, aucun n’effaçant jamais l’autre. Ils exploitent avec poésie le vibrato de leurs instruments. Joseph Swensen, qui dirige l’orchestre avec une certaine rondeur, trouve des moments subtils où il baisse le volume avec les solistes pour renforcer l’attention sur l’instant, dans le premier mouvement par exemple. Il apparait très ému à la fin du concerto et embrasse affectueusement son fils et même Kristi Gjezi. Dans la Symphonie Pathétique de Tchaïkovski, sentimentale et mélancolique, les choix de volumes et la dynamique de l’interprétation marquent bien les contrastes issus selon toutes hypothèses des tiraillements introspectifs du compositeur qui filtrent au travers. L’orchestre réussi une nouvelle fois, dans les passages comprenant un nombre limité de pupitres, à créer une intimité avec le public. Cependant, des hésitations transparaissent dans certaines transitions, que la gestuelle du chef pourrait peut-être guider avec un peu plus de netteté. Certains effets ont également tendance à perdre de leur portée en se diluant, comme les appels de cuivres qui peinent à se détacher du fortissimo du premier mouvement.
Le public, venu nombreux pour la popularité du programme et par fidélité à Joseph Swensen, remplit la salle. Il se montre enthousiaste et applaudit vivement les artistes, notamment après le concerto (peut-être espérait-il un rappel ?) et la symphonie.