DANSE – Attention, alerte : un OVNI s’est posé à l’Opéra de Vichy ! Et, comme transcendées par les magiques pouvoirs du chant, de la danse et du cirque, de virevoltantes créatures sont soudain apparues sur scène, suscitant la curiosité d’un public aimanté par un tel spectacle. Bienvenue sur la planète Stéréo de Philippe Decouflé, où les arts sont multiples, où les arts sont la vie.
Mais qui sont donc ces fantasques êtres qui, d’un coup, vêtus de peaux de cuir et de pantalons léopard, sont venus prendre leurs aises sur la scène de l’Opéra de Vichy ? Visiblement, ce sont d’abord des gens qui aiment le rock, et le vrai. Comment, du rock, là, sous les dorures d’un bâtiment où tant de Violetta et de Tosca ont expiré ? Mais oui, du rock : celui, en l’espèce, soigneusement sélectionné par la compagnie DCA de Philippe Decouflé, un chorégraphe de renom décidément ouvert à tous les arts. La preuve avec ce spectacle Stéréo, dont on comprend bien vite le sens : annoncée comme chorégraphique, cette production est avant tout follement rythmique : il y a là du Queen of the Stone Age, du T- Rex (Get it on !), du Ramones et du rock’n roll à la pelle. Il y a là surtout des musiciens de talent, la chanteuses et bassiste Louise Découflé à la voix discrète mais exquise d’intonation, le batteur Romain Boutin, ou encore le guitariste Arthur Saàtan avec ses riffs démoniaques et sa voix habitée par l’esprit du rock. Des gens bizarres, ces sympathiques loubards ? Non, des musiciens de talent.
Et même une démonstration de twirling !
Et visiblement, pour cette troupe aux corps convulsifs, la musique ne va pas sans la danse. Stéréo, leur planète, c’est du son mais aussi des sauts, des acrobaties, des grands écarts et des lancers d’humains par dessus les têtes. Le tout au rythme du rock, qu’il soit hard, punk ou pop, avec toute la grâce et l’entrain d’une chorégraphie soignée au millimètre dont des danseurs s’emparent ici avec un naturel déconcertant. Tout semble simple, léger, évident, chez ces sacrés phénomènes qui s’appellent Violette, Aurélien, Eléa ou Olivia. Et tout relève d‘une telle souplesse, aussi, dans une profusion de gestes qui n’est pas sans rappeler les arts du cirque. Ces artistes là savent donc chanter, danser, et même faire les clowns : what else ?
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What else ? De l’humour, sans doute. Bingo : ils en ont, aussi, ces saltimbanques multicartes qui, à l’image de Baptiste Allaert, interpellent le public à l’envi, viennent s’asseoir sur les spectateurs des premiers rangs en recoiffant le premier chauve venu, et usent de leurs pieds de micro à la manière de bâtons de twirling. Sans compter ces bruitages (exquis moment de plantage d’ordinateur mimé…sans ordinateur) et autres onomatopées ne manquant pas de faire sourire, au même titre que ce savoureux morceau de « air piano » façon mime que Marceau n’aurait pas renié. On rigole, c’est sûr, et on finit par bien les aimer, ces gens de la planète Stéréo.
Ainsi, au terme d’une heure trente d’un spectacle servi par les vifs et électrisants jeux de lumière de Beñgona Garcia Navas, l’audience massive ne peut que définitivement se prendre d’affection pour ces artistes de la compagnie d’un Philippe Decouflé venu opérer un coup de maître pour sa première venue à Vichy. Sur sa planète à lui, les corps sont en mouvement permanent, les âmes sont guillerettes, les êtres s’enivrent de rock entre deux éclats de rire. Sur sa planète à lui, chaque art est symbole de vie. De vies qui dansent, comme une évidence.