CONCERT AU MUSÉE – Le 13 juin alors que Netflix révélait la suite de la saison 3 de Bridgerton, le cadre magnifique des salles rouges du Louvre accueillait un concert où la folie du roi George III -époux de la fameuse reine Charlotte de la série- était au cœur du programme de l’Orchestre de Paris à la baguette de Klaus Mäkelä.

Dans la salle du Sacre de Napoléon, on tourne soudainement la tête vers Ingres et Winterhalter où sonnent quatre cuivres à équité entre trombones et trompettes, accompagnés d’un ostinato de tambour. Le rythme lent prend un tour davantage solennel avec un fortissimo qui fait rebondir le son sur les tableaux -de manière un peu saturée malgré la hauteur sous plafond. Cette marche de Purcell de Music for the Funeral of Queen Mary, laisse place à un autre extrait Canzona, où l’harmonie acoustique est mieux délivrée et nous transporte à la fin du 17e siècle et on peut facilement s’imaginer la procession dans l’Abbaye de Westminster.
Univers parallèles

Au bout d’un moment, Eric Sammut traverse avec son tambour la salle pour se positionner devant l’immense tableau de Jacques-Louis David, où les autres musiciens l’attendent. C’est brutalement que l’on passe à la composition de Peter Maxwell Davies. Eight Songs for a Mad King démarre par un vacarme cacophonique mettant un terme rapidement à la douceur du baroque.
Une folie riche en couleur
Des cris, des hurlements, des grommellements, des vocalises, des grognements, des bougonnements, des aboiements, des susurrements… la liste peut encore continuer pour Thomas Florio qui interprète le roi fou. Toutes ces expressions de la voix génèrent un nouveau regard sur le chant et placent cette composition comme un Théâtre musical. La technique, la versatilité, la souplesse de la voix du baryton impressionnent et dérangent. Florio incarne aussi bien son rôle de comédien que les agitations sur cinq octaves.
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Violon violent
La gymnastique vocale est également physique dans cet ensemble. Le pianiste, Jean-Marie Cottet, danse d’un clavier à un autre, du clavecin au piano tout le long de cette pièce. Œuvre avant-gardiste, différentes références s’alternent. Fox-trot, menuet, Haendel, sont joués et insérés entre les cris du roi fou. Des instruments peu usuels sont aussi privilégiés, sifflet de train, crécelle, didgeridoo -instrument aborigène-, appeaux -imitant les oiseaux. Certains de ces sons ne sont pas toujours agréables à entendre. La sortie de la zone de confort est à son apogée lorsque George III arrache le violon des mains de son compagnon pour le fracasser.

La destruction réelle d’un instrument sur scène est surprenante. On peut être surpris, fasciné, intéressé, charmé, intrigué, dérangé, ennuyé, angoissé, entrainé par cette composition et son interprétation mais indifférent, non ! Une folie qui a forcément laissé une empreinte sur les spectateurs…