RÉCITAL – On l’avait adorée l’an dernier dans l’Opéra de Quat’ Sous du festival d’Aix, en marâtre frisé défrisante : Véronique Vella a eu droit à son show à elle à l’Athénée Théâtre – Louis Jouvet. Elle en profite pour nous faire son tour de chant façon cabaret poétique. Un spectacle qui tient par la personnalité de cette artiste géniale : doux, engagé, tendre et drôle.
La poésie coule dans ses veines
Véronique Vella, 479ème sociétaire de la Comédie Française (c’est pas nous qui avons compté, allez voir sur leur site), poursuit depuis une carrière forte et exigeante sur les trois scènes du Français. De Marivaux à Molière, de Hugo à Dario Fo ou Edmond Rostand, elle aborde les grands textes théâtraux avec une solidité à toute épreuve et un sens inné de la scène, que ses débuts difficiles de jeune comédienne et chanteuse dans les cabarets parisiens lui ont permis d’affirmer. Véronique Vella est venue à la comédie par le biais de son amour de la poésie qui irrigue son parcours artistique et sa vie même. Très impliquée par ailleurs dans l’univers musical, elle participe aux séries régulièrement consacrées par la Comédie Française aux cabarets et à la chanson (hommages à Boris Vian et Léo Ferré), dont le merveilleux spectacle l’Interlope imaginée en lien avec son collègue Serge Bagdassarian. Véronique Vella faisait par ailleurs partie l’an dernier de la production de l’Opéra de quat’sous de Bertolt Brecht/Kurt Weill crée au Festival d’Aix-en-Provence et repris ensuite sur la scène de la salle Richelieu.
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Gravés dans le marbre : Kurt Weil et Bertholt Brecht
Impossible pour Véronique Vella de dissocier les textes de Brecht et la musique de Kurt Weill, proposant ainsi des extraits notamment de l’Opéra de quat’sous ou du Requiem Berlinois qui dénonce les horreurs de la Première Guerre mondiale, mais aussi la montée des extrémistes. Rosa la rouge, texte puissant et d’une rare intensité poétique, se lit comme un hommage à Rosa Luxembourg. Le grand citron se rattache à une phase plus souriante des deux complices.
Les p’tits dessins : Desnos
La voix Véronique Vella intense de timbre et porté par une conviction de chaque instant, doté d’une diction parfaite, porte ses fruits tant dans les morceaux graves que plus légers. On retient les petites parenthèses et les pépites d’humour de Jean Wiener sur des poésies de Robert Desnos (La Véronique, le Mimosa, La Narcisse et la Jonquille et le cycle Chantefleurs). Ici, porté par le piano inventif de Vincent Leterme et quelquefois par sa voix même, Véronique est d’une fantaisie réjouissante et réconfortante. Bon dieu que ça fait du bien !
Les grands discours : Jean Ferrat, Aragon
Léo Ferré n’est jamais plus inspiré que lorsqu’il met en musique des textes d’Artur Rimbaud (Les assis) ou de Louis Aragon (Je chante pour passer le temps). Véronique Vella aime traduire et interpréter, on le voit, les artistes engagés. Elle met aussi en avant son poète préféré, René-Guy Cadou l’instituteur breton mort jeune, sur des musiques composées par Vincent Leterme principalement. L’artiste, entre la comédienne et la chanteuse, dévoile toute sa sensibilité et son âme de femme au service de ces textes lumineux.
Prétexte à chansons
Mais Véronique Vella aime aussi les chansons à texte, celles de Barbara ou de Juliette. C’est avec deux chansons toujours singulières de cette dernière (Le dernier mot et Un ange passe) qu’elle ouvre et referme cette parenthèse musicale et poétique. « Je souris aux anges » selon le texte même de Juliette, reflète bien l’état d’esprit du public qui salue avec ferveur cette soirée toute teintée d’esprit et d’intelligence.
Où va Vella ? Les prochaines dates
Outre sa participation à plusieurs productions de la Comédie Française durant la saison 24/25, Véronique Vella, avec la complicité de Benoît Urbain, proposera au Studio Théâtre à compter du 5 février 2025, un nouveau spectacle musical et poétique : Singulis, poètes vos papiers. On y sera aussi…