FESTIVAL – Le festival de Toulouse propose à l’auditorium Saint Pierre des Cuisines, un évènement hommage au pianiste Vladimir Horowitz. Le spectacle mêlant musique et récit biographique est écrit et mis en espace par Magali Thomas et raconté par Nelson Monfort. Sergio Monterisi prête ses doigts à la musique du mythique pianiste. La flutiste Caroline Debonne est aussi de la partie.
« Volodia » : la petite voix
Le spectacle balaye la vie bien remplie d’Horowitz d’un point de vue introspectif. Nelson Monfort prête ainsi sa voix à « Volodia » (le surnom que lui donnait son épouse Wanda) qui représente la conscience du pianiste. De son enfance et ses débuts russes à ses triomphes lucratifs aux Etats-Unis en passant par sa fuite à travers l’Europe et sa rencontre cruciale avec Rachmaninov, « Volodia » se souvient et raconte. Elle exprime longuement et avec insistances les angoisses du pianiste, sempiternellement en proie aux doutes qui l’ont parfois poussé à se couper du public pendant des années.
Cette conscience est aussi quelque fois le réveil de l’auto-saboteur qui sommeille plus ou moins profondément chez la plupart des grands artistes. Nelson Monfort, connu pour sa tonicité et son entrain dans le commentaire des exploits sportifs adopte dans cette optique un ton plus feutré et posé mais non moins vivant et enthousiaste qui maintient sans peine en haleine le public (malgré quelques redondances dans le texte). La mise en espace se focalise essentiellement sur quatre points : le pianiste au centre, le récitant coté jardin avec un bureau et quelques livres, Magali Thomas côté cour et la flûte nichée sous une arcade légèrement en hauteur en arrière-plan. L’identifications des personnages et des situations est efficace et immédiate pour le public. Magali Thomas incarne les personnages féminins évoqués dans la vie du pianiste (son épouse Wanda et sa sœur Régina en particulier). Certaines actions doublant la parole du récitant auraient parfois pu gagner encore en naturel et en synchronicité.
Horowitz : la musique dans l’âme
La musique est au cœur du spectacle. Jouée quasiment en continu, elle se partage entre le piano qui occupe la place prépondérante avec des œuvres souvent au cœur du répertoire du fameux pianiste et la flûte proposant des moments de repos en guise d’interludes entre les tranches de vies. Ils sont aussi l’occasion de soutenir ou maintenir l’émotion proposée. Au-delà de ça, des liens sont aussi faits entre l’esprit des morceaux joués et l’histoire du compositeur. C’est ainsi que les Scènes d’enfants de Robert Schumann sont interprétées lors du récit de sa jeunesse. Les motifs de l’adagio sostenuto du deuxième concerto de Rachmaninov sont joués à la flûte quand Horowitz se retrouve abattu, à la mort du compositeur qui était son ami. Et le retour triomphal d’Horowitz en Russie est appuyé par les Cloches de la grande porte de Kiev des Tableaux d’une Exposition de Moussorgski.
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Magali Thomas donne même de la voix en chantant un morceau géorgien quand Horowitz est pris de nostalgie en pensant à sa famille qu’il a laissé. Le jeu virtuose de Sergio Monterisi ne faiblit à aucun moment du concert. Il veille à se rapprocher au plus près du style d’Horowitz, dans l’intensité du jeu, la gestion des silences et la résonnance du piano en particulier. Un Steinway bien sûr, comme l’exigeait Horowitz, histoire de pousser l’hommage jusqu’au bout…