Back to Rach !

CONCERT – Rendez-vous était pris : ce vendredi 27 septembre, l’Orchestre Philharmonique de Radio France dirigé par Dima Slobodeniouk accompagnait un Pletnev décidé à aller au bout de l’intégrale des Concertos pour piano de Rachmaninov, entamée la veille dans l’Auditorium de la Maison de la Radio. 

On s’était dit rendez-vous dans un jour, même heure, même pomme. Attente insoutenable. Une journée passée à entonner le thème de l’Adagio du deuxième Concerto, dans le métro, au boulot. Alors pas question de manquer une miette de la deuxième soirée. On arrive en avance, on se presse. Balcons remplis à nouveau – c’est l’effet Pletnev. Maestro et soliste entrent en scène. Nous y revoilà. Attachez vos ceintures.

Montagnes russes

Concerto n°3 en ré mineur, op. 30. On ne présente plus le morceau – enfin, si, un peu quand même, pour le plaisir. Un thème, déjà, celui du premier mouvement. Entêtant, délicieux, élégant fil rouge d’une rhapsodie en grand. Vous voyagez, Pletnev aussi : les impressions se succèdent, de divertissements espiègles en rêveries absorbées et gammes frénétiques. On souffle un peu dans le très bref et très mélancolique Intermezzo. Pas le temps de s’attarder : vient l’autre gros morceau de la pièce.

Bois et cordes au rendez-vous pour donner la réplique dans ce Finale. Un balancier entre la malice et la solennité ; un kaléidoscope d’humeurs et d’ambiances à plusieurs vitesses qui révèle ses nuances en mille petites digressions concertantes. La fougue du pianiste, concentrée la veille dans les avant-bras, remonte ce soir jusqu’au buste. Le soliste se laisse même emporter parfois. Il faut dire que les occasions ne manquent pas. Car oui, Rach 3 c’est aussi et surtout un finale d’une extraordinaire intensité. Pletnev opiniâtre, acharné, sublime. Explosion. Foule en délire. Et voilà déjà l’entracte.

Vous reprendrez bien un peu de Rachmaninov ?

Avec le Concerto n°4 en sol mineur, op. 40, œuvre à la genèse douloureuse, passage à un discours plus intimiste. La mélancolie s’installe dans l’Allegro vivace que Pletnev joue tout en délicatesse. Les mélodies courent en descendant et s’accompagnent de complaintes chatoyantes et pudiques – avec tout de même quelques éclaircies scintillantes. Le Largo ne trahit pas cette humeur sombre, qu’il réaffirme à coup de questions/réponses sobres et épurées avec l’orchestre. 

À lire également : Pletnev : la sobriété énergique

Le dernier mouvement du quatrième Concerto, terme de cette intégrale, nous arrache à notre rêverie avec son fortissimo inaugural. Cavalcades espiègles du piano. Pletnev, implacable, déroule ses gammes, fait s’empiler les strates de la partition. Accalmie éphémère, puis retour aux choses sérieuses (entendre le pianiste chanter doucement à son piano !). La partition se resserre et la masse orchestrale se densifie jusqu’au bouquet final. Finesse d’exécution, pureté formelle : c’est signé Pletnev. Un seul rappel cette fois, malgré les applaudissements ravis. On sort étourdi, abasourdi. Pletnev et Rachma, c’est déjà fini. Au revoir Maison de la Radio, et à bientôt.

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