DANSE – Plongez au cœur de l’Albaicin, le quartier le plus séduisant de Grenade, et assistez à un spectacle de flamenco au « Palacio Flamenco ». Ce magnifique palais Renaissance du XVIème siècle, face à l’Alhambra, propose trois représentations par soir mêlant chant et danse. Une initiation réussie au flamenco, qu’il serait dommage de louper si vous passez par-là…
Né en Andalousie, le flamenco, reconnu par l’UNESCO depuis 2010 comme patrimoine immatériel de l’humanité, est bien plus qu’une simple danse : c’est un cri du cœur. Apparu au XVIII-XIXème siècle, l’étymologie même du terme « flamenco » reste un mystère. Certains pensent qu’il pourrait venir de l’hispano-arabe « fellah min gueir ard » qui veut dire « paysans sans terre » désignant les maures expropriés qui rejoignirent les communautés gitanes. D’autres le relient au mot « flamencia », qui évoque la fougue caractéristique des gitans. Une dernière hypothèse plus poétique, établit une association avec l’élégance du flamant rose dont les poses majestueuses rappellent celles des danseurs.
Le Duende : transe collective
C’est dans l’intimité des « tablao » ces petites salles de spectacle typique que cet art a émergé pour exprimer les émotions des opprimés. Le Flamenco est une danse qui nous happe tout entier, et qui prend aux tripes. Sur scène, les danseurs donnent tout dans une transe hypnotique où joie et peine s’entremêlent. Chaque geste raconte une histoire de passion ou de douleur. Les corps se cambrent, la sueur perle, les talons martèlent le sol tandis que les bras tracent des arabesques dans l’air. Le public retient son souffle puis claque dans les mains en rythme. Une communion s’établit alors entre le public et les artistes : un moment suspendu que les afficionados nomment « duende ». Le Duende, c’est une énergie qui passe de l’un à l’autre, créant un courant électrique qui parcourt l’espace et qui scotche à sa chaise même le spectateur le plus néophyte. Qu’elle se déploie dans l’intimité d’un tablao ou sur la scène plus formelle d’une salle de spectacle dédiée à cet art, l’expérience est la même : celle d’un langage universel qui transcende les frontières et continue de fasciner, alors que la danse est la même depuis des années.
Flamenco turistico, flamenco, vero ?
Au « Palacio Flamenco », la troupe change chaque mois. Ce soir-là, les danseurs Ana Pastrana et Nicolas Jurado ont embrasé la scène. Accompagnés du guitariste Luis Mariano et des chanteurs Sergio el Colorao et Fernando Caballo, ils nous ont offert une très belle performance. Ana Pastrana, dans sa robe à pois traditionnelle et son châle assorti, a fait tournoyer les volants de son jupon et de ses manches. Sa silhouette, sublimée par une robe en « sablier » et un large décolleté, incarne l’essence même du cliché de la danseuse de flamenco.
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Face à elle, les hommes de la troupe adoptent une sobriété vestimentaire : costumes noirs et souliers vernis. Si les codes esthétiques sont figés dans le temps, ils servent ici un spectacle respectueux des codes et de la tradition. Les solos alternent avec des duos enflammés, portés par l’excellence des musiciens et chanteurs. Chacun y donne son meilleur, créant une atmosphère joyeuse entre les danseurs et le public, installé à quelques mètres. Ce spectacle, bien qu’adapté aux touristes étrangers, reste une expérience immersive vers l’art du flamenco.