JAZZ – À la Scala de Provence, l’Orchestre National Avignon Provence dirigé par Fiona Monbet propose un concert « Rhapsody in blue » consacré à George Gershwin en collaboration avec le trio jazz formé par Paul Lay au piano, Donald Kontomanou à la batterie et Clémens Van der Feen à la contrebasse. Les passages additionnels et les réarrangements sont conçus par Philippe Maniez.
Jazz et sympho : fusion volcanique
George Gershwin avait à cœur de métisser les influences musicales, mêlant habilement et parfois de façon détonante tous les milieux pour lesquels il composait. Le programme de ce soir s’inscrit dans cet esprit. Il est formé d’œuvres parmi les plus marquantes du compositeur telles que, Someone to watch over me, It ain’t necessarily so, Summertime (Porgy and Bess) et bien sûr la Rhapsody in blue, dont le centenaire est fêté cette année, placée au centre du concert. Comme une vaste rhapsodie, le concert plein de rebondissements intègre de nombreux passages improvisés, des solos instrumentaux endiablés s’ajoutant sur le fil, et une fusion subtile entre le trio et le grand orchestre dans un style emprunté au « big band ». Même Fiona Monbet, au détour d’une variation de la Rhapsody in blue, surprend en s’emparant de son violon pour la première fois de la soirée, y intégrant un passage aussi virtuose que survolté.
La tension monte avec un trio électrique
Le piano de Paul Lay, à 200% tout au long de la soirée n’est pas moins survolté. Son jeu frénétique électrise les parties de clavier et rebondit sur celle de l’orchestre ou du trio. Vigueur et passion sont ses maîtres-mots, et il se fait bien entendre même au-dessus de l’orchestre. L’instabilité rythmique empêche cependant parfois l’oreille de se fixer et entraine parfois de légers décalages avec le reste des musiciens. Le spectacle est aussi visuel que musical, l’interprétation étant appuyée par une gestuelle théâtrale rendue d’autant plus visible par sa veste à sequins. C’est aussi lui qui présente le programme au fil de la soirée.
Le batteur Donald Kontomanou exploite toute la palette de son instrument avec une finesse permettant d’appuyer la chaleur feutrée de nombreux passages, que ce soit par la caresse des balais sur la caisse claire, le tintement plus ou moins résonnant des timbales et du charleston ou le son mat des baguettes frappant directement les cercles. Il joue même un passage à mains nues. Ses solos sont fluides et bien articulés.

La contrebasse de Clémens Van der Feen se démarque un peu moins. Elle apporte un groove entrainant dans les trios et les quatuors (avec Fiona Monbet au violon). La tenue des tempi voire la justesse s’avèrent cependant par moments perfectibles.
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l’ONAP en mode Big Band
Après de légers flottements en tout début de programme, l’Orchestre National Avignon Provence révèle pleinement son éclat dans la vaste Rhapsody in blue prolongée de nombreux passages et improvisations additionnels. Les motifs sont exécutés de façon nette et reproductible. Les instrumentistes montrent aussi leurs qualités individuelles et ce dès le redoutable solo de clarinette amorçant la Rhapsody in blue, exécuté avec brio. Fiona Monbet (spécialiste de ce répertoire fusion classique-jazz) le dirige sans baguette d’une gestuelle ample et souple. Elle encourage parfois les solistes de signes de la main et rentre dans les passages les plus entrainants par de légers balancements dansants. L’ambiance est au rendez-vous. Le public applaudit entre les morceaux et même parfois au milieu, après les prouesses les plus marquantes ou les rythmes les plus entrainants qui en auront fait dodeliner de la tête plus d’un.