COMPTE RENDU – À la Philharmonie de Paris, Daniel Barenboim retrouve les musiciens de l’Orchestre de Paris, dont il a été le chef principal de 1975 à 1989. L’occasion pour le public parisien de rendre hommage à un musicien pour lequel l’affection des spectateurs semble intacte.
Cinquante ans après sa nomination en tant que chef principal de l’Orchestre de Paris, Daniel Barenboim retrouve la phalange parisienne dans un programme consacré à Beethoven. Un retour aux sources en quelque sorte, où les souvenirs et l’instant présent se mêlent en une drôle de temporalité.
Retour vers le passé
Lorsque Daniel Barenboim s’avance sur la scène de la Philharmonie, la salle se lève. Il n’a pas fait un geste que le public est déjà debout, acclamant le chef comme à la fin d’un concert prodigieux. Ce soir, on ne vient pas écouter l’Orchestre de Paris, ni même écouter Beethoven sans doute – d’ailleurs, peu importe que l’on ait déjà entendu ses sixième et septième symphonies des dizaines de fois. C’est Barenboim que l’on vient voir, auréolé d’une carrière prestigieuse, d’enregistrements de référence. Un spectateur, à quelques sièges de distance, murmure à son voisin : « Je viens l’entendre une dernière fois », tandis que deux étudiants, assis derrière, se réjouissent de l’avoir vu « au moins une fois dans leur vie ». Drôle d’atmosphère pour un concert, quand le spectacle vivant est rattrapé par le passé, et que le public est déjà nostalgique d’un chef pourtant bien là devant nous.
Più lento
À presque quatre-vingt-trois ans, et atteint – il l’annonçait il y a quelques mois – de la maladie de Parkinson, Daniel Barenboim entre certes d’une démarche hésitante sur scène, mais dirige debout et par cœur. Il faut dire que la Symphonie Pastorale doit couler dans ses veines à force de l’avoir dirigée – en 1977, 1980, 1981, 1982 et 1985, rien qu’avec l’Orchestre de Paris ! Il attaque l’œuvre d’un tempo étonnamment lent, et l’on admire la manière dont les musiciens parviennent à soutenir la ligne et conserver un tempo qui, en tant qu’auditeur, nous a paru très inconfortable : à étirer le temps à ce point, on en perd la structure du mouvement, et les brefs motifs qui construisent la partition n’en semblent que plus répétitifs.
C’est finalement dans le quatrième mouvement que cette lenteur convainc, car elle apporte une tension dramatique à l’orage qui gronde, et les tutti bénéficient d’un son extrêmement équilibré, où l’on discerne tous les timbres. La « Réunion joyeuse de paysans » est quant à elle un peu triste, loin des versions débridées dont regorge la discographie – là encore, c’est le tempo qui pèche. En revanche, les solistes parmi les vents font un très beau travail de lyrisme, et les chefs d’attaque sont remarquables d’un bout à l’autre, dans leur manière d’impulser aux cordes du phrasé et autant d’expressivité que possible.
Le temps, c’est une chose étrange
En effet, Daniel Barenboim use très peu de sa main gauche pour diriger l’orchestre – la main qui donne les nuances, les élans, et sculpte une lecture de l’œuvre. À écouter cette Symphonie n°7, c’est surtout le son d’ensemble qui fait l’intérêt de cette version. Sans doute le placement des contrebasses et violoncelles du côté gauche donne-t-il un son plus nourri, plus profond, qui contamine les premiers violons. Les tutti du Presto, notamment, offrent de très belles couleurs et du brillant ; mais l’Assai meno presto est d’une lenteur terrible. Il y a quelque chose qui n’est pas organique dans un tempo aussi lent, et c’est d’autant plus surprenant que l’Allegretto est relativement vif. Le finale montre quant à lui un orchestre qui joue avec une qualité d’écoute entre les pupitres parfaite, et des vents et des cuivres toujours aussi engagés musicalement.
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Le public est déchaîné et debout, une fois encore, lors des saluts. C’est un concert qui n’était pas totalement abouti, avec ses tempi qui semblaient vouloir arrêter le temps – ou en tout cas ne pas le laisser filer trop vite. C’est peut-être une belle métaphore de la carrière de Daniel Barenboim, forcément ralentie aujourd’hui, mais qui se poursuit auprès d’un public toujours fidèle à ce que l’immense chef a été ; et c’est émouvant, ce passé qui ne passe pas.


Chère madame,
Bravo pour votre article riche en vocabulaire et phrasé technique, mais si pauvre en sensibilité et émotion. Faire la démonstration de votre « science » dans un instant qui entre au panthéon de l’ Histoire de la musique, est la preuve d’un ego et d’un narcissisme dont les tailles n’´ont d’équivalent que celle de la salle Bouliez, mais surtout d’une incapacité à percevoir l’essentiel.