CRITIQUE – Présenté à l’Opéra Comique, Les Eclairs, troisième opéra du compositeur Philippe Hersant, est un hommage étrangement joyeux à la vie extraordinaire de l’inventeur Nikola Tesla, entre opéra dramatique et comédie musicale.
Sur le pont de l’Oregon qui traverse l’Atlantique, Nikola Tesla croit encore au rêve américain. Vêtu d’un costume-cravate, chapeau melon, et long manteau dans lequel se cachent des lettres de recommandations des plus grands ingénieurs d’Europe… le savant un peu fou et fraîchement débarqué de l’Empire d’Autriche, en 1884, est convaincu qu’ici, à New York, ses inventions et son intelligence éclaireront la face du monde. Il avait raison.
Seulement, le chemin vers la reconnaissance de son travail est semé d’embûches. Les multiples manigances de Edison et Parker, vrais méchants à la voix sombre, auront finalement raison de sa lumière intérieure. Las, celui qui a permis le développement du courant alternatif et la distribution de l’électricité, et qui a déposé plus de 300 brevets pour 125 inventions, finit seul à contempler les éclairs, objet ultime de sa fascination, et nourrir les oiseaux.
Quel bel hommage qu’a rendu ce 2 novembre l’Opéra Comique à Nikola Tesla, en proposant la création des Eclairs, par le compositeur Philippe Hersant, sur un livret de Jean Echenoz, adapté de son roman publié en 2010. Hommage d’autant plus symbolique que la Salle Favart est la première en Europe a avoir été alimentée en électricité, en 1898.
Retrouvez la playlist classique du compositeur Philippe Hersant
Broadway
Opéra 100% français, de la musique au livret en passant par les interprètes et les décors. Les Eclairs, animé par la flamme ardente de Tesla nous transporte de l’autre côté de l’Atlantique. On se trouve quelque part entre l’opéra dramatique et les comédies musicales de Broadway, dans le New York industriel du début du XXe siècle pour suivre les pérégrinations de celui qui s’appelle ici Gregor, d’inventeur acclamé à paria solitaire.
Energique
Plutôt habitué aux musiques chorales et autres chants sacrés, Philippe Hersant offre durant Les Éclairs trois actes d’une musique joyeuse, scintillante et énergique, avant de conclure par un quatrième acte plus dramatique. La partition comporte de nombreux clins d’œils à la Symphonie du nouveau monde (dont sont archi fans les Américains de l’époque !), au jazz et à la comédie musicale.
Les interprètes, Jean-Christophe Lanièce (Gregor), Marie-Andrée Bouchard-Lesieur (Ethel), François Rougier (Normann), Elsa Benoit (Betty), André Heyboer (Edison) et Jérôme Boutillier (Parker) sont magnifiquement bien accompagnés sur scène par l’ensemble Aedes, et par l’Orchestre philharmonique de Radio France depuis la fosse, dirigé par Ariane Matiakh. Le livret est savant, riches de pirouettes poétiques et littéraires. Quant à la musique, elle est délicieuse, tout simplement.
La création, qui marque l’arrivée de Louis Langrée à la direction de l’Opéra-Comique, est à voir jusqu’au 8 novembre.