AccueilCritiquesL'Elixir d'amour à Bordeaux, le goût des jours heureux

L’Elixir d’amour à Bordeaux, le goût des jours heureux

OPERA – Jusqu’au 10 avril, l’Opéra national de Bordeaux accueille une production de l’Elixir d’amour champêtre, originale et détonante. La mise en scène d’Adriano Sinivia qui, depuis quelques années, fait le tour de l’Europe, sera cet été aux Chorégies d’Orange.

Dans la partition de Donizetti comme dans la vie, un Élixir d’amour se déguste comme un bon vin. D’abord, il faut être bien entouré, et de ce point de vue là, nous l’étions ! Quelle joie de voir enfin une salle comble à Bordeaux, de sentir l’électricité dans l’air à l’approche du lever de rideau et l’excitation du public à l’ouverture des portes.

Samedi 3 avril, en ce début de printemps, le Covid est (pour l’instant…) bien loin et l’ambiance est à la fête. Chapeau à l’Opéra national de Bordeaux d’avoir programmé une œuvre légère et accessible à ce moment de l’année, ça fait du bien !

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Un Elixir d’amour de l’infiniment petit, à l’Opéra national de Bordeaux. © Éric Bouloumié

Ensuite, on prend son verre, on observe la robe, on scrute les petits détails de l’habillage de ce grand cru dont l’étiquette est prometteuse. Sur ce point, il faut le dire, on est surpris ! A l’ouverture, le rideau se lève sur un vol d’oiseaux au-dessus d’un champ de blé, projeté à l’écran en images de synthèse.

S’ensuit un zoom vertigineux sur un sillon qui dévoile le décor : des épis grands comme des séquoias et une roue de tracteur géante. On bascule en un clin d’œil dans un univers fantastique, à mi-chemin entre le Monde de Gulliver et Mille-et-unes Pattes.

Car dans la mise en scène d’Adriano Sinivia, le petit peuple dont sont issus les personnages du livret original est réellement, un petit peuple. Jolie idée, et premier sourire d’une longue série. Les costumes de ces gentils lilliputiens auraient mérité un poil plus de couleur pour compléter le tableau et raviver l’éclairage un peu terne du deuxième acte, mais passons.

On bascule en un clin d’œil dans un univers fantastique, à mi-chemin entre le Monde de Gulliver et Mille-et-unes Pattes.

Partition redoutable

Vient le moment de prendre son verre en main, et de tremper ses lèvres dans le rouge vif du sujet : la musique (NDLR : les commentaires qui suivent valent pour le cast des 2, 5, 7 et 10 avril). L’Elixir d’amour a beau camper des personnages, des situations et des émotions simples, son exécution est très difficile. Comme pour un bon vin, le travail souterrain des années ne devrait jamais se voir.

Or, la mise en scène, avec son énergie foisonnante et ses éléments de décors un peu bruyants, a tendance à rendre la tâche de restituer une partition déjà redoutable encore plus rude qu’elle ne l’est, surtout pour les chanteurs. 

Catherine Trottmann (Adina) et Yu Shao (Nemorino). © Éric Bouloumié

Quand Catherine Trottmann (Adina) est libre de son corps, ses aigus sont redoutables et la voix assure le spectacle, mieux que n’importe quel artifice scénique. Dans l’agitation, un Julien Véronèse (Dulcamara) profite de la lourdeur de son personnage de vieux charlatan pour asseoir sa voix large et puissante. Il tire clairement son épingle du jeu, le coquin !

Yu Shao en grande forme

Finalement, Yu Shao (Nemorino) est le seul qui soit parfaitement à l’aise avec l’exigence d’une telle mise en scène, car sa technique parfaite lui permet de faire face en toute circonstance. Lisse et soyeuse, sa voix est d’une constance remarquable, qu’il chante perché sur un coquelicot géant à deux mètres du sol ou dans le confort absolu de la direction très “pro-chanteurs” de Nil Venditti pour le moment de grâce d’una Furtiva Lagrima.

La jeune cheffe italo-turque se montre particulièrement à l’aise avec la partition, les yeux toujours levés vers la scène, un peu moins vers la fosse. Espérons que les musiciens de l’Orchestre national Bordeaux Aquitaine ne lui en veulent pas trop, car c’est un vrai bonheur de la voir ainsi prendre part à la fête. En sortant de ce spectacle, après avoir applaudi cette belle équipe, on cherche une place en terrasse pour commander… devinez quoi…

L’Elixir d’amour, Gaetano Donizetti. Direction musicale : Nil Venditti; mise en scène : Adriano Sinivia. Informations et réservation.

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