AccueilA la UneUn concert matinal depuis le Grand Théâtre de Provence, retransmis en direct

Un concert matinal depuis le Grand Théâtre de Provence, retransmis en direct

Un horaire inhabituellement matinal, en semaine, pour offrir à un public éloigné, dans le cadre du dispositif Heko, une splendide programmation, de Mendelssohn à Barber, en passant par Farrenc, Louise, de son prénom.

 Une cheffe de cœur
Debora Waldman © Lyohdo Kaneko

La jeune et talentueuse cheffe Debora Waldman apparaît sur l’estrade, fine baguette tenue à la main droite. Elle neutralise sa féminité, comme cela est souvent le cas chez les cheffes, vêtue d’un complet noir, tandis que ses cheveux sont impeccablement tirés par un chignon sommital. Mais cette raideur n’est là que pour mieux laisser apparaitre la précision de l’ensemble des articulations qu’elle mobilise, de la phalangette de l’index gauche aux chevilles, en passant par la nuque, altière ou empesée par le propos musical. Sa gestuelle est clairement organisée : impulsions brèves et précises, balancements chaloupés, rebonds aériens, au point que la cheffe est une véritable partition humaine. Elle invite les musiciens et le public à une véritable « audicée » (un voyage de l’oreille), dont elle est la fidèle et dévouée Pénélope.

À lire également: la playlist classique de la cheffe d'orchestre Debora Waldman

Une phalange de rêve

Tenue de main de maitresse, la phalange répond comme un seul prétendant. De ce champ sonore s’envolent des frisottis, s’étendent de moelleuses nappes, se déploient de savants jeux d’écriture orchestrale. Les cordes sont particulièrement incisives, rauques ou lyriques, guerrières ou pacifiques, mais jamais cinglantes (Ouverture de la Belle Mélusine de Mendelssohn, Symphonie n°3 de Farenc). Les cuivres, cors en tête et en fête, sonnent juste, façon velours ou métal, en alliage avec les bois et les archets, dans la retenue comme dans l’apothéose (Concerto pour violon et orchestre de Barber). Le timbalier se tient au fait de l’orchestre, sur un mont Olympe, fait d’orages et de tonnerres (Barber, Farenc : premier mouvement). Les bois flûtent leurs lignes sinueuses, s’exposent à découvert dans les envolées de la petite harmonie, ou s’insinuent dans les replis des trois opus. L’émission est pure, peu gourmande de vibrato et autres effets bruités. Les bois réunis font un travail de maître-verrier, soufflant des formes galbées ou nerveuses, dans leur matière ardente et transparente.

Un homme-violon

Renaud Capuçon © Simon Fowler

Renaud Capuçon apparaît, en partenaire solaire et fiable, qui sait trouver sa juste place, dans le creux de l’orchestre et à l’écoute de sa cheffe. Il plonge dans le Concerto de Barber comme dans un grand océan, mettant son corps au travail de l’expressivité violonistique, de l’intériorité méditative – avec le piano-instrument d’orchestre – à l’explosion chtonienne – avec les timbales (troisième mouvement). Il semble, dans cette œuvre moderniste, mettre à jour tout un monde nouveau, fait d’ombres, dans les poussés de l’archet, et de lumière, dans les tirés. Il défait en cela, au plus intime de son jeu, le dualisme entre subjectivité et objectivité. Il offre son regard aux jaillissements aigus, et referme ses yeux quand la musique de Barber questionne la fragilité du monde. L’espace scénique est, pour cet homme « augmenté » par un violon, un fil sur lequel il se tient à l’équilibre, maîtrisant sa palette expressive et l’intensité sonore qui lui correspond. On pense, à l’entendre et à le voir, à l’univers de l’automate cher à Stravinsky, de Pulcinella à l’Histoire du soldat.

La dimension militante du concert n’échappe pas au public, sur le plan logistique et surtout sur celui de l’engagement des protagonistes. La musique se fait l’HEKO (retransmission en direct de représentations théâtrales et musicales au sein d’établissements médicaux) des fragilités humaines et de ses causes magnifiquement retrouvées.

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