DANSE – Les festivités du festival de la Place sont lancées sur la place du Châtelet et avec l’un des chorégraphes les plus en vogue du moment : Hofesh Shechter. Une grande fête du spectacle vivant, en attendant la réouverture du Théâtre de la Ville.
Alors oui, n’en déplaise aux automobilistes, la place s’est transformée en « arène vibrante à l’effervescence contagieuse » où les spectacles retournent dans la rue et où le public novice se mélange au public averti le temps d’un weekend à l’occasion de la réouverture prochaine du Théâtre de la Ville. Et oui une réouverte après sept ans de fermeture ça se fête en grande pompe. La soirée d’inauguration a eu lieu ce samedi 9 septembre en présence de la Maire de Paris, Anne Hidalgo qui nous a fait un discours drôle et féministe et surtout où elle a souligné l’importance de la culture dans nos vies. Le théâtre de la ville retrouve enfin son nom d’origine à savoir le théâtre de Sarah Bernhardt. Pour rendre hommage au « Monstre Sacré » et à la « Divine », il ne fallait pas moins la présence de la « Queen » du Théâtre Français Isabelle Huppert. Côté danse, c’est Hofesh Hofesh Shechter qui s’y colle pour notre plus grand plaisir.
Hofesh Shechter, un des chorégraphes les plus talentueux du moment
Habitué des grandes scènes internationales, Hofesh Shechter, chorégraphe israélien, a été popularisé récemment par le film français En Corps de Cédric Klapisch. Tout amateur de danse contemporaine se souvient de son spectacle Double Murder en 2021 au théâtre du Châtelet juste après la période Covid, qui avait été l’un des plus gros chocs chorégraphiques de l’année avec son french cancan déchainé et sa danse macabre avec des clowns. Cette année, il est l’un des artistes associés au Théâtre de la Ville et pour le lancement de cette nouvelle saison, il décide de présenter une version extérieure de « Contemporary Dance 2.0 ».
Une danse de « clubbing » exaltante et accessible
Un coup de tonnerre éclate et plusieurs danseurs débarquent sur scène, emportés par le tourbillon de la danse. Ils ne s’arrêteront plus. Ils puisent leur énergie dans le contact avec les autres mais aussi avec le sol. Cette danse est celle des clubs, celle de la vie nocturne où les corps sont libres et enchaînent des mouvements répétitifs, exaltants et tribaux. Un rythme fait de pulsations, celle du cœur. Des basses et des lumières rasantes, on se croirait ici en festival d’été avec une énergie de transe traduit par des mouvements de foule et des déhanchements de bassin. C’est la fièvre du samedi soir sur la place du Châtelet. Chaque entracte est indiqué par un carton brandi « Pop », « Sentiments », « Mère », « Paix ». Parfois un danseur s’effondre d’épuisement et est recueilli par les autres, ou parfois la troupe quitte la scène pour s’hydrater sur la Suite n°3 BWV 1068 de J.S Bach, moment d’accalmie avant de reprendre de façon encore plus intense. Bravo à eux de danser en pleine chaleur avec autant d’énergie, car la séance de 12h15 était déjà à la limite du supportable pour les spectateurs au vu de la rareté des arbres sur la place du Châtelet. Lors de son discours d’inauguration, Anne Hidalgo a en effet annoncé le projet de réaménagement de cette place qui sera rendue aux piétons comme à son origine. Planter des arbres ne serait pas non plus de trop.

Une danse cathartique pour faire exploser ses émotions
Shechter a décidé de jouer une pièce accessible à tous, même aux plus novices, sur une bande son complètement éclectique et universelle : hip-hop, folk, Bach et même « My way » de Franck Sinatra. En réécoutant ce tube, on comprend que les danseurs milléniaux expriment dans cette danse de club toutes leurs émotions : colère, tristesse, joie, obsession mais surtout la rage d’aimer et de vivre. Cette danse cathartique permet de se sortir du quotidien et de panser ses blessures. Pendant un moment, on ne pense plus à rien et on laisse la cinétique des corps opérer mais toujours dans une harmonie de groupe.
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Une communion s’opère alors entre les danseurs et le public qui ressent une multitude de sensation. Et le fait d’y assister debout, nous donne une furieuse envie de danser et de suivre le mouvement des danseurs mais aussi de sympathiser avec nos voisins. Contrairement à une salle de spectacle, à l’extérieur, on peut se lâcher et libérer notre corps en faisant quelques mouvements de bassin, sans pour être autant capable de suivre les mouvements des danseurs… Des passants s’arrêteront devant cette danse électrisante, qui est une véritable invitation à danser. La scène devient alors un lieu de création infinie où les barrières explosent entre les danseurs et le public. L’art transforme et comme l’a très bien rappelé Emmanuel Demarcy-Mota, le directeur du Théâtre de la Ville lors de l’inauguration « la vie engendre la vie, l’énergie produit l’énergie » selon la formule de Sarah Bernhardt. Et ce soir, Shechter a célébré l’énergie primitive de la vie, celle qui anime les corps en présence de musique.