Duo Shum, ça décoiffe !

CONCERT – Dans la famille des « Jeunes Talents » mis à l’honneur au Festival du Nouvel An de Gstaad, en Suisse, je demande le duo… Shum. A vos souhaits ? A vos agendas, surtout. Car voici un duo qu’il faut voir pour le croire, lui qui fait du son, mais brille surtout par la lumière de son jeu, d’autant plus resplendissante dans la magnifique église du village de Rougemont.   

Et voici venir le Duo Shum. Le duo qui ? Shum, pour « Bruit », en Ukrainien. Et du bruit, elles en font, les deux artistes. À vous faire exploser le sonomètre ! À vous faire aimer les décibels, surtout, et à vous convaincre qu’ils peuvent aussi rimer avec musique. D’un côté, Anastasia Rizikov, pianiste canado-ukrainienne. De l’autre, Lisa Strauss, violoncelliste franco-russe, artiste aux bras tatoués mais qui a avant tout la musique dans la peau. Deux lauréates de la Fondation Gautier Capuçon dont l’association est à la fois un joli symbole de paix, mais surtout une formule gagnante pour générer une matière sonore aussi enchanteresse que volcanique. 

Une éruption au cœur des Alpes suisses ? Mais oui, c’est possible, et le programme choisi par ce sacré binôme y est pour beaucoup, lui qui entend mettre à l’honneur des choses peu ou pas entendues, des raretés propres à faire vibrer (littéralement) leurs instruments, et à rappeler leurs origines, aussi. Ainsi sont annoncés l’Ukrainien Myroslav Skoryk (décédé en 2020), le Russe Dmitri Chostakovitch, son compatriote Alfred Schnittke. Et puis il y a du Bartok, du Fazil Say et même du Arvo Pärt (et son si troublant Spiegel im Spiegel). 

À ne plus savoir où regarder ! 

Un chouette programme à faire frémir d’avance les mains de tout pianiste ou violoncelliste, mais dont les deux artistes s’emparent avec une déconcertante facilité, et une folle générosité dans le geste et dans le son, avec ici des coups d’archets virevoltants (à en faire sauter des crins), là des déplacements de mains d’une rapidité et d’une précision confondantes. À vrai dire, l’auditoire en vient à ne plus savoir où poser les yeux, qui regarder.

Anastasia Rizikov © Patricia Dietzi

Il y a à gauche cette pianiste transcendée par son instrument, avec son épatante gymnastique des mains, cet art de n’oublier aucune touche sur le clavier, et de donner à chaque note sa juste valeur de lourdeur ou de légèreté avec des manières virtuoses (quelle intensité dans le Prélude !). Et à droite cette violoncelliste à l’énergie folle, le chignon aussi déchaîné que les coups d’archets, avec des pizzicati venant faire claquer les cordes sur une touche où les doigts de la main gauche font une gymnastique que n’effraient pas les grands écarts.      

Lisa Strauss © Patricia Dietzi
Shum, au calme

Du mouvement de tous côtés, donc, des forte à la pelle et des rythmes endiablés, mais aussi des instants bien moins tempétueux, pour prouver que ces deux artistes là savent donner dans tous les registres émotionnels. Ainsi de cette Mélodie de Skoryk aux teintes romanesques et chagrinées, ainsi surtout de ce Spiegel im Spiegel, ode à la pacification des mœurs et antidote pour cœurs tourmentés, ici joué avec la plus parfaite des sensibilités et la plus divine des éloquences. Un instant qui captive l’auditoire, qui l’envoûte même, en atteste ce long silence accompagnant une dernière note posée là comme l’ultime touche d’un tableau qui serait l’allégorie d’un temps qui passe toujours trop vite. 

À lire également : Alerte jeune talent à Gstaad ! Elle est là, la Nouvelle Star !

Et comme il est en effet passé vite, ce concert, finalement conclu par une ultime réjouissance, une Vocalise de Rachmaninov, où s’expriment une dernière fois un piano nourri au grain de la sensibilité, et un violoncelle au vibrato passionné. Là encore, il faut un petit moment de silence pour que le public retrouve ses esprits et finisse par applaudir chaleureusement les deux jeunes artistes de ce Duo Shum. Dont il faut assurément et prestement ébruiter le talent !       

Demandez le programme !

  • M. Skoryk – Mélodie
  • D. Chostakovitch – Prélude et Fugue en Ré mineur
  • A. Schnittke – Sonate n°1 pour violoncelle (extraits)
  • B. Bartok – Danses Populaires roumaines
  • F. Say – 4 Cities
  • A. Pärt – Spiegel im Spiegel
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