AccueilÀ l'écranA l'écran - LyriqueNabucco depuis le Met de New-York : carton-pâte en cinémascope

Nabucco depuis le Met de New-York : carton-pâte en cinémascope

NOUVEAUX FORMATS – Si Dead Man Walking et X : la vie de Malcolm X, deux opéras diffusés en direct au cinéma depuis le Metropolitan Opera de New-York, avaient été des réussites, il n’en va pas de même pour la dernière retransmission, consacrée à un « tube » du genre, Nabucco de Verdi. De l’interprétation musicale aux décors, en passant par les parties chantées, tout y est lourd et emprunté. Revue de détails.

Certes, le sujet de Nabucco ne fait pas dans la dentelle : Nous sommes en 587 avant Jésus-Christ. Le peuple hébreu est sous le joug de Nabuchodonosor (Nabucco), roi de Babylone, qui marche sur Jérusalem où sa fille Fenena est retenue en otage. Lorsque sa sœur Abigaille découvre qu’elle est née esclave, elle tente de s’emparer du pouvoir pendant que son père est reparti pour la guerre. Il y est donc question de guerre, d’oppression, de soif de pouvoir et de vengeance.

Dentelle… en fer forgé

Les personnages y sont très typés : Nabucco est roi de Babylone (baryton). L’esclave Abigaïlle (soprano) est sa fille présumée. Ismaël (ténor), neveu du roi des Hébreux, est amoureux de Fenena (soprano), fille de Nabucco. Il y a enfin Zaccaria, Grand prêtre de Jérusalem (basse).

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La partition est grandiose, souvent rutilante (à la première de Paris la critique déplora une utilisation excessive des cuivres), en accord avec les rodomontades bellicistes du livret. Les chœurs sont amples et majestueux, à l’instar du fameux Va, pensiero, que le peuple milanais de l’époque de la création de l’opéra (1842) reprenait en choeur, en réaction à l’occupation de sa ville par l’armée autrichienne. Les parties solistes demandent un engagement vocal et scénique particulièrement important.

Un casting de forts des Halles

Rien d’étonnant, donc, à voir arriver sur scène de véritables forts des Halles bâtis pour partir au combat : le Géorgien George Gagnidze est Nabucco, l’Ukrainienne Liudmyla Monastyrska est Abigaïlle, l’Ukrainien Dmitry Belosselskiy est Zaccaria. À leurs côtés, le Coréen du Sud SeokJong Baek (Ismaël) et la Russe Maria Barakova (Fenena) semblent des fétus de paille ! Encore une fois, les rôles demandent ces caractéristiques physiques. Mais encore faudrait-il que les voix soient à l’unisson de cette opulence musicale exigée. Or, c’est seulement dans les rares moments de tendresse ou de regret, quand sa voix se fait douce et chuintante, que Liudmyla Monastyrska laisse entrevoir le velours de sa voix. Si elle campe de façon convaincante son personnage de femme jalouse assoiffée de pouvoir, la voix débite mécaniquement, sans relief et avec une justesse approximative, sa partie chantée.

Liudmyla Monastyrska (Abigaille) © Marty Sohl / Met Opera

Il en va de même pour les deux rôles d’hommes graves, Nabucco et Zaccaria (George Gagnidze et Dmitry Belosselskiy). Impressionnants physiquement et campant bien leurs personnages, leurs performances vocales sont forcées, empruntées, touchant même leurs limites dans les aigus et les graves. Quant à Ismaël et Fenena (SeokJong Baek et Maria Barakova) -les Montaigu et Capulet de l’histoire, même si tout s’arrange pour eux deux avec la conversion de Fenena au judaïsme-, leurs voix légères sont belles et musicales, mais eux aussi semblent débiter en pilote semi-automatique leurs rôles.

Alors, à qui la faute ?

À la mise en scène de Elijah Moshinsky, simpliste et statique ? Sans aucun doute. Quand il ne se passe rien sur scène (pas de décors mouvants, pas d’effets de lumière, aucune scénographie) et que les solistes doivent rester camper sur leurs positions, cela n’aide pas à la ductilité de la voix et du propos musical.

À un manque de consignes musicales ? Sans doute aussi. Dans la fosse, le chef Daniele Callegari, actuel directeur musical de l’Opéra de Nice, semble peu inspiré, privilégiant les effets de masse orchestrale au détriment du phrasé sculpté de certaines phrases musicales, qui pourtant font la saveur de la musique de Verdi. De même, le dialogue entre la scène et la fosse semble inexistant, comme si la communication ne passait pas. Comme au football, les belles individualités, c’est bien, mais sans le collectif, ça ne sert à rien !

Inutile de vous dire que face à cette inertie et ce manque d’inspiration, le réalisateur vidéo est bien en peine de trouver des modes de cadrage inventifs. C’est ainsi qu’on peut voir des zooms avant et arrière répétés à l’envie ou encore des gros plans franchement disgracieux.

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Au final, on se console en se disant que le prochain opéra diffusé en direct du Metropolitan Opera de New-York sera Carmen, dans une mise en scène de Carrie Cracknell, avec le merveilleux Daniele Rustioni à la baguette et Aigul Akhmetshina dans le rôle-titre. Peut-être que là, ça bougera un peu plus !

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