COMPTE-RENDU – Après s’être donné en mai dernier au Théâtre de l’Athénée Louis-Jouvet (Paris) en version intimiste, le spectacle Street Art, porté par l’ensemble Les Apaches! et les free-runners Simon Nogueira, Johan Tonnoir et Andrea Catozzi, a investi avec talent et audace la grande galerie du Musée d’Orsay.
Street Art est un spectacle polymorphe, qui donne à voir autant autant qu’à entendre. Il élargit les espaces et repousse les limites, sans enfreindre aucune loi. Si une version work in progress avait été présentée au Théâtre de l’Athénée Louis-Jouvet en mai dernier, c’est un spectacle mature qui a pris pleinement possession de la galerie principale -gigantesque !- du Musée d’Orsay, les 6 et 7 février derniers. Et maintenant, le voilà gravé dans la roche, avec les honneurs d’une diffusion sur Arte Concert depuis le mercredi 12 juin !
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Côté pile
Pour cela, de nombreuses personnes et corps de métier ont été mobilisés : l’orchestre Les Apaches!, habitué aux aventures artistiques et dirigé avec brio et élégance par Julien Masmondet. Les free-runners Simon Nogueira, Johan Tonnoir et Andrea Catozzi, dont la spécialité est de courir partout, au sol comme en hauteur (surtout en hauteur, en fait), quelques soient les obstacles et les terrains, tout en se concentrant sur des mouvements esthétiques et acrobatiques.
Les compositeurs Nicolas Canot, Régis Campo, Steve Reich, Pascal Zavaro et Fabien Cali, pour une bande-son, interprétée en direct, très pulsatile et dynamique. Des moyens techniques élaborés, constitués d’un retraitement du son de haute qualité (bravo aux équipes de Nicolas Canot), d’un mapping vidéo de Cynwal Hoper s’inscrivant avec grâce et majesté dans les courbures métalliques de la Façade de l’Horloge du musée et des lumières magnifiques d’Arthur Semin, venant sublimer le lieu. Sans oublier une équipe technique fournie et professionnelle, qui a dû travailler à l’installation et au démontage d’un dispositif technique d’ampleur, ce en-dehors des heures d’ouverture du musée, c’est-à-dire le soir tard et une nuit entière pour le démontage.
Côté face
Au final, tous les éléments ont convergé vers une recherche commune d’ivresse de la liberté, dans une prise de risque contrôlée. La musique, puissante et incantatoire, a organisé le déroulement du temps. Sur ce tapis, les musiciens se sont déplacés, tantôt groupés tantôt éclatés, la violoniste Eva Zavaro se détachant par exemple magnifiquement en ombre chinoise, pour le Mouvement lent de Silicon Music, de Pascal Zavaro. Et les free-runners sont entrés en action, gambadant comme des lapins, avec grâce et légèreté. Habilement poursuivis par des lumières à très grande portée, ils ont évolué sur un banc de jardin public placé en avant-scène, couru sur les poutrelles métalliques du décor créé par l’ossature du musée, ou encore grimpé le long de l’horloge, comme paraissant défier l’apesanteur. Le temps de quatre représentations, le vaste hall de gare, construit par Victor Laloux en 1898 et transformé en grande galerie d’un des plus beaux musées de France, est devenu le décor onirique et vibrant d’un spectacle hors du commun dans lequel les expressions artistiques et techniques se sont fondues en un seul grand ensemble.
Assises par terre sur des coussins prêtés par le musée, de très nombreuses personnes ont assisté, attentives et réceptives, à cette proposition artistique qui repoussait les limites tout en ouvrant de nouveaux possibles.