AccueilSpectaclesComptes-rendus de spectacles - DansePeaky Blinders à la Seine Musicale : gang-stars

Peaky Blinders à la Seine Musicale : gang-stars

DANSE – Après une tournée triomphale outre-Manche, « Peaky Blinders: The Redemption of Thomas Shelby » débarque à la Seine Musicale, mobilisant dix-huit danseurs de la Rambert Dance Company. Un spectacle, plus conçu plus pour les fans, prêts à voir leurs gangsters exécuter des pas de danse, que pour les non-convertis à l’univers des Shelby. À découvrir jusqu’au 30 mars avant que les Peaky Blinders ne retournent à leurs occupations criminelles habituelles.

Qui aurait imaginé Thomas Shelby et sa famille s’essayer à la danse, si ce n’est le créateur lui-même, après sa rencontre fortuite avec le chorégraphe français Benoit Swan Pouffer sur un épisode de la série ?

Gangsters dancers

Les fans inconditionnels de « Peaky Blinders », cette série culte britannique, née en 2013 pour la BCC seront contents de retrouver leurs malfrats préférés. Les non-initiés, quant à eux, découvriront une pièce où la narration se perd entre deux pas de danse et risquent, par moment, de bâiller.  Il faut dire que Steven Knight, le papa de la série phénomène s’essaie à un exercice périlleux : condenser quatre saisons d’une violente saga mafieuse dans un Birmingham de l’après-guerre, en un ballet grand public de deux heures. Un pari risqué tant l’univers originel de la série, avec sa misère ouvrière crûment dépeinte, sa violence quasi-documentaire et son réalisme social semblent réfractaires à toute sorte de sublimation esthétique. 

© Johan Persson

On est loin, très loin de l’univers de la danse. Alors on fait comment ? Pour pallier cette incompatibilité apparente, la Rambert Dance Company déploie un arsenal d’inspirations chorégraphiques complètement hétéroclites, en puisant sans vergogne dans le hip-hop, le street jazz, la danse de cabaret, la danse contemporaine et bien d’autres registres encore. Le tout ponctué de combats millimétrés et de sauts périlleux qui tiennent plus de la prouesse technique que de la danse. 

Bande originale

Côté musique, trois musiciens dont un chanteur enchaînent avec un volume particulièrement élevé – surtout pour les spectateurs de l’orchestre – les titres de Radiohead, Anna Calvi, The Last Shadow Puppets, Black Rebel Motorcycle Club et bien sûr l’incontournable Red Right Hand de Nick Cave, devenu le générique de la série.

On note toutefois une mise en scène spectaculaire avec quelques effets pyrotechniques lors de l’incinération des morts, avec des décors et des costumes, fidèles à l’univers de la série. 

L’ADN « Shelby » dansé 

Vous l’aurez compris, ce clip géant ne se contente pas de condenser la série, mais plutôt de s’approprier son ADN pour explorer l’origine de la violence par le prisme de la danse. C’est pourquoi dès l’ouverture, nous sommes plongés dans les tranchées sanglantes des Flandres durant la première Guerre Mondiale avec une scène brutale, baignée de sang et de boyaux. Si Thomas Shelby et ses compagnons en ressortent physiquement indemnes, ils sont néanmoins condamnés à vivre une existence de damnés : « Vous êtes morts à l’intérieur. Votre humanité a saigné dans la neige » résonne au son de Devil Inside Me du groupe punk Frank Carter & The Rattlesnakes. 

© Johan Persson

La fumée dissipée, la suite raconte le retour de Thomas à la vie civile et son ascension criminelle à travers une vingtaine de tableaux, plus ou moins réussis, qui s’enchainent sans temps mort, mais parfois au détriment d’une fluidité narrative. Heureusement une voix off assure la transition entre chaque tableau. L’action nous transporte des bars enfumés de Birmingham à une fête foraine en passant par un cabaret où Thomas rencontre Grace (incarnée avec sensualité par Naya Lovel) – unique parenthèse lumineuse dans cette fresque sombre. Cette histoire d’amour est bâclée en moins de trente minutes car Grace se fait tuer le jour de son mariage, sacrifiant la progression émotionnelle présente dans la série, où son meurtre survient beaucoup plus tard. Dans cette première partie, la danse semble davantage illustrer le récit plutôt que le porter, alternant maladroitement entre hip-hop, contemporain et cabaret. La chorégraphie peine à trouver son identité. 

Gang-star

La seconde partie est nettement plus convaincante côté danse, malgré quelques longueurs. La scène où Thomas fume de l’opium s’éternise. Concrètement, c’est lorsqu’elle explore les tourments intérieurs de Thomas que la chorégraphie trouve sa place. 

Le danseur Conor Keerigan, incarnant Thomas, réussit alors la prouesse de faire oublier l’absence de Cillian Murphy et de ses magnifiques yeux bleus en dansant sacrément bien, lors de son duo avec son ancien frère d’armes. Une performance d’autant plus remarquable à côté des autres personnages qui manquent de profondeur. 

© Johan Persson

Le final, porté par le tube Red Right Hand mérite amplement son standing ovation, offrant une danse hypnotique et synchronisée, qui faisait défaut aux séquences plus décousues du début. 

À lire également : Seine Musicale : il était une fois Ennio

En attendant l’ultime opus cinématographique – comme pour Downtown Abbey – qui viendra clôturer la saga des Shelby, ce spectacle fait office d’en-cas pour maintenir les fans sur la brèche, tout en laissant les néophytes quelque peu sur le bas-côté. On repart néanmoins content avec l’une des fameuses casquettes en guise de souvenir. Un coup marketing bien pensé, il faut l’admettre.  Et puis l’essentiel, peut-être, malgré les imperfections du spectacle, c’est que les fans de « Peaky-Blinders » ont découvert le fascinant univers de la danse contemporaine et du hip-hop. 

Sur le même thème

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.

Vidêos Classykêo

Articles sponsorisés

Nos coups de cœurs

Derniers articles

Newsletter

Twitter

[custom-twitter-feeds]