AccueilA la UneBoléro Busk Strong, Genève au Châtelet

Boléro Busk Strong, Genève au Châtelet

DANSE – Le Ballet du Grand Théâtre de Genève présente un second programme époustouflant au Théâtre du Châtelet, réunissant trois œuvres marquantes qui explorent les énergies corporelles, signées par des figures incontournables de la danse contemporaine. Une soirée hypnotique qui permet d’apprécier la virtuosité technique et expressive de cette compagnie de premier plan.

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Le Boléro – danser avant de mourir

Ce « Boléro », création pour le Ballet de l’Opéra de Paris du duo Sidi Larbi Cherkaoui & Damien Jalet, associés à la plasticienne star Marina Abramović, sur commande de Brigitte Lefèvre en 2013 est un pari audacieux : revisiter le mythique Boléro de Ravel et celui de Béjart. Une version qui, douze ans après, continue de séduire le public par sa beauté formelle et sa fluidité contemplative. Sur scène, les danseurs font leur entrée dans de longs manteaux noirs, qu’ils abandonnent pour révéler des costumes en tulle stretch de couleur chair, signés Riccardo Tisci, l’ancien directeur artistique de Givenchy. Ces tenues transparentes dont les os sont brodés, évoquant des squelettes sont complétées par des visages parés de dentelles noires. L’ensemble évoque irrésistiblement l’iconographie de « La Calavera Catrina », cette « personnification mexicaine folklorique de la Fête des Morts » comme le souligne Cherkaoui.

Convoquant la transe, les danseurs exécutent un rituel hypnotique proche de celui des derviches tourneurs. L’imposant miroir conçu par Marina Abramović reflète les mouvements, nous offrant une perspective différente de la chorégraphie. Le spectateur se surprend à souvent fixer ce reflet plutôt que la scène elle-même, le miroir démultipliant les perspectives, brouillant les repères entre réalité et rêve et ouvrant vers un ailleurs cosmique.

La spirale, motif central de leur vision, organise toute la chorégraphie. Exit l’interprète central pour faire place à onze danseurs – et non douze – gravitant autour d’un centre magnétique vide. Les corps tournent sur eux-mêmes et autour des autres, se cherchent, s’entrelacent et sont irrésistiblement attirés par ce point central, chacun en orbite par rapport aux autres. Le tableau d’une grande beauté est visuellement saisissant et continue de nous emporter dans son tourbillon pour rester gravé dans nos mémoires.

Busk – danser pour s’exprimer

Bien moins connue en France que Cherkaoui ou Eyal, la chorégraphe canadienne Aszure Barton, formée à l’École nationale de ballet de Toronto, crée pourtant depuis longtemps pour des compagnies renommées tels que l’Alvin Ailey American Dance Theater, ou encore l’English National Ballet. Mikhail Baryshnikov la considère même comme « l’une des chorégraphes les plus innovantes de sa génération. » Dans Busk, créée en 2009, l’une des œuvres majeures de son répertoire, elle explore le corps dans toutes ses facettes, l’amenant à effectuer simultanément plusieurs tâches : mouvements des yeux, des orteils ou de la langue dans une chorégraphie exigeant une extrême concentration et reposant sur des systèmes de mouvements complexes.

Le titre fait référence tant au verbe espagnol « buscar » (chercher) qu’à l’expression anglaise « to busk » (se produire dans la rue). Sur scène, les danseurs apparaissent tels des artistes énigmatiques, rappelant une confrérie de moines, vêtus de vêtements amples avec des capuchons noirs, qui parfois dissimulent leurs visages. La dimension spirituelle devient d’autant plus forte, lorsque la musique inspirée de Camille Saint-Saëns, prend des airs mystiques, transformant la chorégraphie en sorte de cérémonie quasi religieuse.

Strong – danser jusqu’à épuisement

Strong créé en 2019 pour le Ballet d’État de Berlin par Sharon Eyal, chorégraphe omniprésente sur la scène parisienne, s’ouvre sur des bavardages entre danseurs, avant que la musique électro couvre leurs voix, tandis qu’une lumière révèle progressivement les visages des interprètes regroupés dans un coin de la scène. Les danseurs, vêtus de collants noirs transparents, de slips, et pour les femmes de soutiens gorges noirs, bougent d’abord lentement à l’unisson avant de se détacher un par un du groupe, parfois par quelques soubresauts nerveux. Difficile de distinguer les hommes des femmes dans cette uniformité troublante. Sur des pulsations bien marquées, la photo de groupe évolue, passant d’un agrégat compact à de saisissantes lignes géométriques en V et diagonales où les danseurs piétinent sur place, positionnant leurs bras comme s’ils tenaient des fusils – séquence horrifique. Ces tableaux fugaces se dissolvent ensuite dans l’espace, créant un flux perpétuel de transformations.

Avec ces trois œuvres, on reste scotché par cette énergie vitale sans faille où les danseurs poussent leurs corps parfois jusqu’à l’épuisement et la douleur, accentuant la dimension tribale de la danse et créant ainsi une communion hypnotique entre les interprètes et le public.

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