CONCERT – La jeune prodige russe Alexandra Dovgan offre à Aix-en-Provence un récital de haute volée autour de la sonate, qui enflamme Campra. Attention, chaud devant !
Comme ça arrive désormais régulièrement, le Festival de Pâques s’installe ce soir dans le bel auditorium Campra du Conservatoire Darius Milhaud d’Aix-en-Provence. Le public est venu en nombre – la salle est quasi-comble – pour écouter la jeune prodige Alexandra Dovgan, 17 ans, dans un magnifique programme centré autour de la sonate romantique, par ceux qui lui ont donné ses formes les plus abouties : Beethoven, Schumann et Prokofiev, complété par le Prélude, Choral et Fugue de Franck.

Le volcan Beethoven
Alexandra Dovgan ouvre le bal avec la Sonate n°31 en La bémol majeur, Op. 110 de Beethoven. Une œuvre délicate, l’une des dernières du compositeur, à la fois à l’apogée de son art et au plus profond de son isolement consécutif à la surdité, à laquelle le jeu intense et réfléchi d’Alexandra Dovgan convient admirablement. Si l’adagio a pu manquer d’un peu de lyrisme, on apprécie la tension latente qu’elle a su donner au premier mouvement (moderato cantabile et molto espressivo) et la maîtrise du contrepoint dans la fugue finale. Elle met également à profit ces qualités d’exécution dans l’éclatante Sonate n°2 en sol mineur, Op. 22 de Schumann, qui offre de surcroît plus de matière à son impressionnante virtuosité pour s’épancher.

Feu Franck
La deuxième partie s’ouvre avec le fameux Prélude, Choral et Fugue FWV 21 de Franck. Une œuvre dont la sonorité, évoquant les grandes orgues ponctuées de cloches d’église, appelle une solennité intérieure qui ne semble pas beaucoup correspondre à l’humeur d’Alexandra Dovgan ce soir, sans doute emportée par la fougue de sa jeunesse. L’exécution reste néanmoins d’une précision méticuleuse, et toujours avec cette même intensité. Son tempérament fonctionne à merveille, en revanche, dans la Sonate n°2 en Ré mineur, Op. 14 de Prokofiev, qui conclut ce programme aussi dense qu’ambitieux. De l’allegro très percussif au décapant vivace du finale, Alexandra Dovgan montre ici qu’elle est véritablement dans son univers, déployant son jeu flamboyant, et toujours très réfléchi, quasiment cérébral.
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Décidément infatigable, elle interprète en rappel le redoutable Andante spianato et Grande Polonaise Brillante, Op. 22 de Chopin. Voulant peut-être apaiser les esprits après tant d’émotions, elle termine par le célèbre choral de Bach Jésus, que ma joie demeure, où elle démontre encore une fois sa maîtrise du contrepoint et des plans sonores. Le concert se conclut sur les applaudissements chaleureux du public, manifestement conquis.
Demandez le programme !
- L.V. Beethoven – Sonate pour piano n° 31 en la bémol majeur, op. 110
- R. Schumann – Sonate pour piano n° 2 en sol mineur, op. 22
- C. Franck – Prélude, Choral et Fugue, FWV 21
- S. Prokofiev – Sonate pour piano n° 2 en ré mineur, op. 14

