Nomad, une oasis de danse 

DANSE – Le bien nommé NOMAD (spectacle de Chaillot à la Maison des Arts et de la Culture de Créteil) est un voyage visuel et sonore mais surtout émotionnel et spirituel signé par l’un des chorégraphes phares de sa génération.

Sidi Larbi Cherkaoui invoque différents éléments de la nature dans un désert aride. La danse devient alors un formidable outil de communication dans un environnement hostile pour former une communauté de gens qui s’entraident pour survivre…

Cherkaoui – la diversité au cœur de ses créations 

On ne présente plus le chorégraphe Sidi Larbi Cherkaoui, incontournable depuis sa révélation au grand public en 2000 pour sa pièce d’envergure Rien de rien, lauréate de plusieurs prix. A la fois directeur artistique du Ballet du Grand Théâtre de Genève (où il signe aussi des opéras) depuis 2022 et de sa compagnie Eastman, il n’a cessé de se réinventer en créant plus d’une cinquantaine de pièces dont la plupart explorent l’identité multiculturelle autant que la diversité de notre monde. Ne connaissant pas de traversée du désert en terme artistique et de succès, il a également collaboré récemment sur la chorégraphie du Celebration Tour de Madonna, une de ses idoles, et signé celle de Starmania mise en scène par Thomas Joly. Aujourd’hui il nous présente NOMAD inspiré du désert pour quelques dates à la MAC (Maison des arts de Créteil). 

À Lire également : Idomeneo à Genève​, histoire de fils pour l’histoire d’un fils (mise en scène par Sidi Larbi Cherkaoui) & Starmania, le GRAND retour

Cette création de 2019 avec la compagnie Eastman vient d’une collaboration de Sidi Larbi Cherkaoui avec le directeur artistique de la compagnie 420PEOPLE, Václav Kuneš au cours du festival de danse tchèque Tanec Praha en 2017. Cherkaoui décide alors de reconstituer une mosaïque d’éléments animés et inanimés du désert. Bref et en d’autres termes : une faune et une flore constituées de danseurs.

Bouger pour survivre dans un désert aride 

La scène est complètement épurée avec pour seul décor une grande toile de cinéma représentant un désert au sol craquelé par la sécheresse qui change de couleur au fur et à mesure des tableaux : il fait grand soleil, il pleut, il fait nuit, il devient rouge le temps d’un orage, …. Cette image de fond nous donne alors l’ambiance du tableau qui se joue. Les dix interprètes quant à eux incarnent littéralement la faune et la flore soumis aux éléments naturels tels que le vent, le soleil, les inondations, les tempêtes de sable et même la bombe atomique (les ultimes menaces de désertification de notre culture et de notre planète). Les danseurs y sont magistraux dans le rôle de ces créatures nomades qui tentent de s’adapter tant bien que mal à l’hostilité du désert. Ils marchent, dansent et ne s’arrêtent jamais. Ils apprivoisent la nature selon la situation climatique et se métamorphosent pour y survivre avec l’aide de costumes, dessinés par le costumier Jan-Jan Van Essche, aux couleurs sombres (noir, bordeaux, marron) qui rappellent ceux des habitants du désert. On retiendra particulièrement le tableau où des danseurs ont leurs pieds et leurs mains sur des échasses créant des figures mi-animales mi-humaines ressemblant étrangement aux individus de la planète Tatooine dans Star Wars ou encore cet homme qui danse jusqu’à devenir un chamane géant. Mais le tableau le plus émouvant est celui où les danseurs quasi-nus (avec seuls leurs sous-vêtements blancs) se recouvrent d’argile et se meuvent avec grâce et agilité sur ce sol aride. Comme le dit Cherkaoui dans plusieurs interviews : « il faut bouger comme un serpent dans le désert, si on arrête de bouger, on meurt ». 

à l’aise glaise (© Filip Van Roe)

Le spectacle montre aussi l’importance de former une communauté pour survivre malgré nos différences culturelles, et combien la danse qui passe par le corps est un formidable outil de communication. Marcher dans l’hostilité mais en groupe : de quoi sortir du désert de l’oubli et de l’indifférence. Ce spectacle résonne d’autant plus pour les danseurs qui l’interprètent car ils sont tous des voyageurs, des réfugiés ou des migrants

Une plongée spirituelle alliant musique électronique et chants sacrés soufis

La force de NOMAD provient aussi d’une bande-son prenante qui allie à la fois une musique électronique et des chants sacrés soufis et chamaniques avec des sonorités africaines et arabisantes signées par le compositeur Felix Buxton de Basement Jaxx, qui nous plonge dans un voyage spirituel. La musique accompagne les tableaux qui se succèdent avec une fluidité impressionnante. Dans un premier temps, la musique électronique allie celle des éléments naturels (bruits de pluie, de tonnerres, d’animaux …) pour tendre peu à peu vers des chants chamaniques en faisant ressortir un maximum d’émotion chez le spectateur. Difficile de retenir ses larmes, difficile de savoir vraiment pourquoi (et pourquoi pas : même si elles vont arroser le désert). La lumière se plaque sur la musique : tamisée d’abord, de plus en plus blanche, marquant aussi cette élévation vers le spirituel. 

Nomad est un spectacle d’une grande beauté d’où on sort le souffle coupé mais surtout un voyage spirituel qui vaut bien le déplacement jusqu’au fin fond du désert, ou bien plus près : à Créteil.

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