Casadesus à Aix : action, vérité

CONCERT – Jean-Claude Casadesus, figure généreuse et humaniste de la musique, entoure la jeune violoniste danoise Anna Egholm, de l’écrin vibrant et soyeux de l’Orchestre de Lettonie. Un concert action, vérité et surtout pas chiche !

Jeu de haute société

Le programme de cette troisième soirée du Festival de Pâques, après un démarrage dans les douceurs de la musique de chambre, poursuit la vocation cardinale d’une grande salle de concert : accueillir de grands orchestres symphoniques, comme autant de porte-parole de la vie musicale, aux quatre coins du Monde. Les œuvres sélectionnées sont représentatives des pistes les plus fécondes du romantisme, entre virtuosité et expressivité, structure et couleur, musique pure et musique à programme, aux frontières souvent indistinctes.

Anna Egholm : action !

Avec sa robe de lumière et de sirène, la violoniste Anna Egholm attire à elle la musique plus qu’elle ne l’interprète : une véritable prise de son. Un échange serré entre elle et l’œuvre est au principe de l’attaque et de l’entretien de son archet, arme habile et précieuse avec laquelle elle décoche traits virtuoses et mélodies poignantes. Le jeu est d’une beauté farouche, allant chercher couleurs inouïes et modes de jeu audacieux. Si l’atteinte du suraigu, pianissimo comme fortissimo, se fait dans la prise de risque, l’impulsivité, le médium est le noyau expressif de son jeu. C’est là qu’elle se raconte, comme une trobairitz (femme troubadour). L’effet « tricotage », propre aux traits de virtuosité du troisième mouvement, est évité, par la façon qu’a la violoniste d’insérer des accents, des couleurs et des contrastes dans le déroulement du discours. Un rappel, à la demande enthousiaste du public, permet de confirmer cette manière de faire avec la musique : un extrait de la sonate l’Aurore, op.27, d’Eugène Ysaye, « avec ses chants d’oiseaux et ses bruits d’insectes ».

© Caroline Doutre / Festival de Pâques
Jean-Claude Casadesus : vérité

Jean-Claude Casadesus impressionne et émeut, avec son élégance, sa présence, au croisement du charisme et du métier. Depuis son estrade et son pupitre, il est un passeur soucieux de transmettre l’héritage musical, romantique ce soir, d’une rive à l’autre, d’une vie à l’autre. Sa gestuelle relève de l’artisanat d’art, de l’art de tailler la pierre, de ciseler le métal, de souffler le verre. Il contrôle le rythme étroitement, puis lui rend sa liberté, laissant à la cohérence de l’écriture le soin de guider intuitivement le jeu. Son expressivité relève de l’art du conte, de la narration, qui fait de chaque pupitre, voire de chaque instrument, notamment dans Shéhérazade, une source d’évocation. Les percussions miment le battement du cœur, les vents le flux vital et les cordes le tissu conjonctif, le chef s’attachant à révéler la nature et le potentiel de chaque instrument, dont l’émouvante violoniste super-soliste. Au service d’Anna Egholm, dans Mendelssohn, cet art du son et du sens gagne en transparence, en légèreté : rien ne pèse, rien ne s’appesantit, tout concoure à faire de la phalange Lettone un écrin protecteur ainsi qu’un grand écran.

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Le public est suspendu aux cordes du violon, sous le charme de ces romances sans parole, aux mille et une pages. Il salue, aussi longuement que dure un générique de fin, ce moment de vérité romantique, volé au mensonge du quotidien.

Demandez le programme !

  • C.M. von Weber – Oberon (Ouverture)
  • F. Mendelssohn – Concerto pour violon en mi mineur, op. 64
  • N. Rimski-Korsakov – Shéhérazade, op. 35
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