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La Playlist classique d’Agnès Jaoui

PLAYLIST – Elle vient de signer la mise en scène de l’Uomo Femina, crée à l’Opéra de Dijon. Mais ce n’est pas tout ! Si vous aimez Agnès Jaoui, si vous suivez sa filmographie, vous savez qu’elle fait rarement un film sans mettre de la musique classique dans sa bande-son. Mélomane, sensible, et musicienne elle-même, la comédienne / réalisatrice / chanteuse / femme très stylée nous confie ses amours musicales, qui se conjuguent au féminin. Si, si ! Voici la playlist d’Agnès Jaoui.

An Die Musik – Schubert par Elisabeth Schwarzkopf

« Pour la musique classique, on est toujours un peu attachés à des versions spécifiques. C’est comme le couscous de sa mère : ça vous marque à jamais ! Et Schwarzkopf, pour moi c’est ça. And die Music est un des lieder avec lesquels j’ai commencé au conservatoire du 7e arrondissement, et je me souviens de ce moment où on sent que la voix est en train de faire son chemin, que quelque chose de nouveau se passe dans le corps. Comme souvent avec Schubert, la simple mélodie me fait pleurer, et je n’ai d’ailleurs su les paroles que plus tard. J’ai utilisé ce lied ensuite dans mon film Comme une Image. Le personnage de Marie-Lou Berry l’étudiait comme je l’étudiais quand j’étais jeune, et ça la consolait comme ça me consolait… »

Zefiro torna – Monteverdi par Nadia Boulanger

« J’adore ce morceau ! Et tout Monteverdi d’ailleurs : c’est complètement fou ! La beauté des Lamenti… Dans ce cas-là, quand j’ai entendu cet enregistrement de Nadia Boulanger, je me suis dit : « voilà une femme dont on entend tant parler, qui a fasciné tant de gens, compté dans la vie de tant d’artistes, de Ravel à Quincy Jones. Quelle femme ça a du être ! » Mais alors l’entendre jouer du piano, dans cette version, cette différence incroyable avec les conventions d’interprétations d’aujourd’hui, qui décale presque la temporalité de l’œuvre elle-même, c’était très étonnant. C’est comme les bandes-son de certains films, ça marque une époque. »

Tosca – Puccini, Cantate de l’Acte 2

« J’ai mis en scène Tosca en 2019. C’est fou. Tout cet opéra est fou. C’est une œuvre incroyable, mais alors ce moment de double espace, où il se passe deux choses dans deux espaces différents, avec un tel décalage entre la piété du chant et l’horreur de la scène de torture qui se prépare… C’est du cinéma en fait ! Ça montre tout de l’hypocrisie du pouvoir : pendant qu’ils le torturent ils chantent un air religieux. Sans en avoir jamais joué, j’adore la tragédie et ses récits plus grand que nature. Moi si je pleure à Tosca, à Butterfly, c’est parce qu’il y a quand-même un endroit en moi qui s’identifie à ce qui s’y déroule. Je n’invente rien là, mais étrangement, ça fait du bien de pleurer avec Tosca. Et la musique est d’une beauté folle… »

Kindertotenlieder, n°4 : Oft denk’ ich, sie sind nur ausgegangen – Mahler par Kathleen Ferrier 

« Allez, on fait plus joyeux (rires) ! D’abord Kathleen Ferrer, c’est une voix d’ailleurs. Une interprétation d’ailleurs aussi… C’est drôle, parce qu’avec toutes nos questions sur le genre, là on est dans un féminin-masculin, un neutre quasi divin en fait ! On est pas beaucoup plus tard que la création de l’œuvre, et de la tragédie de ces poèmes qu’Alma Mahler (l’épouse de Gustav Mahler) ne voulait pas que son mari mette en musique, de peur que ça porte malheur à leur fille. Trois ans plus tard, Anna-Maria, 5 ans, succombait à la scarlatine… »

Ich wollt, meine Lieb ergösse sich – Mendelssohn par Karine Deshayes et Delphine Haida

« Allez, cette fois on fait vraiment joyeux ! D’abord, il y a le travail des voix ensemble qui me bouleverse, qui m’a incroyablement séduit chez les Beatles, et dont je me suis rendu compte à un moment que ça existait partout, de Monteverdi à Bach, et à Mendelssohn. Deux voix ensemble qui produisent quelque chose de magique, de plus grand qu’elles. J’ai utilisé une vieille version de ce lied dans le Goût des Autres. J’avais aussi été récitante sur le Songe d’une Nuit d’été au Théâtre des Champs-Élysées, avec un bonheur fou. Je me souviens de mon étonnement quand j’ai appris que Mendelssohn avait redécouvert Bach, dans le siècle suivant sa mort. J’étais surprise de voir à quel point l’histoire peut décider de refouler un compositeur comme Bach, sous le seul prétexte qu’il est passé de mode. Et puis c’est Mendelssohn, ce garçon à la santé fragile, et pourtant brillant. »

À lire également : L’Uomo Femina : opéra déconstruit

« Maintenant qu’on en parle, c’est vrai que la fragilité est presque le thème de ma playlist. Et c’est vrai que c’est ce qui me touche le plus, comme une expression du plus profond de la nature humaine. Quelque chose d’indicible, de fortement mélancolique que la musique, comme personne, arrive à exprimer et à sublimer. »

L’Uomo Femina, mis en scène par Agnès Jaoui, est à l’affiche de l’Opéra Royal de Versailles du 13 au 15 décembre 2024

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