DANSE – Une fois n’est pas coutume, le ballet de l’Opéra de Paris se délocalise au New York City Center pour présenter la nouvelle pièce d’Hofesh Shechter, Red Carpet, créée au printemps à Paris. « Entre Glamour et Grotesque » (note de programme) Hofesh Shechter et ses danseurs réinventent alors les codes de la danse, et de la mode.
Le Rouge et le Noir
Comme son nom l’indique, cette nouvelle pièce d’Hofesh Shechter prend pour élément central le « tapis rouge », et si pour la France ce mot indique surtout les marches à Cannes, il prend pour le chorégraphe israélien une myriade d’autres évocations, et à première vue la moquette abîmée des hôtels surannés ou des loges trop usées. Pour le ballet de l’Opéra, on pense aussi bien sûr au charme de Garnier, où le rouge passé côtoie des moulures dorées parfois un peu poussiéreuses.
Sur scène, les treize danseurs forment autant de réincarnations de ces mythes déchus, à savoir : la danse classique (l’Opéra de Paris), la haute couture (Chanel fait les costumes), l’art pour l’art. On est peut-être un peu dur mais il faut bien se rappeler les mots d’Hofesh Shechter qui se veut « entre le glamour et le grotesque » et qui nous donne bien les deux.
Loin des moqueries, l’héroïne de cette soirée semble alors être révélée derrière les couches de rideau, à travers une mini-scène qui accentue la perspective et où se trouve le quatuor de musiciens, tous absolument excellents. Alors qu’Hofesh Shechter s’amuse à se jouer de ses danseurs, tournant sans fin autour d’un gigantesque lustre, la musique reste donc bien l’objet d’une telle célébration.

En scène
Hofesh Shechter s’est fait un nom de scène dans le milieu de la danse à travers des pièces mêlant univers hyperpolitique, musique sur scène, et danseurs de talents. De compositeur niche, il est devenu plus connu du grand public avec En corps de Cédric Klapish, comédie romantique qui a révélé la danseuse Marion Barbeau en actrice.

Avec sa dizaine de danseurs, Red Carpet semble d’une certaine manière bien plus modeste, tout en revenant aux fondamentaux esthétiques du chorégraphe. Le groupe éclectique que l’on voit sur scène et surtout un groupe de talents où les danseurs ont (chose rare pour l’opéra !) chacun une véritable identité au sein d’un groupe qui se fait et se défait, visuellement et physiquement : on commence avec les robes Chanel et les paillettes et l’on finit en justaucorps chair.
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Et parmi tous ses danseurs exceptionnels on retiendra deux images, pour leur compréhension presque instinctive du langage du chorégraphe : le mohawk de Loup-Marcault Derouard et la robe rouge de Caroline Osmont, en Chanel ou dans la lumière crue de l’avant-scène.

