CONCERT – La semaine sainte, période empreinte d’une profonde spiritualité dans le christianisme, culmine dans la célébration de la résurrection du Christ. C’est dans ce cadre que le centre culturel Flagey, à défaut d’organiser une chasse aux œufs, accueille son public pour un concert concentré, mais jubilatoire.
Jesus is Bach
En clôture de cette semaine sainte, l’Oratorio de Pâques de Bach retentit au Studio 4, porté par les chœurs de la Radio Flamande et PRJCT Amsterdam sous la direction de Maarten Engeltjes (contre- ténor). Cet événement marque non seulement la fin de la trilogie des œuvres de Bach dédiées aux derniers jours du Christ, mais aussi la résurrection d’une partition lumineuse servie avec ferveur. Pendant environ deux heures (le temps d’une longue messe), tout est accompli.
Christ lag in Todesbanden
Composée en 1706, la première cantate du programme s’appuie sur les sept strophes de l’hymne de Martin Luther, chant pascal central de la liturgie luthérienne nommé Erfurt Enchiridion (1524). Si le titre annonce le destin tragique (Le Christ gisait dans les liens de la mort), l’ambiance est à la concentration. Le chœur de la Radio Flamande, entourant les solistes et musiciens du PRJCT Amsterdam, offre une puissance profonde et solennelle. Ils sont rejoints par les solistes soprano et contre-ténor pour Den Tod niemand zwingen kunnt (deuxième strophe) et So feiern wir das hohe Fest (septième strophe). La performance d’Ilse Eerens (soprano) et Maarten Engeltjes (contre-ténor) apporte une dimension éthérée à l’œuvre.
Et puis, c’est l’heure de la surprise ! Le chef, initialement à la baguette pour les premières cantates, se retourne vers le public pour chanter, avant de s’unir en harmonie avec Ilse Eerens. Cette dernière, voix limpide et cristalline empreinte d’une générosité et d’une prosodie caractéristique du baroque allemand, fusionne avec le timbre boisé et souple du contre-ténor. Maarten Engeltjes, avec ses notes pures et tenues, élève sa voix vers le sublime. Et Dieu vit que cela était bon ! Accompagnés d’un ensemble en formation restreinte (orgue en ponctuation), la passion se mêle à la sobriété et la sérénité de la tradition luthérienne.
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Les choses sérieuses : l’Oratorio de Pâques
La citation de Hans Georg Nägeli en 1817 décrit l’oratorio de Pâques comme « la plus grande œuvre musicale de tous les temps et de tous les peuples », soulignant ainsi l’universalité de sa profondeur. Présenté pour la première fois en 1725, il met en scène quatre solistes incarnant les figures de Jean, Marie Madeleine, Maria Jacobi (fille d’Anne, sœur ou demi-sœur de la Vierge) et Pierre.
Cet oratorio pourrait être perçu comme une œuvre de réutilisation ou de recyclage, reprennent des éléments de compositions antérieures dont Bach a peaufiné la composition, les élevant au rang d’oratorio, et y ajoutant ultérieurement un troisième mouvement et enrichissant l’œuvre d’une texture vocale plus grave. Dans cette interprétation, d’Ilse Eerens (soprano) mène le bal, orientée vers les hautes sphères d’une voix toujours limpide. Par l’appui expressif et généreux de Fabio Trümphy (ténor), l’interprétation se trouve renforcée par les nuances de respiration qui épousent les ondulations cycliques caractéristiques de Bach. L’exécution, vibrante et presque théâtrale, est renforcée par la présence de Maarten Engeltjes (contre-ténor), et d’une basse du chœur de la radio flamande, dont la profondeur vocale ajoute une dimension essentielle à l’ensemble. On notera la qualité d’exécution de l’ensemble PRJCT Amsterdam, l’énergie jubilatoire de la célébration Pasquale comme fer de lance.
Une chance pour les amateurs de musique religieuse : nouvelle année, nouveau calendrier ! Jesus will be Bach (again) !