DISQUE – L’ensemble de musique ancienne Canticum Novum livre son nouveau programme original, une plongée dans le Moyen-orient mystique du XVIe siècle. Ce nouveau disque parait le 24 juin sous le label du Centre Culturel de rencontre d’Ambronay.
Grenade, Andalousie, le 2 janvier 1492. Pendant que Christophe Colomb, déboussolé, se promène sur l’océan atlantique, tout près d’offrir à l’Europe un nouveau monde, la civilisation arabo-andalouse plonge dans les abîmes de l’ancien. La Reconquista espagnole achève d’imposer une Andalousie chrétienne, et les Musulmans, qui vivent là depuis des siècles, sont jetés sur les routes d’un nouvel exode.
Alep, la cosmopolite
Or c’est vieux comme la Bible : qui dit exode, dit terre promise. Et c’est en Syrie que ça se passe, à Alep, précisément. Alep, la ville martyre de l’horrible guerre civile débutée en 2011, était alors une cité prospère, au bout de la route de la soie. Une ville capable d’absorber tout ce que l’ancien monde avait dans ses bagages: misère et richesse, splendeur et décadence. En quelques années, elle devient un lieu de brassage intense, un carrefour des cultures, un espace commun où toutes les langues du Moyen-orient, tous les dialectes de l’arabe apprenaient à se comprendre. Et les artistes avec.
Le nouvel album de Canticum Novum, Samâ-ï, paru sous le label du Centre Culturel de rencontre d’Ambronay, est un hommage à ce moment précis de l’histoire du Moyen-Orient où le monde méditerranéen s’est retrouvé, au même endroit, au même moment. Samâ-ï est un voyage entre les rives Est et Ouest de la Méditerranée, de l’Espagne à la Perse. Comme d’habitude avec l’ensemble fondé par Emmanuel Bardon, la musique que l’on y entend est le fruit d’un travail d’archéologie musicale, pour une reconstitution au plus près de la vérité historique. Ce programme est enrichi des créations inédites de l’oudiste syrien Bayan Rida, qui a intégré en 2019 le collectif de Canticum Novum
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Des voix d’un autre monde, mystérieuses et envoûtantes, une liste d’instruments à faire pâlir un musée
Message de paix et musiques envoutantes
Mais la magie de cet enregistrement n’est pas là. Elle n’est même pas dans la belle histoire de métissage dont elle rend compte. C’est avant tout cela, de la très, très belle musique. Bien sûr, si, comme nous, vous êtes sensibles au beau message de paix que transmet cet album, votre écoute atteindra les hautes sphères. Mais si vous ouvrez le disque sans même avoir jeté un œil à son livret explicatif, vous ne perdrez rien à l’expérience. Des voix d’un autre monde, mystérieuses et envoûtantes, une liste d’instruments à faire pâlir un musée : tout dans cet album est une invitation au voyage. Alors oui, il faut être un peu sensible à l’esthétique. Oui, ça ne s’écoute pas comme un opéra de Rossini. Oui, on ne dansera pas la java. Mais on y trouvera peut-être la paix…
Pourquoi on aime ?
- Pour le message évidemment. Quand le passé éclaire le présent…
- Samâ-ï veut dire « écoute spirituelle » en arabe. Il y a effectivement quelque chose de mystique dans cette musique.
- Pour la qualité constante des programmes de Canticum Novum, qui arrive toujours à se renouveler après 26 ans d’existence !