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Room : le lâcher-prise électrique !

SPECTACLE – Présentée en ce moment au Théâtre de la Ville, Room est la dernière folie chaotique de James Thierrée. Elle raconte « l’histoire d’un mec » qui a décidé de faire rentrer toutes ses idées artistiques dans une même pièce. Musique, danse, acrobaties : tout est bon pour servir l’émotion !

James Thierrée: késako ?
Il a l’air si calme vu comme ça… ©DR

Tout le monde le connaît comme le petit fils de Chaplin. Et pourtant, un peu touche à tout, James Thierrée, n’est pas seulement le petit fils de, mais un artiste de talent qui a tellement de cordes à son arc, qu’il est facile d’en oublier quelques-unes : comédien, danseur, musicien, chanteur, metteur en scène et même acrobate. Il faut dire qu’il est tombé dans la marmite des saltimbanques à l’âge de quatre ans, où il jouait déjà dans le Cirque Imaginaire de ses parents. Il y apprend un peu tout, avant de voler de ses propres ailes en fondant sa compagnie à seulement 24 ans : La Compagnie du Hanneton. En 2006, c’est l’apogée, il remporte trois Molières pour son premier spectacle La Symphonie du Hanneton qu’il jouera pendant plus de 7 ans. Puis les succès s’enchaînent. Aujourd’hui, quatre ans après le très marquant « Frôlons », sa dernière création à l’Opéra de Paris, James Thierrée revient au Théâtre du Châtelet pour son nouveau spectacle, Room, où il décide d’explorer son âme d’enfant et de se faire kiffer en jetant toutes ses idées artistiques dans une pièce. N’ayant plus rien à prouver grâce à un fan club déjà bien établi, il pouvait prendre tous les risques et créer un chaos hypnotique. 

Room : un bon débarras

Tout d’abord, Room comme son nom l’indique, c’est avant tout une pièce un peu magique où tout est possible et où tous les arts peuvent être pratiqués, sans aucune hiérarchie. Les idées de chorégraphie, de musique et de personnages foisonnent. Tout d’abord cette pièce a une allure particulière et pourrait appartenir à une maison gothique d’un film de Tim Burton. Elle contient des murs abimés, des portes fracassées, de curieux instruments de musique, des cadres de tableaux, et de vieux meubles. Et tous ses objets ont la bougeotte, comme dans une maison hantée : ils passent leurs temps à décamper et à réapparaître. Par exemple, les murs, qui se déconstruisent et se reconstruisent à l’infini, finissent par ne plus avoir aucun secret pour le spectateur qui les observe sous toutes leurs facettes. Le metteur en scène voulait « une maquette grandeur nature qui reste un jouet ». C’est chose faite, car ce décor devient un terrain de jeu XXL qui ferait le bonheur d’un enfant.

Savant fou, avant tout

James Thierrée accapare la scène avec son allure de dandy d’un autre siècle et ses cheveux blancs ébouriffés. Cependant il s’entoure de jeunes et jolis disciples : treize jeunes danseurs, acteurs, musiciens apportant un vent de fraîcheur. Au début, il joue le rôle d’un architecte un peu déjanté accompagné d’assistants qui dessine des plans afin d’organiser ses murs en une pièce. Mais tout semble déraper et l’architecte ne contrôle plus rien. Il se mue alors en pantin désarticulé entre les mains des machinistes. D’architecte, il passe au rôle de metteur en scène qui pilote tant bien que mal une bande d’acteurs rebelles puis au rôle de chef d’orchestre dirigeant des musiciens désobéissants. Et à la fin du spectacle, on le voit un peu comme le sosie d’Einstein, car il faut vraiment être sacrément brillant pour que ce chaos artistique tienne plus ou moins la route, même si on n’y comprend rien. 

Saute-mouton ! ©Richard Haughton
Chaos technique

Passée la description rationnelle des éléments de décor et d’une ébauche de narration, il est compliqué de décrire ce tourbillon… James Thierrée le confesse lui-même : « Je voulais faire un spectacle qui soit un chaos assumé. Une vraie toupie ». En effet, il a poussé les limites encore plus loin par rapport à ses précédentes créations. Plus de « fil rouge » et de « canevas formaté ». Aucune explication n’est donnée. On oublie le rationnel : ce sont des sensations que l’on doit retenir, avant tout. 

Au cas-où les spectateurs ne l’auraient pas compris ou se plaindraient de ne rien comprendre à cette nouvelle création, il interrompt lui-même le spectacle pour nous rassurer sur notre intelligence rationnelle : « où est la dramaturgie ? », « ça raconte quoi ? ». Résultat pendant 1h45, nous sommes en total lâcher-prise, sans penser à rien. Nous regardons ce qui se joue devant nous afin de ressentir des « joyeuses pulsations » devant certains numéros ensorcelants. Nous voilà un peu comme une Alice au pays des merveilles qui aurait abusé de « space cake ». Tous les arts (danse, musique, cirque, pantomime) se mêlent de façon intelligente. Ça déborde d’énergie et de joie de vivre.  Il faut avouer que le niveau technique de certaines acrobaties est époustouflant. Certaines chorégraphies sont aériennes et ne tiennent qu’à un bras tenant une corde à plusieurs mètres du sol : des bagarres se déroulent plus proches du plafond que du sol, une femme se contorsionne comme un malabar. Un homme se projette à travers un cadre comme une fusée. La musique complètement loufoque quant-à-elle, porte entièrement le spectacle, même si les morceaux et les chansons sont parfois d’une étrangeté musicale foisonnante.  Compliqué de classer la musique en folk, électro, classique ou rock. Les chansons ressemblent à des poésies chantées dont l’objectif est de faire jaillir chez le spectateur beaucoup d’émotions en se combinant avec un tourbillon d’images. 

Room : un spectacle qui sort à peine du cadre… ©Richard Haughton

Se raccrocher à des références 

Même sans fil narrateur, notre esprit ne peut s’empêcher de se raccrocher à certaines choses connues. Il veut comprendre d’où vient le « butin, amassé au cours du temps d’écriture » par James Thiérrée. Un trésor composé d’« un décor, des accessoires, des chorégraphies, de la musique, des personnages ». Room est le grand kiff de James, où il balance tout ce qui l’a ému pendant la période COVID. Certains clins d’œil sont clairement captées : la main baladeuse de la famille Adams ou les costumes de son précédent spectacle, Frôlons. Et puis on ne peut s’empêcher de penser à Room comme une version un peu plus chaotique du film Amarcord de Fellini, où un gamin rencontre de drôles de gens.

 

Au bout d’un moment, on arrête de se torturer l’esprit à trouver des explications rationnelles. Vous l’avez compris, l’histoire importe peu. Et comme souvent pour les créations de James Thierrée, on se souviendra de quelques numéros d’acrobatie époustouflants et d’un tourbillon d’images d’une grande poésie. Chacun peut aller de sa propre interprétation, mais l’essentiel c’est d’avoir été parcouru à un moment du spectacle par un frisson d’émotion. James semble avoir réussi son coup, vu la standing ovation de plusieurs minutes à la fin de la pièce, et du bis. Un conseil, si vous voulez apprécier ce spectacle : il va falloir lâcher prise. 

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